"L'avis d'ici": les Suisses et les Suissesses partagent leurs préoccupations sur la santé
Tous les quatre ans, dans le cadre des élections fédérales, les partis rivalisent d'idées et de slogans. Mais sont-ils à la hauteur des préoccupations des Suissesses et des Suisses? "L'avis d'ici", ce sont des rencontres avec 18 citoyennes et citoyens issus de différentes régions de Suisse romande. Chaque semaine, dans La Matinale, le 12h30 et Forum, ils partagent leurs inquiétudes et leurs préoccupations.
Cette semaine, les témoins partagent leurs préoccupations sur le thème de la santé.
Débat de Forum
Les coûts de la santé
Retrouvez les témoignages de l’opération "L'avis d’ici" dans le premier grand débat électoral organisé jeudi à Boncourt (JU) sur le thème de la santé.
L'émission Forum a soumis les témoignages de Lydia Russi, Laure Chételat et Jérôme Mazza à six candidates et candidats aux élections fédérales.
Défis du quotidien
La pénibilité du travail
Selon une étude européenne réalisée en 2021, un travailleur suisse sur quatre craint pour sa santé ou pour sa sécurité au travail.
En Suisse, la cadence élevée de travail est la bête noire des actifs. Près de 60% des employés sont concernés. C’est le cas de Laure Chételat, ouvrière horlogère à Bassecourt (JU), et de ses collègues.
Les journées de Laure commencent très tôt et si elle n'est pas personnellement poussée à la productivité, ses collègues le sont.
"Moi, je suis syndiquée. Je trouve qu'on doit respecter les conventions collectives et la loi", affirme-t-elle dans le 12h30 de la RTS. Ses collègues en revanche ne sont pas forcément syndiquées car "elles ont peur".
"Quand on a 50 ans, on fait attention. On ferme sa bouche pour ne pas perdre son travail, parce qu'on sait que ce sera très difficile d'en retrouver un autre", explique-t-elle.
Déserts médicaux
"Des mois pour avoir un rendez-vous"
La Suisse manque cruellement de médecins dans certaines régions. Fribourg, le Jura et le Valais sont les cantons les moins bien dotés, selon les derniers chiffres de l'OSTAT.
Jérôme Mazza habite à Onnens, dans la campagne fribourgeoise, à une quinzaine de minute en voiture de la ville de Fribourg. Il explique dans La Matinale qu'il n'est pas toujours facile de trouver un rendez-vous de médecin, surtout chez un spécialiste. "Il faut des mois pour avoir un rendez-vous", témoigne-t-il.
Laure Chételat habite à 30 minutes de Delémont. Ces deux enfants ont un trouble du spectre autistique. Elle déplore également le manque de spécialistes dans son canton. "Il existe quelques adresses jurassiennes qui sont surchargées. Moi par exemple, j’ai été dans le canton de Neuchâtel pour avoir un diagnostic", explique-t-elle.
Lydia Russi , elle, vit à Sierre. La ville étant dotée d'un hôpital, elle n'est pas touchée personnellement par le manque d’offres de soins. Elle constate toutefois la difficulté pour certains de ses amis, qui habitent par exemple le Val d’Anniviers, de trouver un médecin de famille à proximité du domicile.
Le canton du Valais doit en effet convaincre les jeunes praticiens de s’installer dans les régions plus reculées. Lydia, qui s'est lancée dans une maturité spécialisée santé, ne se voit d'ailleurs pas travailler en montagne. "Si je suis obligée de le faire, je le ferai, mais je chercherai directement un autre job un peu plus en plaine", affirme-t-elle.
Troubles du spectre de l'autisme
Yalou, le quatrième membre de la famille Chételat
Yalou est le quatrième membre de la famille Chételat. C'est un cocker formé spécifiquement par l'association suisse Farah-Dogs pour accompagner les enfants avec des troubles du spectre de l'autisme.
Clara, 14 ans, suit régulièrement un cours avec un éducateur canin jurassien pour garder confiance et ne pas perdre la main, comme ce mardi après l'école.
Bilinguisme à Sierre
Rapprocher le Haut et le Bas-Valais
Alors que les germanophones ne représentent plus que 6% de la population de Sierre, une question se pose:la ville frontière entre le Haut-Valais et le Valais romand est-elle vraiment bilingue? Car, non seulement, la ville est officiellement francophone mais en plus, l'allemand est seulement la 4e langue principale parlée dans la ville, loin derrière le français, mais aussi derrière le portugais et l'italien.
Dans les amies de Lydia Russi, une seule personne parle les deux langues. Et pourtant, Lydia habite dans le quartier de Glarey, qui est historiquement le quartier germanophone de Sierre. Et cela à tel point que dans certaines professions cela devient difficile, voire impossible, de trouver du personnel bilingue.
Les autorités cantonales, du district ou de la ville, ont donc pour souhait de renforcer le bilinguisme notamment en augmentant le nombre de classes bilingues un peu partout sur le territoire et en favorisant les échanges entre les écoles.
Il y a aussi la volonté des districts de Sierre et Loèche de se rapprocher et de plus collaborer.
La cohabitation des francophones et des germanophones en Valais reste un sujet politique sensible. C'est d'ailleurs l'une des thématiques qui figure au cœur des débats de la Constituante.
