Actuellement, la Suisse et les cantons ont la main sur le robinet, celui qui gère le débit du Rhône, que ce soit en amont, du côté du Valais, ou en aval, à Genève, à la sortie du Léman. A chaque fois, le contrôle est exercé au travers d’installations hydroélectriques.
Mais la France a besoin d'eau pour l’irrigation de ses terres agricoles et le refroidissement de ses centrales nucléaires, notamment celles proches de la frontière. Et en période de sécheresse, chaque goutte du Léman représente de l'or.
François Hollande avait lancé le pavé dans la marre en 2015. Depuis, les différentes parties se sont mises autour de la table. Une question de bon voisinage, affirme la Confédération.
Coopération accrue ou débit fixe?
La Suisse souhaite donc la mise en place d'un dispositif de coopération accrue, mais veut éviter de devoir donner la garantie d'un débit fixe. Grosso modo, elle refuse de définir le degré d'ouverture des vannes.
Contactés, les cantons de Vaud, du Valais et de Genève soulignent d'ailleurs ce point. Felix Wertli, chef de la délégation suisse pour ces négociations, défend cette position au micro de La Matinale.
"Ce n'est pas la question en ce moment. On ne discute pas de ça avec la France. Nous, on parle des niveaux du lac, de comment on travaille ensemble en situation de crise, avec des inondations, des sécheresses. On ne discute pas du débit du Rhône".
Ligne rouge des cantons
Une crainte demeure pourtant: que ces négociations ne soient qu'une première étape avant de traiter le dossier chaud des débits fixes, ce que réfute Felix Wertli. Il a d'ailleurs bon espoir de sceller les discussions d'ici la fin de l’année.
Les cantons ont déjà défini leurs limites dans le cadre de ces discussions, prévient Vassilis Venizelos, chef du Département vaudois de l'environnement.
"Une des lignes rouges est la volonté du canton de ne pas créer de nouvelles structures complexes. La plus importante, c'est que cet accord ne devra pas comprendre d'engagements chiffrés sur les débits du Rhône." Selon l'élu, les cantons et la Confédération sont "parfaitement alignés" sur ce point.
Pression de Paris
Ces négociations sont une épreuve de force face au réchauffement climatique. Depuis une décennie, la France demande à la Suisse de revoir la gestion de son débit, jugé parfois insuffisant de l'autre côté de la frontière.
L'annonce de la Confédération de mercredi dernier arrive d'ailleurs à un moment bien particulier, selon Christian Brethaut, professeur associé en gouvernance de l’eau à l’Université de Genève.
"Il y a une prise de conscience notamment des enjeux liés à la sécheresse, donc chaque millimètre d'eau devient important, et le Léman devient dès lors de plus en plus un réservoir stratégique notamment des usages clés du côté français, comme l'irrigation agricole ou la production électrique, qu'elle soit hydroélectrique ou surtout nucléaire".
Visite d'Emmanuel Macron
L’Agence française de l’eau tirait d'ailleurs la sonnette d’alarme au mois de mars: le débit du Rhône pourrait bien baisser de 20% en 30 ans. " La question est davantage à l'agenda aujourd'hui, et la visite d'Emmanuel Macron à Berne amène encore un peu plus de pression sur les négociations politiques en cours aujourd'hui", décrit Christian Brethaut.
>> Les précisions dans La Matinale:
Sujet radio: Diana-Alice Ramsauer
Adaptation web: Julien Furrer
Plus grande réserve d’eau douce d’Europe occidentale
Le Léman est la plus grande réserve d’eau douce d’Europe occidentale. Production hydroélectrique, navigation, irrigation, le Rhône a de multiples usages, en France comme en Suisse.
Mais c’est Genève qui gère le débit du fleuve via un barrage, en fonction de ses propres besoins en hydroélectricité et du respect des niveaux de lac.