"Pour moi, le défi de la femme enceinte, c'était de réussir son accouchement et je pensais qu'ensuite c'était tout rose. Mais en fait, j'ai vite compris que le défi réel commençait une fois le bébé dans les bras et je n'étais pas préparée à ça." Anaëlle Burnand, maman de deux enfants, a choisi de ne pas taire ses difficultés de jeune parent.
"J'ai un bébé qui n'a pas beaucoup dormi les sept-huit premiers mois de sa vie. Je voulais donner le change auprès des gens et je n'avais pas le sentiment d'avoir le droit d'évoquer ces difficultés". Elle a depuis franchi ce pas et même créé un podcast qui traite de la parentalité en Suisse.
Les parents sont beaucoup plus ouverts à dire leurs difficultés
"Je pense qu'on est une génération qui a envie de faire changer les choses", poursuit Anaëlle Burnand. "Notre génération est prête à dire qu'il y a des côtés magiques dans la parentalité, mais qu'il y a aussi des grosses difficultés, spécialement dans une société qui demande d'être parfait partout".
Dans la foulée de #MeToo
À Lausanne, au Musée de la main, l'exposition "Bébé en tête" vise justement à briser les tabous. Antje Horsch, responsable du Groupe de recherche périnatale de Lausanne UNIL-CHUV, y a contribué: "C'est important de casser l'image un peu idéaliste autour de la période périnatale". Elle observe qu'avec le mouvement #MeToo, il y a une libération de la parole.
En marge de cette exposition, Anita Kruger, de l'association Jardin des Parents, animera des ateliers de parole: "On parle beaucoup de la grossesse jusqu'à l'accouchement, mais moins de ce qu'il se passe après la naissance. Particulièrement dans nos civilisations, il y a un oubli collectif", souligne cette sage-femme.
À ses yeux, "échanger dans un collectif permet de relativiser, c'est rassurant". Elle observe que les parents d'aujourd'hui disent des choses qui ne se disaient pas par le passé. Ils se posent aussi plus de questions: "On est saturé d'informations et on ne sait plus très bien comment trier".
"Il y a un gros enjeu sur les parents actuels", poursuit Anita Kruger. "Ils arrivent aussi plus tard dans la parentalité et ont des grandes idées sur ce qu'ils veulent de leurs enfants. Ils en font peut-être moins aussi, donc les enfants ça doit être réussi!"
Mais alors que le taux de natalité est en baisse, est-ce que le fait d'évoquer ces difficultés ne risque pas d'effrayer la jeune génération? "J'espère au contraire que cela va leur permettre d'être mieux préparés et que ça va les aider", conclut Antje Horsch.
Joëlle Cachin, Guillaume Rey