Il n'y a aucun indice qui permet de ne pas croire ce qu'a dit Alain Berset, a indiqué Philippe Bauer (PLR/NE) au nom des commissions de gestion du Parlement devant la presse à Berne.
Quelque 200 articles publiés par 24 titres de presse concernant le Covid-19 ont été rédigés sur la base d'indiscrétions. Et 38 séances sur 50 du Conseil fédéral ont été "contaminées", a précisé Thomas de Courten (UDC/BL).
Les commissions ont étudié environ 500 articles et 50 séances du gouvernement. Seules douze d'entre elles n'ont pas été sujettes à indiscrétions.
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"Garder la proportionnalité"
Interrogé sur sa définition d'une indiscrétion, l'ancien chef de la communication Peter Lauener a indiqué que des renseignements pouvaient sans problème être partagés avec des journalistes afin de leur donner des informations contextuelles. Mais cette conception ne correspond pas aux prescriptions, indiquent les commissions dans leur rapport.
Le Neuchâtelois a cependant précisé: "Nous avons voulu garder la proportionnalité." Il n'est pas possible de contrôler toutes les adresses mails privées et publiques de toutes les personnes susceptibles d'avoir été concernées.
Dimension politique, selon Carlo Sommaruga
Interrogé vendredi dans Forum, le conseiller aux Etats genevois Carlo Sommaruga, explique que ce rapport n'a pas été approuvé par l'ensemble de la commission, "un fait très rare". Selon lui, cela vient du fait que cette enquête a une dimension très politique.
Il rappelle par ailleurs que ce rapport visait à la base le Conseil fédéral, mais qu'il s'est finalement concentré uniquement sur la département d'Alain Berset, un fait qu'il qualifie de "regrettable". "Il n'y a, dans ce rapport, aucun fait qui puisse établir qu'Alain Berset ait ordonné ou ait eu connaissance d'agissement ayant porté à des indiscrétions. De même, il n'est pas établi que le chef de la communication d'Alain Berset ait procédé à des indiscrétions" ajoute-t-il encore.
Les médias alémaniques principalement
Ce sont surtout les médias alémaniques, en premier lieu les médias de Ringier et de Tamedia, qui ont profité des indiscrétions de l'administration fédérale et obtenu des informations classifiées. Le Blick, le Sonntagsblick, le Tages-Anzeiger et la SonntagsZeitung ont publié chacun 60 articles sur la base d'informations confidentielles; contre seulement six pour Le Temps et 24 heures.
Dans certains cas, ces journaux alémaniques étaient les premiers à publier des projets de mesures ou des contenus de propositions ou de co-rapports. D’autres journaux ont ensuite explicitement fait référence à ces premières publications dans leurs propres articles.
Perte de confiance
Le Conseil fédéral a essayé de prendre un certain nombre de mesures à cet égard, qui se sont "vite révélées relativement vaines", a poursuivi Philippe Bauer, citant par exemple l'augmentation du degré de classification des documents. Au final, le gouvernement "s'est résigné". Cela a conduit à une perte de confiance de la part de certains conseillers fédéraux, qui ont renoncé à déposer des co-rapports, ou alors ceux-ci étaient simplifiés.
En janvier dernier, les commissions de gestion ont décidé d’enquêter sur les indiscrétions liées aux affaires du Conseil fédéral relatives au Covid-19, y compris sur le rôle du chef du Département fédéral de l’intérieur.
ats/hkr
Le DFI critique le rapport qu'il juge "unilatéral"
Le Conseil fédéral doit prendre position sur le rapport d'ici début février 2024.
Mais dès vendredi soir, le Département de l'intérieur (DFI) de Berset a réagi. Il critique le rapport des Commissions de gestion. Celui-ci se focalise unilatéralement sur l'ancien chef de la communication du DFI.
Le rapport a donc une influence possible sur la procédure pénale et viole ainsi potentiellement le principe de la séparation des pouvoirs, estime le département, qui rappelle qu'il a déposé deux plaintes pénales pour des indiscrétions pendant la pandémie.
Réactions politiques
"Le rapport confirme en premier lieu ce à quoi nous nous attendions. La commission de gestion constate que rien de ce qui avait été reproché à Alain Berset n'a été prouvé" réagit samedi dans le 19h30 le coprésident du PS Cédric Wermuth.
Durant cette période, les trois quarts des séances du Conseil fédéral ont été entachées d'indiscrétions, souligne le Conseiller national UDC Alfred Heer: "Je trouve cela problématique. Je pense que le Conseil fédéral devrait pouvoir compter sur le fait que lorsqu'on dit que le contenu des séances est confidentiel, que l'on puisse s'y exprimer librement. Or cela n'a pas été respecté et cela attise la méfiance".