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Ruth Dreifuss: pour diriger le DFI, il faut être "convaincu de la nécessité d'une politique sociale améliorée"

L'invitée de La Matinale (vidéo) - Ruth Dreifuss, ex-conseillère fédérale et première Présidente de la Confédération
L'invitée de La Matinale (vidéo) - Ruth Dreifuss, ex-conseillère fédérale et première Présidente de la Confédération / L'invité-e de La Matinale (en vidéo) / 12 min. / le 14 décembre 2023
Quel conseiller fédéral reprendra les rênes du Département fédéral de l'intérieur après le départ d'Alain Berset? Son remplaçant Beat Jans? Ou un autre? Dans tous les cas, cela doit être quelqu'un de convaincu du besoin de faire avancer la politique sociale, soutient Ruth Dreifuss, qui a dirigé pendant neuf ans ce département.

Ruth Dreifuss, conseillère fédérale de 1993 à 2002, a dirigé le Département fédéral de l'intérieur durant ses neuf années au sein de l'exécutif. La socialiste a notamment piloté le système d'assurance maladie encore en vigueur, accepté en votation populaire en 1994.

Avec le départ d'Alain Berset, le DFI a besoin d'un nouveau chef. Le socialiste bâlois Beat Jans, élu mercredi par l'Assemblée fédérale, en prendra-t-il la tête? Le gouvernement va-t-il procéder à un brassage des dicastères, avec une reprise éventuelle par la droite de ce département clé de la politique fédérale?

>> Lire : Beat Jans, un fils d'ouvrier devenu conseiller fédéral

Ruth Dreifuss dit s'être, elle, battue pour mettre la main dessus. A ses yeux, la personne qui occupera le poste doit être convaincue de la mission du DFI, qu'elle appelait "le Département de la vie quotidienne" lorsqu'elle le dirigeait.

Il est notamment chargé de la santé, des assurances sociales et de la culture. "Des points essentiels pour la population", souligne-t-elle jeudi dans La Matinale.

La "bataille" de la politique sociale

"Pouvoir s'occuper de la vie quotidienne des citoyennes et citoyens, il n'y a rien de plus beau et d'important à mes yeux", déclare l'ex-ministre. "L'histoire des assurances sociales a été marquée par l'influence du Parti socialiste. C'est lui qui, dès la grève de 1918, a demandé que, par exemple, l'assurance maternité soit introduite ou que l'AVS soit enfin mise en chantier", relève Ruth Dreifuss.

Chaque instrument de politique sociale a été "une bataille", dans laquelle le PS "a pris les devants", et le changement a pris du temps, ajoute-t-elle. Mais, à la fin, un consensus s'est établi avec le patronat et les partis bourgeois, note l'ancienne membre du collège gouvernemental.

Un collège où les décisions se prennent à sept. Il faut à chaque fois convaincre les autres conseillers fédéraux, rappelle Ruth Dreifuss. Pour les deux ministres socialistes, en minorité, la tâche n'est pas simple. Ce qui nécessite d'être solide sur ses dossiers et de mener un travail de conviction devant le Parlement et le public, précise l'octogénaire.

Un travail de conviction

"On a l'impression qu'un conseiller fédéral, c'est la septième roue d'un char qui ne roule pas toujours très droit", s'amuse Ruth Dreifuss. "Mais ce n'est pas ça. Être cheffe de département, c'est initier des projets, travailler avec des collaborateurs pour que le projet soit solide. C'est prendre l'initiative, mettre sur la table du Conseil fédéral ce dont il devra discuter et ce sur quoi il devra prendre des décisions", développe-t-elle.

Il faut parfois être tenace et ne rien lâcher. "J'ai souvent perdu en votations populaires. Mes collaboratrices et collaborateurs finissaient presque par s'amuser parce qu'ils savaient très bien ce que j'allais dire le dimanche soir. Je disais: 'Maintenant, au boulot! On y retourne!'", raconte la socialiste.

La prise d'initiative et la préparation du dossier au sein du département sont ainsi "absolument essentielles pour la réussite d'un projet".

"Dans ce sens, on a beau être minoritaire et devoir convaincre six autres personnes, on a un pouvoir", assure Ruth Dreifuss. Ainsi, d'après elle, la personne en charge du Département fédéral de l'intérieur doit être "convaincue de la nécessité d'une politique sociale améliorée dans ce pays".

Les tractations pour la répartition des départements fédéraux est en cours. Verdict vendredi.

>> Ecouter à ce sujet:

Propos recueillis: Pietro Bugnon

Adaptation web: Antoine Michel

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Un homme "d'expérience"

Le conseiller fédéral élu mercredi Beat Jans, 59 ans, "apporte beaucoup d'expérience", estime Ruth Dreifuss. "Il connaît bien le Parlement et la politique de son canton, dont il préside le Conseil d'Etat. La relation entre les cantons et la Confédération est très importante. C'est donc un plus", développe l'ancienne ministre.

Ruth Dreifuss décrit par ailleurs le Bâlois comme quelqu'un de "très agréable et plein d'humour".