L'UDC fait face à plusieurs plaintes pour racisme dans le cadre de sa campagne électorale
La Commission fédérale contre le racisme a épinglé le premier parti de Suisse et deux organisations supplémentaires, la Licra-Suisse et l'association Hadar (qui réunit des personnes afro-descendantes), se sont jointes jeudi à la démarche.
Le principal visuel incriminé est un tout-ménage distribué dans le pays dans le cadre de l'initiative "Non à une Suisse à 10 millions d'habitants", qui oppose une photo prise mi-septembre montrant des migrants noirs en attente sur l'île italienne de Lampedusa, barrée d'une croix rouge à l'image d'une famille blanche dans la campagne helvétique.
Le montage est associé à "une criminalité importée", des "bagarres violentes", mais aussi le "bétonnage" ou les "embouteillages".
Campagne "qui propage une idéologie raciste"
C'est ce tout-ménage qui indigne la Licra et Hadar. Elles dénoncent un "message de haine" distribué dans toutes les boîtes aux lettres du pays et une discrimination de la communauté africaine qui vit en Suisse. Elles ont annoncé jeudi déposer une dénonciation et une plainte pénales.
"C'est un parti qui clairement, dans ce cas-là, propage une idéologie raciste et fait une campagne raciste", a martelé Philippe Kenel, président de la Licra-Suisse, jeudi dans Forum. Selon lui, il n'est pas question de déterminer si l'UDC - ou les gens qui votent UDC - est intrinsèquement raciste. Mais en raison de ces campagnes, "l'UDC ne peut plus être écoutée à l'aune de la dignité et des qualités morales", estime-t-il.
Interpellé sur le lien concret entre les migrants de Lampedusa et les problèmes évoqués dans le tout-ménage, le président de l'UDC vaudoise Kévin Grangier botte en touche, rappelant que son parti a lancé l'initiative contre l'immigration de masse, acceptée par la population en février 2014 et qui "dénonçait déjà tout ce qui est en train de se passer maintenant". "C'est le même problème et on ne veut pas le régler", dit-il, s'en référant à "la réalité". "Les gens le voient", estime-t-il.
L'UDC invoque la liberté d'expression
D'autres visuels suscitent également la polémique, dont ceux de la campagne intitulée "Nouvelle normalité?", dans laquelle l'UDC associe à nouveau la politique d'asile à la criminalité. Sur les affiches, le parti montre des images d'hommes brandissant des armes pour illustrer des faits divers d'agression ou de bagarres impliquant des étrangers, accompagnées de slogans fustigent le "chaos de l'asile".
La campagne a été jugée raciste et xénophobe par la Commission fédérale contre le racisme et celle-ci a demandé à l'UDC le mois dernier d'interrompre sa diffusion. En vain: l'UDC a rétorqué qu'il s'agissait d'une censure et d'une atteinte à la liberté d'expression.
"On a simplement fait une campagne de fact-checking. On a référencé ce qui s'est passé ces trois derniers mois, tous les faits divers qui expriment la réalité d'une criminalité importée en Suisse", a argué Kévin Grangier dans Forum. Et pour lui, ce n'est "que la pointe émergée de l'iceberg".
Deux associations antiracistes ont également déposé une plainte pénale la semaine dernière, notamment par la voix du conseiller communal socialiste lausannois Samson Yemane, lui-même d'origine érythréenne.
Les usagers des TPG choqués
Enfin, une procédure a été ouverte suite à la dénonciation pénale déposée par un avocat genevois au sujet d'un autre visuel de la section cantonale de l'UDC, utilisée dans le cadre des dernières élections cantonales et d'une campagne sur la sécurité et la défense de la police. Celui-ci représente un homme noir cagoulé en train de menotter un policier.
L'image a notamment été diffusée dans les transports publics genevois et a depuis été retirée en raison de nombreuses plaintes de voyageurs, selon une déclaration des TPG.
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Sujet radio: Charlotte Frossard
Adaptation web: Pierrik Jordan