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Coup de théâtre à la CEDH sur l'interdiction de manifester durant le Covid en 2020 en Suisse

Coup de théâtre à la CEDH sur l'interdiction de manifester durant le Covid en 2020 en Suisse
Coup de théâtre à la CEDH sur l'interdiction de manifester durant le Covid en 2020 en Suisse / Forum / 2 min. / le 27 novembre 2023
La Cour européenne des droits de l'Homme renverse la vapeur sur l'interdiction de manifester décrétée par le Conseil fédéral en 2020 pour lutter contre le Covid. La Grande Chambre juge irrecevable la plainte des syndicats genevois pour violation de la liberté d'opinion et de manifestation.

Alors que la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) avait conclu en première instance à une violation de la liberté d'opinion et de manifestation en mars 2022, la Grande Chambre vire de bord et déboute la Communauté genevoise d'action syndicale (CGAS). Instance suprême de la CEDH, la Grande Chambre a été saisie à la demande de la Suisse à la suite de sa condamnation de mars 2022.

L'Office fédéral de la justice, qui représente la Suisse devant la CEDH, déclare "prendre connaissance de l'arrêt de la Grande Chambre". Il souligne que cette décision est définitive et remplace celle de mars 2022.

>> Relire : La Suisse conteste sa condamnation par la CEDH pour les interdictions de manifester en 2020

La Grande Chambre estime que la CGAS n'a pas épuisé les possibilités de recours offertes par le droit suisse avant de se tourner vers Strasbourg. Autrement dit, la plaignante aurait dû recourir directement contre une interdiction de manifester prononcée spécifiquement à son encontre, en application de l'ordonnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (ordonnance 2 Covid-19 du 13 mars 2020).

La manifestation du 1er Mai annulée

Au lieu d'un tel recours, les syndicats genevois avaient saisi la Cour européenne des droits de l'Homme le 26 mai 2020. Ils se plaignaient d'avoir été forcés à retirer leur demande d'autorisation pour la traditionnelle manifestation du 1er Mai en raison de l'ordonnance. Celle-ci était entrée en vigueur le 16 mars et avait pris fin le 30 mai 2020.

Les juges de Strasbourg considèrent que, ce faisant, la plaignante n'a pas fait le nécessaire pour permettre aux juridictions suisses de jouer leur rôle. En effet, elle pouvait demander le contrôle de la constitutionnalité des interdictions instituées par l'ordonnance 2 Covid-19 en recourant contre un cas d'application de celle-ci. Aucune circonstance ne la dispensait d'épuiser cette possibilité, conclut la Grande Chambre.

Un contexte sensible

En outre, l'instance suprême rappelle le contexte hautement sensible de la pandémie de Covid-19. Dans ces conditions il était d'autant plus important que les autorités nationales puissent procéder à une évaluation entre les intérêts privés et publics. Ce dans le respect des droits protégés par la Convention.

La Grande Chambre a rendu sa décision à une majorité de 12 juges contre 5. C'est à l'unanimité, en revanche, qu'elle juge irrecevable l'argument d'une violation de la liberté syndicale. En effet, ce grief a été invoqué tardivement.

Dans un arrêt de chambre, la CEDH avait admis le 15 mars 2022 la plainte de la CGAS et constaté une violation de la liberté de réunion et d'association. Elle avait jugé disproportionnées l'ingérence subie par la plaignante dans ses droits ainsi que les sanctions prévues par l'ordonnance. En outre, elle estimait que la CGAS n'avait pas disposé d'une voie de recours effective au moment des faits. La cour avait pris sa décision par trois voix contre deux.

ats/lan

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