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Écrire un livre pour faire campagne, le choix de certains candidats

Écrire un livre pour faire campagne, un outil qui persiste parmi les candidats. [KEYSTONE - SALVATORE DI NOLFI]
Ecrire un livre pour faire campagne, ça marche? / La Matinale / 4 min. / le 10 octobre 2023
"Quel est le point commun entre "La Saltimbanque," "Un vélo pour Noël," et "Accent Suisse"? Ce sont trois livres écrits par des candidats aux élections fédérales. À l'ère des réseaux sociaux, le bon vieux livre n'a pas dit son dernier mot. Mais est-ce vraiment un outil intéressant pour faire campagne?

Les candidates et candidats qui prennent la plume se divisent en deux catégories. Il y a d'abord les politiciens chevronnés qui utilisent le livre pour asseoir leur stature et s'imposer comme les spécialistes d'un domaine.

Par exemple, Roger Nordmann et ses livres sur les questions énergétiques et climatiques, ou encore son camarade socialiste Pierre-Alain Fridez et ses ouvrages sur les avions de combat.

La deuxième catégorie comprend les nouveaux venus en politique. Pour eux, le livre est un moyen de se faire connaître. Mais pour que cela fonctionne, il faut un profil un peu atypique ou une histoire personnelle à raconter, à mettre en avant.

Il n'est donc pas étonnant de retrouver des ouvrages du médaillé olympique Sergei Aschwanden, de la violoncelliste professionnelle Estelle Revaz, ou encore de l'ancien réfugié afghan devenu journaliste, Nasrat Latif. Les trois briguent pour la première fois un siège à Berne.

Pas une nouveauté

Depuis des décennies, les politiciens suisses publient des livres, souvent avant une échéance électorale. Les chiffres fluctuent à chaque élection. La RTS a compté sept ouvrages de candidates et candidats publiés ces derniers mois en Suisse romande. Ce nombre est plutôt élevé, mais reste marginal quand on sait qu'il y a plus de 1000 candidats romands.

Evidemment ces livres ne sont jamais des best-sellers traduits dans des dizaines de langues. Mais ils trouvent leur public, selon Michel Moret, directeur des Éditions de l'Aire, maison qui a notamment publié le dernier ouvrage de Pierre-Yves Maillard.

"Il y a un public plus important que pour la littérature, un public relativement facile à viser", dit-il, mardi dans La Matinale de la RTS. Selon l'éditeur, l'actualité politique qui ne s'arrête jamais offre à ces ouvrages une publicité récurrente, même si la tendance générale est à la baisse de la vente de livres.

"Jadis les livres de Kurt Furgler ou de Georges-André Chevallaz, on les tirait à 10'000 exemplaires et ça ne suffisait pas. Maintenant on les tire à 2000 ou 3000, et si on en vend la moitié, on est très heureux", ajoute Michel Moret.

Cette tendance touche tous les types de livres. Aujourd'hui, quelques milliers d'exemplaires, c'est un succès sur le petit marché romand.

L'impact reste très limité

Écrire un livre ne garantit toutefois pas d'accéder au Parlement. Car cela demande beaucoup d'efforts pour un résultat incertain, selon le professeur de science politique Pascal Sciarini.

"Publier un livre pourra avoir un effet à condition que ce livre bénéficie d'une large couverture médiatique", explique-t-il. "Ce n'est pas le livre en soi et le nombre d'exemplaires que l'on va vendre qui va étendre l'électorat. Si, par contre, il y a une très large couverture médiatique, et qu'on en parle beaucoup, ça peut avoir un effet à ce moment."

Et d'ajouter: "Je pense surtout en termes de mobilisation de l'électorat qui était déjà acquis à la cause de la personne ou du parti concerné à la base, je ne pense pas qu'il faille exagérer l'effet d'un livre sur sa capacité à attirer des voix de l'extérieur".

D'ailleurs, les trois novices évoqués auparavant, Estelle Revaz, Nasrat Latif et Sergei Aschwanden, sont très actifs sur les réseaux sociaux. Ils mènent aussi une vaste campagne sur le terrain. Chez eux, le livre est un outil politique parmi de nombreux autres.

Röstigraben du livre

Néanmoins, la tendance n'est pas la même en Suisse alémanique. Outre-Sarine, très rares sont les candidats à prendre la plume durant une campagne. Cette différence s'explique principalement par l'influence de nos pays voisins. En France, publier un livre est presque un passage obligé. Il y a la tradition française du politique lettré, qui remonte à Victor Hugo ou Chateaubriand.

Là aussi, l'objectif est avant tout de gagner des apparitions télévisées supplémentaires ou d'obtenir des articles dans la presse à peu de frais. À la différence qu'en France, le nombre de médias est bien plus important qu'en Suisse et la politique y est professionnelle.

Valentin Emery/vajo

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