Les glaciers suisses ont encore fondu de 4% cette année, d'après les données publiées par l'Académie suisse des sciences naturelles. C'est le deuxième recul le plus important depuis le début des mesures.
Il est très difficile de se représenter un tel volume. Imaginez un cube qui contiendrait toute cette glace. Ses côtés mesureraient près de quatre fois la hauteur de la tour Eiffel.
Dans l'infographie ci-dessous, nous avons comparé ce cube de glace à plusieurs grands monuments: la pyramide de Gizeh (139 mètres de haut), la tour Eiffel (330 mètres, antenne comprise), l'Empire State Building (381 mètres) et la tour Burj Khalifa de Dubaï (830 mètres).
"L'accélération est dramatique"
Les fontes records en 2022 et 2023, -10% du volume en deux ans, s'expliquent par "une succession d'extrêmes météorologiques et le changement climatique", explique Matthias Huss, qui dirige le réseau des relevés glaciologiques suisse (Glamos).
Pendant l'hiver 2022/2023, il est tombé très peu de neige dans les Alpes, empêchant la régénération des glaciers. Cet été, les températures ont ensuite atteint des records, accélérant leur fonte.
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"L'accélération est dramatique: nous avons perdu autant de glace en deux ans qu'entre 1960 et 1990", soulèvent les experts de l'Académie suisse des sciences naturelles.
Depuis 1950, près de la moitié du volume des glaciers suisses a disparu, comme le montre notre graphique ci-dessous.
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Valentin Tombez
Toute la Suisse touchée
Le phénomène a touché toute la Suisse. Dans le sud et l’est du pays, les glaciers ont fondu presque autant que lors de l’année record 2022. Dans le sud du Valais et en Engadine, une fonte de plusieurs mètres a de nouveau été mesurée à plus de 3200 mètres, alors que les glaciers étaient encore en équilibre à cette altitude il y a quelques années.
La perte d’épaisseur atteint jusqu’à trois mètres, notamment sur le glacier de Gries (VS), celui du Basòdino (TI) ou le glacier Pers (GR), soit beaucoup plus que lors de la canicule de 2003.
La situation entre l’Oberland bernois et le Valais, par exemple au Grand glacier d’Aletsch (VS) et au glacier de la Plaine Morte (BE), est moins dramatique, en raison du meilleur enneigement de l’hiver dernier. On y enregistre tout de même une perte moyenne de plus de deux mètres.
"Des changements extraordinaires"
Comme chaque année au mois de septembre, les experts chargés d'étudier la cryosphère au sein de l'Académie suisse des sciences naturelles étaient présents il y a quelques jours sur plusieurs glaciers suisses pour des mesures. "Nous avons été choqués encore une fois de constater une fonte aussi forte", déplore au micro de La Matinale Matthias Huss, glaciologue à l’Ecole polytechnique de Zurich.
"Quand j'étais,sur le terrain, j'étais triste de voir la disparition des petits glaciers. Il y a deux ans, je n'aurais pas pensé vivre une fonte aussi rapide. Mais depuis l'année 2022, tout a changé. Il est important de réaliser que ces changements sont extraordinaires."
"Il est tout à fait possible de s'imaginer ce pays sans glaciers", reconnaît le scientifique à l'AFP. Il souligne quand même qu'une action décisive de "stabilisation du climat" en ramenant les émissions de CO2 à zéro aussi vite que possible pourrait permettre de conserver "un tiers de la glace formée en Suisse".
Cela signifie "que tous les petits glaciers auront disparu et que les grands glaciers seront beaucoup plus petits, mais il y aura quand même un peu de glace dans les régions les plus élevées des Alpes et quelques glaciers que nous pouvons montrer à nos petits-enfants", veut espérer Matthias Huss.