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La Suisse va conserver des archives colombiennes de la Commission de la vérité

Futur accord entre la Suisse et la Colombie pour les archives de la Commission de la Vérité
Futur accord entre la Suisse et la Colombie pour les archives de la Commission de la Vérité / La Matinale / 4 min. / le 11 août 2023
Lors d'une rencontre entre le président de la Confédération Alain Berset et son homologue colombien Gustavo Petro à Bogota, un accord a été signé pour conserver en Suisse les archives très sensibles de la Commission de la vérité, qui retrace 60 ans d'histoire du conflit armé dans le pays.

L'accord prévoit la conservation en Suisse d'une copie numérique des documents de la Commission de la vérité colombienne - mise sur pied dans le cadre de l'accord de paix de 2016 - qui contiennent entre autres des enregistrements audio et vidéo sensibles de témoignages.

La délégation suisse ne repartira pas avec le disque dur à la fin de la visite, mais celui-ci sera acheminé dans les prochains mois et gardé dans un coffre-fort à Berne. Comme il ne sera pas connecté, aucun piratage des données sensibles n'est à craindre.

"Ce ne sont pas des archives ouvertes au public, la Colombie ne l'a pas souhaité", précise Simon Geissbühler, chef de la division Paix et droits de l'Homme du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), vendredi dans La Matinale de la RTS.

La démarche doit permettre d'assurer la sécurité des documents originaux et leur copie, en conservant une deuxième copie en Suisse. Pour Simon Geissbühler, cette demande est un "signe de la confiance en la Suisse et en notre politique de paix".

Des archives "de droits humains"

En Colombie, "l'effort qu'a fourni la Commission de la vérité, qui reprend 60 ans d'histoire de conflit armé, est énorme. Plus de 2000 personnes ont travaillé pour collecter ces informations. Nous avons auditionné 30'000 personnes, réalisé 17'000 interviews et 700 rapports", explique Luisa Gonzales, ancienne commissaire de la vérité.

"C'est la première fois qu'il y a une compréhension politique qui ne vient pas que des académiques mais des victimes, des responsables, des autorités et des militaires. Tout cela constitue une archive de droits humains", ajoute-t-elle.

Après les Îles Marshall et le Guatemala, il s'agit du troisième ensemble de documents sensibles d'un pays tiers que la Suisse héberge.

Une conservation de la mémoire

La conservation de ces archives colombiennes est importante, car celles-ci pourraient être détruites en cas de catastrophe naturelle, par exemple, ou si un nouveau gouvernement décide un jour de les détruire, détaille encore Simon Geissbühler.

Pour la directrice de l'unité de mise en oeuvre de l'accord de paix Gloria Cuartas, cette décision va au-delà des questions sécuritaires: "La Suisse se constitue comme un lieu de mémoire pour que le monde n'atteigne plus jamais ce niveau de destruction", déclare-t-elle.

"Le message que le pays envoie aujourd'hui en recevant les recommandations de la Commission de la vérité est non seulement une contribution pour les protéger, mais permet aussi qu'on en comprenne la valeur en Colombie. Car s'il y a de la vérité, il y a un futur."

D'ici quelques mois, les caves des archives de la Confédération contiendront un nouveau trésor d'information et de mémoire.

Sujet radio: Anouk Henry

Texte web: iar avec ats

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Réunion entre Alain Berset et Gustavo Petro

Le président de la Confédération Alain Berset a rencontré jeudi à Bogota le président colombien Gustavo Petro. Les discussions ont notamment porté sur le processus de paix en Colombie.

Gustavo Petro est confronté à la plus grande crise politique qu'il ait connue depuis son entrée en fonction il y a un an. Son fils Nicolas Petro a été arrêté il y a quelques semaines pour blanchiment d'argent et enrichissement illégal dans le contexte d'un scandale lié à la campagne présidentielle avant d'être remis en liberté conditionnelle.

Jeudi dernier, il a toutefois admis que des fonds d'un cartel de la drogue avaient été utilisés dans la campagne de son père. Depuis que le scandale a éclaté, Gustavo Petro a toujours nié avoir reçu de l'argent des barons de la drogue.

>> Lire aussi : De l'argent de la drogue aurait servi à financer la campagne du président colombien

Rencontre avec les guérilleros

Alain Berset a également rencontré les parties négociant l'accord de paix de 2016 entre le gouvernement colombien et les FARC dont l'application est soutenue par la Suisse. Une rencontre a aussi eu lieu avec l'Armée de libération nationale (ELN). La Suisse accompagne, avec l'Allemagne, la Suède et l'Espagne, les efforts de paix entre ces parties.

Le président de la Confédération s'est montré modérément optimiste. "La volonté d'aller de l'avant m'a fortement impressionné", a-t-il déclaré. Après toutes ces décennies de guerre, tout le monde a compris que sans paix, il n'y a pas de développement social, économique et culturel.

Le président de la Confédération Alain Berset et son homologue colombien Gustavo Petro se sont rencontrés jeudi à Bogota. [Alessandro della Valle]
Le président de la Confédération Alain Berset et son homologue colombien Gustavo Petro se sont rencontrés jeudi à Bogota. [Alessandro della Valle]

Mais finalement, les négociations de paix ne concernent pas seulement les personnes qui participent aux négociations, mais des groupements qui sont partout dans le pays. "Cela ne va pas de soi que ce sera accepté", a poursuivi le Fribourgeois.

Engagement de la Suisse

Les négociations entre le gouvernement colombien et l'ELN ont montré de premiers progrès. Un cessez-le-feu de six mois a débuté le 3 août. Cependant, outre les FARC et l'ELN, d'autres groupes armés sont actifs en Colombie.

Alain Berset a également rappelé que la Suisse avait une présence stable et ce depuis longtemps en Colombie, lorsqu'il s'agit d'apporter son aide. De plus, la Suisse y est engagée dans le cadre du Conseil de sécurité de l'ONU, grâce à son siège de membre non permanent. "L'un des objectifs du voyage était aussi de me faire une idée de la situation", a précisé le président de la Confédération. Cela est précieux pour le travail au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, selon lui.