Charge de travail élevée, rémunération trop basse, difficulté à concilier vies privée et professionnelle: les conditions de travail des infirmières et infirmiers les poussent de plus en plus à quitter leur emploi. Selon le dernier rapport de l’Observatoire de la santé, 36% des jeunes soignants entre 20 et 24 ans quittent le métier durant les premières années de fonction.
"On n’adapte jamais la charge de travail, on ne rajoute jamais quelqu’un quand le service est trop lourd, quand une personne manque on ne la remplace pas", témoigne anonymement dans le 19h30 une infirmière en poste depuis moins d'un an dans un grand hôpital romand.
Tous mes collègues s’imaginent une reconversion, il y a régulièrement des départs
"Je n’arrive pas à m’imaginer dans cinq ans dans ce métier avec ce rythme-là. Donc oui, je pense très souvent à me reconvertir. Tous mes collègues s’imaginent une reconversion, il y a régulièrement des départs."
Soutien par les pairs
Les conditions de travail peinent à s’améliorer. Face à cet exode, certains établissements tentent de trouver des solutions. Au CHUV, un comité jeunesse a été mis en place. L’organe propose un soutien par les pairs aux nouveaux diplômés.
"Nous avons mis en place deux questionnaires par année chez les nouveaux collaborateurs pour faire un coup de sonde pour savoir comment les gens se sentent. L’idée est d’avoir un filet de sécurité au niveau psy ou physique, ou une quelconque problématique, pour qu’on puisse tirer l’alarme", détaille Wassim Jerbia, infirmier au CHUV.
Malgré les difficultés, le métier continue à susciter les vocations. Les inscriptions restent stables, comme à la Haute école de santé La Source. "Ce qui m’intéresse c’est le rôle de personne ressource", glisse Lorraine Brandt, étudiante en soins infirmiers. "J’ai vraiment bon espoir avec l’initiative pour des soins infirmiers forts. Les choses sont sur la bonne voie pour changer. En tout cas, nous, on a l’espoir de les voir évoluer."
Former davantage
L’initiative sur les soins infirmiers comporte une offensive sur la formation. Cette dernière devrait être déployée en 2024 et prévoit de débloquer près d'un milliard pour former davantage dans les soins.
Nous formons 300 étudiants. Pour répondre aux besoins du marché, il faudrait en former au moins le double
Cette mise en oeuvre est attendue avec impatience par La Source. "Nous formons 300 étudiants. Pour répondre aux besoins du marché, il faudrait en former au moins le double" calcule Stéphane Cosandey, directeur de La Source.
"L’initiative va soulager le système maintenant. Là où il faut qu’on soit intelligent, c’est de faire en sorte que ces mesures soient pérennes. Et ça, c’est le travail de la Confédération et des cantons avec les institutions."
À l’heure d’une pénurie chronique du personnel de santé, retenir les jeunes est un défi de taille. En Suisse, près de 7000 postes d’infirmier seraient à pourvoir.
Sarah Jelassi/asch
La part du personnel infirmier tend à diminuer
La part des postes infirmiers diminue par rapport au personnel médical et aux autres membres du personnel dans les hôpitaux de soins aigus, montre une analyse commandée par l'Association suisse des infirmières et infirmiers (ASI).
L'analyse se base sur les données de 2010 à 2021 de la statistique des hôpitaux de l'Office fédéral de la statistique. Elle a porté sur l'évolution des équivalents plein temps (EPT) des différents groupes professionnels dans les hôpitaux de soins somatiques aigus, indique mardi l'ASI dans un communiqué.
Alors que les EPT des médecins ont augmenté de 41% sur cette période, ceux du personnel infirmier diplômé n'a progressé que de 13%, respectivement de 19% si l'on considère l'ensemble du personnel infirmier.
La part de l'ensemble du personnel infirmier a ainsi diminué de 43,1 à 40,3% et celle du personnel infirmier diplômé de 22 à 19,7%. Dans le même temps, les postes de médecins sont passés de 14,3 à 15,9% et ceux des autres membres du personnel de santé de 42,6 à 43,3%. (ats)