Myriam (prénom d'emprunt), 24 ans, est actuellement dans l'attente d'une décision du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM). Avec ses parents et sa sœur, elle a fui les talibans en 2016, avant leur prise de pouvoir, et vit depuis lors à Fribourg: "Un taliban a demandé ma main à mon père. C'était un mariage forcé", explique-t-elle jeudi dans La Matinale.
Mais son père a refusé, une décision lourde de conséquences: "Ils l'ont battu et, au final, il a estimé que ça n'allait plus et qu'il fallait partir."
La famille prétexte un rendez-vous médical pour la maman de Myriam et parvient à sortir du village, puis du pays. Arrivés en Suisse, ils obtiennent un permis F.
L'asile assoupli, "une lumière"
Malgré ce statut provisoire, la jeune femme a pu faire un apprentissage d’employée de commerce à l’Etat de Fribourg. Trouver une place n'a pas été facile, notamment parce qu'il a fallu apprendre le français, ce qui a pris plusieurs années: "Cela a pris trois ans. Et ce qui est compliqué, c'est que le permis F n'inspire pas la confiance. On ne sait jamais si les détenteurs vont devoir quitter la Suisse ou non."
Le permis F n'inspire pas la confiance. On ne sait jamais si les détenteurs vont devoir quitter la Suisse ou non
L’assouplissement du droit d’asile ne s’applique pas qu'aux nouvelles arrivées, mais à toutes les Afghanes actuellement en procédure. Lorsque Myriam a pris connaissance de ce changement de règles, elle a déposé une nouvelle demande pour obtenir un permis B, plus durable.
Elle mise beaucoup sur cette nouvelle opportunité: "C'est comme une lumière qui s'est allumée à la maison", dit-elle. "Pour trouver un travail, (un permis B) est beaucoup plus simple. Mais cela me permettrait aussi de demander une bourse d'étude à laquelle je n'ai pas droit avec un permis F. Cela me permettrait d'obtenir mon Master." Un Master que Myriam aimerait effectuer à la Haute école de gestion de Fribourg.
Pas de garantie
Le Secrétariat d’Etat aux migrations indique toutefois que le changement de règles ne signifie pas un feu vert automatique. Chaque demande est traitée au cas par cas. Comme celle de Sohila, qui a obtenu un permis B il y a deux semaines.
Une reconnaissance importante pour cette femme qui, comme Myriam, a fui les talibans, mais pour des raisons différentes. Non à cause d'un mariage forcé, mais à la suite de menaces en raison de son engagement pour le droit des femmes et leur indépendance financière.
Ouvrir un restaurant
Elle, son mari et sa fille sont arrivés en Suisse en 2019: "Mon but était de trouver un endroit où la femme est valorisée, où je me sens en sécurité et où ma fille puisse faire ses études. Mon but était de sauver ma vie, celles de ma fille et de mon mari. C’est pourquoi j’ai choisi la Suisse", relate-t-elle.
Avec son nouveau permis en poche, Sohila et sa famille ont plusieurs projets en vue: "Ce permis B me permet par exemple de travailler. J’avais l’espoir d’ouvrir un restaurant mais le permis F n’autorisait pas de le faire. C’est très bien aussi pour l’avenir de ma fille et pour ses études. Mon mari voulait faire une formation, mais le permis F l'en empêchait. Il va maintenant pouvoir réessayer de la faire."
Pour l’heure, il n'est pas question pour eux de retourner en Afghanistan. "Un jour peut-être, dit-elle, mais seulement si la situation le permet."
En attendant, Sohila, et Myriam disent toutes deux vouloir soutenir les femmes afghanes restées au pays, avec des aides financières par exemple, via des associations.
Mathieu Henderson
Appel d'air?
Pour l’UDC, l'assouplissement de l'asile va créer un appel d’air. Notamment parce que le statut de réfugié offre également la possibilité de demander immédiatement un regroupement familial.
La conseillère fédérale en charge de l’asile Elisabeth Baume-Schneider réfute cet argument: "Il n'y a aucun pull-effect (appel d'air, ndlr) étant donné que cela se passe dans toute l'Europe", a-t-elle expliqué jeudi sur les ondes de la RTS.
"Je ne vois pas comment on pourrait avoir ce que l'UDC affirme de manière péremptoire, soit des millions de femmes qui arrivent en Suisse. Il y a la même proposition en Allemagne et en France, donc il n'y a aucune velléité d'avoir un effet d'attractivité", a ajouté l'élue jurassienne.
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