De nombreux éléments de la loi ont bien fonctionné durant la crise. Mais "des améliorations ponctuelles sont souhaitables", a indiqué le président de la Confédération Alain Berset devant la presse à Berne. "Le but est d'être bien préparé pour une nouvelle pandémie ou d'autres dangers."
De situation normale...
Le modèle de gestion de crise à trois échelons (situation normale, particulière et extraordinaire) a porté ses fruits durant la crise de Covid-19. "Mais il n'a pas toujours été facile à expliquer ou bien compris", a rappelé le ministre de la santé.
La révision doit lever certaines incertitudes quant aux conditions qui déterminent une situation particulière et la transition entre les situations. Elle améliore l'implication des cantons et du Parlement.
La révision clarifie la notion de "risque spécifique pour la santé publique". Cette notion constitue une des conditions définissant la situation particulière. Un risque spécifique peut être une explosion de la fréquence ou de la gravité d'une maladie ou la surcharge du système de santé. Aucun seuil n'a été défini car chaque pandémie est différente.
En situation normale, les cantons sont responsables d'édicter des mesures de prévention. La Confédération n'a que peu de compétences, notamment en matière d'information et de recommandations.
La révision de la loi sur les épidémies veut étendre un peu les pouvoirs fédéraux. Le Conseil fédéral doit notamment pouvoir prendre des mesures dans les transports publics en cas de risque spécifique.
... à particulière
Lorsqu'un risque concret et spécifique pour la santé publique est avéré, les cantons et la Confédération doivent se préparer à une situation particulière. Le passage entre la situation normale et la situation particulière doit faire l'objet d'une décision formelle du Conseil fédéral. Cantons et commissions parlementaires devront être consultés.
Le Conseil fédéral devra fixer les objectifs et les principales mesures. Les cantons conservent leurs compétences. Il leur revient d'ordonner, pour leur territoire, des mesures si la Confédération ne l'a pas encore fait. Le Conseil fédéral peut toutefois édicter des mesures à l'échelle nationale, régionale et cantonale.
Aucune modification n'est prévue concernant la situation extraordinaire. Le Conseil fédéral pourra toujours édicter des mesures plus strictes en se reposant sur le droit de nécessité.
Mesures éprouvées
Plusieurs mesures prises dans le cadre de la pandémie de Covid-19 seront reprises dans la révision de la loi et précisées. Et Alain Berset d'énumérer les aides financières pour les entreprises, les campagnes de vaccination, ou encore les systèmes de surveillance.
Concernant les campagnes de vaccination, le chef de la santé publique a expliqué que les cantons seront responsables de la vaccination alors que la Confédération supportera les coûts du vaccin.
D'autres mesures comme le travail à domicile, le port du masque les certificats ou les concepts de protection seront encore précisées.
Renforcement de la surveillance des maladies
La nouvelle réglementation prévoit également le renforcement de la surveillance des maladies transmissibles. Le système national de déclaration, le monitorage des eaux usées et la réalisation de séquençage du génome seront améliorés.
La pandémie de Covid-19 a démontré l'importance de ces systèmes pour connaître l'évolution de la situation et mettre en place des mesures adéquates en temps voulu. Le renforcement prévu permettra de mieux détecter les nouvelles menaces.
Par ailleurs, les différents processus de déclaration, notamment des maladies infectieuses, doivent être harmonisés au niveau national. Au début de la pandémie de Covid-19, certains cabinets ou cantons envoyaient encore les documents par fax.
Résistances aux antibiotiques
La révision doit également permettre de faire face aux résistances aux antibiotiques et aux infections nosocomiales. Elles représentent une menace croissante à l'échelle mondiale. Les substances antimicrobiennes sont de moins en moins efficaces.
De nouvelles mesures de surveillance et de lutte sont introduites dans la loi. Les mesures recommandées par les stratégies nationales doivent devenir contraignantes. Le Conseil fédéral pourra ainsi obliger les hôpitaux et les établissements de soins à prendre certaines mesures ou à suivre certains processus opérationnels.
L'utilisation appropriée des antibiotiques doit être renforcée dans le secteur ambulatoire. Les médecins qui prescrivent des antibiotiques pourront être tenus de suivre une formation.
ats/cab
Nouvelle stratégie en matière de vaccins
Outre la révision de la loi sur les épidémies, le Conseil fédéral a adopté mercredi la stratégie en matière de vaccins 2035, en prévision de nouvelles pandémies. Cette stratégie vise à renforcer la position de la Suisse en tant que pôle de recherche et accroître la sécurité de l'approvisionnement.
Les Départements fédéraux de l’intérieur (DFI) ainsi que de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) doivent désormais mettre en oeuvre cette stratégie pour promouvoir à long terme la recherche, le développement et la production des vaccins, en collaboration avec des acteurs issus de la recherche et de l’industrie, détaille le gouvernement dans un communiqué.
La pandémie de Covid-19 a montré l'importance de la recherche sur les vaccins. L’accent doit notamment être mis sur les technologies de nouvelle génération, comme la technologie à ARNm.
Sécurité de l'approvisionnement
La pandémie a aussi mis en évidence l'importance de la stabilité des chaînes de production et d'approvisionnement à l'échelle internationale afin d'assurer la disponibilité des produits. La Confédération doit donc avoir la possibilité de conclure des contrats de réservation avec des entreprises pour de futurs vaccins pandémiques. Ces entreprises tiennent ainsi à disposition les capacités de production nécessaires et assurent l’approvisionnement en matières premières.
La Suisse n’est pas autosuffisante en matière de développement et de production de vaccins. Elle doit donc poursuivre son engagement au sein de l’Organisation mondiale de la santé ou d'autres alliances internationales, comme la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies.
Prise en charge des coûts de la vaccination jusqu'à mi-2024
La Confédération continuera à prendre en charge les vaccins contre le Covid-19 jusqu'à mi-2024. Le Conseil fédéral a décidé de prolonger cette disposition prévue jusqu'à la fin de cette année, afin de maintenir un accès facilité à la vaccination.
Les coûts sont pris en charge par l'assurance obligatoire des soins, la Confédération et les cantons. Dès mi-2024, le système centralisé étatique d’acquisition et de distribution fera place aux structures ordinaires du marché privé. Celui-ci sera en mesure de répondre à la demande, selon le Conseil fédéral.
Plus de piqûre à la pharmacie
Ce dernier a toutefois décidé de ne plus financer les coûts des vaccinations administrées dans les pharmacies dès 2024. Il estime que les cabinets de médecins de famille, les hôpitaux et les centres de vaccination constituent une offre suffisante.
Cette décision "absurde" va à l'encontre des intérêts de la population, s'est insurgée mercredi la Conférence latine des associations cantonales de pharmacies (CLPh).