Défis du quotidien
L'avenir du secteur de la santé
Il pourrait manquer jusqu'à 40'000 infirmières et infirmiers en Suisse d’ici 2040, selon une étude du cabinet de conseil PwC. La pénurie de personnel guette l’ensemble du secteur de la santé.
Face au vieillissement de la population, l’enjeu est de rendre certaines professions plus attractives, mais aussi d'orienter plus de jeunes dans cette voie.
Lydia Russi a débuté lundi sa maturité spécialisée santé à la Haute école de santé de Sion. Selon elle, si les métiers de la santé n'attirent plus vraiment les jeunes, c'est parce que leur mentalité a changé.
"Les jeunes d'aujourd'hui privilégient la santé mentale et s'autorisent certaines activités en dehors du cadre du travail", explique-t-elle dans le 12h30. "Donc ces horaires qui ne sont pas très flexibles dans le domaine hospitalier font que les jeunes ne sont pas forcément intéressés à travailler dans les hôpitaux".
Agriculture
La nécessité d'expliquer le métier
Le métier d'agriculteur est parfois mal aimé ou du moins mal compris. Malmené aussi ces dernières années par les débats politiques et autres votations à son sujet, tout le monde a son avis sur cette profession. Mais peu connaissent réellement la réalité des paysans.
Malgré la difficulté du métier, il s'agit d'une vraie passion pour Jérôme Mazza. Il estime toutefois qu'un immense travail de vulgarisation et d'explication du métier est nécessaire auprès de la population.
Défis du quotidien
Le rapport à la politique
Dans une cinquantaine de jours, 365'000 personnes pourront voter pour la première fois en Suisse à l'occasion des élections fédérales. Parmi elles se trouvent des jeunes désormais majeurs.
Mais voter n'est pas toujours si simple selon Lydia, Claire, Juliette et Noémie. A quelques semaines de recevoir leur premier bulletin de vote, les quatre Sierroises reconnaissent que la politique reste assez floue pour elles.
"J’aimerais bien apprendre plus sur la politique, mais je ne sais pas par où commencer. Je ne sais pas sur quel site aller, quelle vidéo regarder", explique l'une des jeunes femmes dans le 12h30.
Les quatre amies regrettent le manque de formation à la citoyenneté à l'école, même si elles admettent ne pas toujours se sentir concernées par les sujets politiques.
Social
La rémunération des proches aidants
Aujourd'hui en Suisse, trois personnes sur quatre s'occupent d'un membre de sa famille au quotidien, qu'il s'agisse d'une personne âgée, d'une personne malade ou encore d'une personne en situation de handicap.
Tous ces proches aidants s'engagent toutefois gratuitement et ne sont pas reconnus. C'est le cas de Laure Chételat, qui élève seule ses deux enfants, Clara 13 ans et Lucas 17 ans, tous les deux porteurs de troubles du spectre de l’autisme et de l’attention.
Son engagement rythme la vie de Laure et représente une immense charge émotionnelle et organisationnelle Et pour subvenir aux besoins financiers de sa famille, Laure travaille aussi à 100% comme ouvrière horlogère.
Si la Jurassienne reste optimiste, elle regrette un manque de reconnaissance. Et celle-ci passerait, selon elle, par une rémunération des proches aidants.
Défis du quotidien
Concilier travail et famille
Jérôme Mazza, agriculteur à Onnens, dans le canton de Fribourg, travaille 72 heures par semaine sur son exploitation. L'un de ses défis du quotidien consiste à dégager du temps pour sa vie de famille. "On fait des enfants pour s'en occuper", affirme-t-il dans le 12h30 de la RTS.
Sa femme Anita dit bien vivre la situation, même si elle souhaiterait que son mari ait davantage de temps libre. "Il faudrait qu'il puisse gagner un peu plus pour engager des employés et travailler moins", estime-t-elle.
Pour Jérôme en effet, "le nerf de la guerre, c'est les sous". Et selon l'agriculteur, afin de gagner plus, il devrait être payé davantage pour ses produits.
Santé
Hausse des coûts et manque de personnel soignant
Selon le sondage SSR "Comment va la Suisse?", plus de 70% des Suisses considèrent la santé comme une préoccupation majeure. Du 25 au 31 août, trois témoins, avec trois réalités différentes, s'expriment donc sur cette thématique, en évoquant notamment la hausse des primes, les coûts de la santé et l'accès aux soins et aux médicaments.
Laure Chételat, ouvrière horlogère jurassienne de 47 ans et Jérôme Mazza, 45 ans, agriculteur dans le canton de Fribourg, s'inquiètent de cette augmentation des coûts. Ils partagent également un certain agacement envers la classe politique, incapable de résoudre le problème et déconnectée de la réalité, selon eux.
Lydia Russi, quant à elle, s'inquiète du manque de personnel soignant. La Valaisanne de 18 ans, qui vient de débuter une maturité spécialisée santé, estime que la valorisation des métiers des soins est au coeur du problème.
Les témoins se préoccupent également de l’accès aux soins hors des grandes villes. Tous les trois habitent en effet dans des régions périphériques, où la pénurie de médecins est la plus importante de Suisse romande.