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"On devrait constater une baisse progressive du prix de l'électricité"

L'analyse de Nicolas Charton, consultant en stratégie énergétique, sur l'approvisionnement énergétique de la Suisse
L'analyse de Nicolas Charton, consultant en stratégie énergétique, sur l'approvisionnement énergétique de la Suisse / 19h30 / 2 min. / le 7 septembre 2023
Près de 20% en moyenne. C'est l'augmentation des tarifs de l'électricité pour les ménages suisses qui a été annoncée mardi par la Commission fédérale de l'électricité (ElCom). Pour Nicolas Charton, consultant en stratégie énergétique, la situation devrait toutefois s'améliorer prochainement, car les prix ont déjà baissé sur le marché.

Après la nouvelle augmentation attendue des primes maladie et l'inflation qui touche maintenant le pays depuis de nombreux mois, l'annonce de l'ElCom a fait l'effet d'un nouveau coup de massue. En moyenne, les prix de l'électricité devraient augmenter de 18% dès 2024. Une situation qui connaît aussi des grandes disparités, d'une commune à l'autre et selon les fournisseurs.

A titre d'exemple, les envolées les plus marquées en Suisse romande se situent dans le canton de Fribourg. Les tarifs du Groupe E pour un ménage consommant 4500 kWh grimpent d'environ 28% dans de nombreuses communes. A Estavayer-le-Lac, la facture grossira même de 33%.

>> Lire aussi à ce sujet : Commune par commune, la carte des hausses du prix de l'électricité en 2024 et La facture d'électricité gonflera en moyenne de 18% en 2024

L'achat d'électricité en avance

Cette hausse des prix ne reflète pourtant pas l'état actuel du marché. Alors que l'année dernière, les prix par kWh sont montés à 50 centimes, voire un franc, ils sont maintenant d'environ 10 centimes.

Quand on regarde les prix de l'électricité l'an dernier, c'était la folie. Ils ont été multipliés par dix, par vingt. Aujourd'hui, ils ne sont 'que' deux fois plus élevés qu'avant la crise

Nicolas Charton, consultant en stratégie énergétique

Invité du 19h30 jeudi, Nicolas Charton, consultant en stratégie énergétique, donne des explications pour ce qui pourrait d'abord sembler contre-intuitif. "Quand on regarde les prix de l'électricité l'an dernier, c'était la folie. Ils ont été multipliés par dix, par vingt. Aujourd'hui, ils ne sont 'que' deux fois plus élevés qu'avant la crise. Donc, le premier effet, c'est que les prix n'ont pas complètement baissé", expose-t-il.

Mais pour le directeur général du cabinet de conseil E-CUBE, c'est surtout le fait que les fournisseurs achètent leur énergie en avance qui explique la différence. "Les fournisseurs ont acheté un bout de l'énergie l'an dernier, lorsque c'était très cher", juge-t-il.

D'après l'expert et à condition qu'une nouvelle crise n'éclate pas, "on devrait constater une baisse progressive" du prix de l'électricité.

Pas de blackout à l'horizon

Au-delà de l'augmentation des prix sur le marché, 2022 avait aussi été l'année où le Conseil fédéral avait martelé par des affiches et des spots publicitaires le besoin d'économiser de l'énergie face à un risque de pénurie pouvant mener à un blackout, soit de nombreuses coupures de courant.

La situation s'est depuis sensiblement améliorée. Pour l'électricité, tous les voyants sont au vert. Les bassins d'accumulation qui alimentent les centrales hydrauliques sont remplis à 82%, quatre des cinq centrales nucléaires suisses sont en état de marche, et le parc nucléaire français, principal fournisseur, a quant à lui fini d'être rénové, après des mois de travaux.

>> Revoir à ce sujet le reportage du 19h30 :

L'approvisionnement énergétique semble assuré pour cet hiver malgré des hausses de prix à prévoir
L'approvisionnement énergétique semble assuré pour cet hiver malgré des hausses de prix à prévoir / 19h30 / 2 min. / le 7 septembre 2023

Pour le gaz aussi, l'heure est à l'optimisme. Les cuves qui alimentent la Suisse sont remplies à 90% en France et 94% en Italie et en Alllemagne. Les stocks de Gaznat, principal fournisseur de Suisse romande, atteignent aujourd'hui 96% de leurs capacités maximales.

"Tant qu'il n'y a pas d'autres phénomènes qui perturbent l'approvisionnement, que ce soit des tensions géopolitiques ou des sabotages, on est assez confiant pour l'hiver prochain", explique dans le 19h30 le directeur général de Gaznat, René Bautz.

Une Suisse toujours très dépendante de l'étranger

"La situation s'est significativement améliorée par rapport à ce qu'on avait à la même date l'an dernier", confirme Nicolas Charton tout en restant prudent au vue "des incertitudes internationales".

Mais si la pénurie ne semble plus être à l'ordre du jour, la dépendance à l'étranger est elle toujours très nette. Pour le consultant, c'est d'ailleurs en grande partie l'embellie dans les centrales nucléaires françaises qui explique que la situation se soit améliorée à ce point pour la Suisse.

Quand on parle de pénurie d'énergie, ce sont des réflexions qui prennent des dizaines d'années pour pouvoir se corriger

Nicolas Charton, consultant en stratégie énergétique

"La Suisse reste très dépendante des centrales nucléaires françaises, puisque pour le passage de l'hiver, elle doit importer de l'énergie. Elle est aussi dépendante des stocks de gaz en Allemagne", rappelle-t-il.

Pour ce spécialiste, il s'agit donc de transformer "le mix énergétique" du pays, ce qui prend toujours du temps. "Quand on parle de la pénurie d'énergie, ce sont des réflexions qui prennent des dizaines d'années pour pouvoir se corriger. C'est pour ça que la situation n'a pas radicalement changé pour la Suisse par rapport à l'an dernier", juge-t-il.

Et de conclure: "Il va falloir investir dans des capacités de production en Suisse. Accélérer encore le mouvement dans du solaire, de l'éolien, et dans ce qu'on peut encore faire en hydroélectrique pour améliorer la situation (...) il y a encore du chemin à faire".

Propos recueillis par Philippe Revaz

Adaptation web: Tristan Hertig

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