Au total, le budget initial est ramené à 2,1 milliards de francs, 13% de moins que celui révisé pour cette année. "L'impact entier sera connu quand nos délégations auront rempli leur planification budgétaire", a déclaré à la presse le directeur général du CICR Robert Mardini.
Cette étape est prévue pour novembre. "Il y aura des coupes significatives", a affirmé le directeur général, sans vouloir s'avancer sur un chiffre. La fermeture de délégations semble exclue, mais certaines sous-délégations seront redimensionnées ou même supprimées.
Au siège en revanche, le chiffre prévisionnel atteint environ 270 coupures de postes sur les quelque 1400 actuels. Aucun département n'est épargné, ni aucune unité. Certains seront plus affectés que d'autres, en fonction de la taille critique de chacun. Des facteurs comme la menace cybersécuritaire, alors que le CICR a été souvent ciblé ces dernières années, et la capacité de pouvoir répondre à de nouveaux conflits doivent être considérés, selon Robert Mardini.
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"Ces décisions sont inévitables et douloureuses", dit le directeur général, qui quittera lui-même son poste en mars prochain, au terme de son premier mandat dans cette fonction. Il a relevé le "paradoxe" entre ces difficultés et les besoins humanitaires grandissants en raison des conflits et des situations météorologiques extrêmes.
Dans l'émission Forum, Robert Mardini souligne que les prévisions pour le budget 2024 "s'inscrit dans une tendance à la baisse des budgets humanitaires". Et d'insister: "Ce n'est pas une crise du CICR, c'est une crise du secteur humanitaire. Toutes les agences humanitaires sont en train d'opérer des réductions massives de leurs distributions pour les populations affectées par les conflits et les crises".
Geste suisse récemment
Désormais, l'organisation va devoir se rabattre sur des chantiers prioritaires, surtout ceux où elle peut s'appuyer sur une valeur ajoutée par sa présence ou son accès. Le directeur général mentionne notamment le corridor de Latchine, où le CICR peut évacuer des patients ou apporter une aide à la population arménienne enclavée dans le Haut-Karabakh. Ou encore le Mali, les échanges de détenus au Yémen ou les visites de prisonniers en Afghanistan.
Admettant le besoin de "repenser le système humanitaire", Robert Mardini en appelle aux acteurs du développement pour qu'ils s'engagent davantage sur certaines crises. "Nous ne sommes pas là pour piloter tout le système sanitaire d'un pays", insiste-t-il, parlant notamment de l'Afghanistan. Et il met également en garde contre une certaine "fatigue" des donateurs en Ukraine, comme après le début de la guerre en Syrie.
Les nouvelles coupes vont devoir être menées alors que l'organisation fait face à des difficultés. Le CICR avait déjà annoncé 1800 licenciements parmi 3000 coupures de postes environ pour cette année, à la fois au siège et dans les différentes délégations. Le budget avait dû être revu à la baisse et des mesures de réduction des coûts de plusieurs centaines de millions de francs avaient été décidées.
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Face à ces problèmes, un appel avait été lancé aux donateurs. Parmi eux, la Suisse a récemment fait un geste financier. Le Conseil fédéral a annoncé un soutien de 50 millions de francs et le report du remboursement d'un prêt.
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"Nous avons été déçus en bien" par la réaction des soutiens habituels, affirme le directeur général. Si les 300 millions de promesses supplémentaires "se matérialisent d'ici la fin de l'année", la situation pour cette année sera stabilisée, dit-il, ajoutant qu'il est encore trop tôt pour en être certains.
Davantage de rigueur financière
S'il admet que l'organisation a été "prise de court", Robert Mardini explique que le Comité n'a rien fait d'autre que de vouloir "maintenir le même niveau d'aide que les années précédentes". L'inflation et le déséquilibre du financement sur l'Ukraine par rapport aux autres crises sont notamment en cause.
L'organisation n'a cessé de grandir depuis dix ans pour dépasser les 20'000 employés. Certains, à l'interne comme en dehors de l'institution, ont critiqué une progression incontrôlée.
Le directeur général reconnaît que la surveillance financière est désormais menée "rigoureusement". Peut-être "davantage que sur les dix dernières années". Et Robert Mardini d'affirmer que la crise n'affecte pas la réputation de l'organisation, selon les discussions qu'il a pu avoir avec les donateurs, les partenaires ou les parties au conflit. "La crédibilité du CICR est intacte. C'est quelque chose qui nous honore", insiste-t-il.
ats/ebz