La Suisse "a bien réussi" et a joué un rôle positif "selon ses priorités", a estimé mardi devant la presse à Berne le secrétaire d'Etat adjoint Thomas Gürber. Que ce soit sur la paix durable, la protection des civils, le climat ou l'efficience du Conseil.
Pour rappeler le droit international humanitaire (DIH), "nous avons fait vraiment une différence", dit l'ambassadrice de la Suisse à l'ONU à New York Pascale Baeriswyl. Alors que la situation à Gaza donne lieu à des tensions, la menace d'une coupe de la contribution suisse à l'Agence de l'ONU sur les réfugiés palestiniens (UNRWA) a secoué l'organisation.
Au Conseil, "c'est observé", admet Pascale Baeriswyl. Mais "je ne pourrais pas dire encore qu'il y a un effet" sur la marge de manoeuvre suisse tant qu'aucune décision n'a été prise, dit-elle. Et d'ajouter qu'il faudra en parler en cas de vote et de reproches.
Plus largement, la neutralité n'aura été en contradiction avec aucune des positions que la Suisse aura dû prendre, selon les deux responsables. Berne revendique des succès en ayant porté les négociations pour le renouvellement du mandat de la mission de paix en Bosnie-Herzégovine. Mais aussi en renforçant les droits humains dans la mission de police multinationale qui doit être déployée en Haïti. Ou encore en étendant la participation des femmes en Colombie.
"Frustration" sur la Syrie
En revanche, la Suisse aura aussi subi un échec avec un veto russe sur un projet de résolution pour le renouvellement du mécanisme d'assistance humanitaire en Syrie. "Nous n'avions pas le choix que d'essayer", à la demande des organisations humanitaires, fait remarquer l'ambassadrice qui laisse échapper malgré tout une "frustration".
Après le séisme, la Suisse aurait préféré ne pas avoir à porter une nouvelle résolution sur cette question. Malgré cette déconvenue, une solution a été trouvée puisque le régime syrien a prolongé l'ouverture de points de passage, probablement en échange de sa reconnexion avec la Ligue arabe. Berne promet de continuer à tenter de rassembler tous les acteurs dans les projets de résolution qu'elle devra défendre.
Tout au long de l'année, les crises n'auront pas manqué, renforçant la "polarisation" entre grandes puissances et la "prise de décision" au sein du Conseil, selon Thomas Gürber. Mais cette situation a aussi ouvert des portes supplémentaires pour un pays comme la Suisse avec son rôle d'intermédiaire, dit-il.
Le Proche-Orient a été au centre de l'attention ces dernières semaines. Chaque semaine, une réunion d'urgence a eu lieu et plusieurs projets de résolution n'ont pas abouti. "La Suisse s'est engagée de manière active", notamment sur le DIH, insiste Pascale Baeriswyl.
Situation "encore plus instable"
Sur l'Ukraine, le conseiller fédéral Ignazio Cassis aura tenté en mai dernier d'arracher des avancées sur la sécurité nucléaire de la centrale de Zaporijjia sur cinq principes de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Si la situation reste préoccupante, aucun incident important n'a été observé ces derniers mois sur le site désormais contrôlé par l'armée russe. L'AIEA estime que ces principes "ont été renforcés", a dit Pascale Baeriswyl.
Ces derniers mois, "le monde est devenu encore plus instable", affirme également Thomas Gürber. Soudan, Haut-Karabakh, Niger font partie des nombreuses situations chaudes sur lesquelles les quinze membres du Conseil de sécurité ont dû se pencher.
Pour l'année prochaine, la Suisse va continuer à mettre l'accent sur les thématiques de son mandat. Les 75 ans des Conventions de Genève lui donneront la possibilité d'insister sur le DIH. Et la Suisse veut aussi mettre en avant davantage encore la Genève internationale, la diplomatie scientifique et la question "Femmes, paix et sécurité".
Après mai dernier, Berne pilotera à nouveau l'organe le plus puissant du système onusien en octobre. Viola Amherd devrait alors faire le déplacement à l'ONU comme présidente.
ats/jfe
Micheline Calmy-Rey: "La Suisse pourrait en faire plus"
L'ancienne conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey était à l'origine de la candidature suisse au Conseil de sécurité de l'ONU "pour permettre à la Suisse d'amplifier sa politique étrangère" et "de participer à une institution très importante des Nations unies", rappelle-t-elle mardi dans le 19h30.
"Il faut dire, malheureusement, que la Suisse arrive au Conseil de sécurité dans une période où le multilatéralisme est à la peine", regrette la Genevoise, qui aurait aussi voulu que le pays en fasse plus en matière de droit international humanitaire.
"La Suisse fait ce qu'elle sait faire, mais je trouve qu'en matière de DIH, elle pourrait en faire plus. Elle joue un peu de prudence, elle fait, mais un petit peu. Or, l'application du droit international humanitaire, ce n'est pas une petite phrase dans un communiqué de presse, mais c'est vraiment s'engager pour ça", analyse l'ancienne présidente de la Confédération.