Ecoutes téléphoniques, surveillance du courrier, intrusion dans des ordinateurs via des chevaux de Troie... Aujourd'hui, le Service de renseignement de la Confédération (SRC) ne peut le faire que face à des menaces bien précises, comme le terrorisme, la prolifération nucléaire ou la menace contre des infrastructures critiques.
Toutefois, le conseiller national centriste bernois Reto Nause voudrait étendre la possibilité de recourir à ces moyens de surveillance à toute forme d'extrémisme violent, dont le hooliganisme, comme l'ont rapporté la semaine dernière les journaux de CH Media. Selon l'élu bernois, les services secrets devraient ainsi pouvoir, à titre préventif, surveiller plus activement les ultras du football.
Pas nouveau
De tels projets ont déjà été écartés au Parlement plusieurs fois. La dernière fois, c'était en 2019. Mais pour Reto Nause, qui est aussi en charge de la sécurité au sein du gouvernement de la ville de Berne, plusieurs événements récents montrent qu'il faut à nouveau se poser la question.
Il fait référence notamment à une bagarre entre des supporters de l'AS Roma et de l'Etoile rouge de Belgrade en novembre dernier. Les Romains se sont déplacés jusqu'à Berne pour en découdre avec les Serbes, qui eux venaient pour un match contre l'équipe bernoise des Young Boys. Résultats des courses, deux personnes ont été sérieusement blessées. La police bernoise a pu réagir grâce aux informations des services italiens.
Reto Nause estime qu'il faut se donner les moyens d'éviter ce genre d'épisode et, de manière plus générale, lutter contre un extrémisme violent en pleine expansion.
D'autres exemples, pas seulement sportifs
Pour soutenir sa proposition, Reto Nause a aussi un autre exemple, pas lié au monde du sport. Il revient sur ces rixes entre partisans et opposants au régime érythréen qui ont eu lieu à Zurich et St-Gall au mois de septembre.
>> Relire : Plusieurs personnes blessées lors d'une manifestation érythréenne à Zurich
Et sa proposition résonne aussi avec d'autres actualités. Par exemple, la mésaventure de cette patrouille de police, menacée par une foule d'extrême gauche, à Bâle, durant la nuit de Nouvel An. Une enquête publiée par la NZZ am Sonntag dimanche montre d'ailleurs que les extrémistes de gauche, en Suisse, sont de plus en plus solidaires avec des groupes allemands violents.
Ces événements relanceront peut-être le débat au Parlement fédéral. Dans tous les cas, Reto Nause déposera une proposition auprès de la commission de politique de sécurité le 22 janvier prochain.
"Personne ne rêve de vivre dans un Etat policier"
En charge par le passé de la sécurité dans le canton de Genève, le conseiller aux Etats genevois Mauro Poggia a été fréquemment confronté à la question du hooliganisme. Interrogé sur la question, il admet que les violences aux abords des stades de foot sont inacceptables. Mais il confie trouver la proposition de Reto Nause peut-être un peu trop extrême.
"Personne ne rêve de vivre dans un Etat policier où, sous le motif de la prévention, tout le monde peut être écouté", souligne-t-il. Selon lui, il y a peut-être des "propositions plus soft qui pourraient être mises en place dans un premier temps", comme des billets nominatifs. "Paradoxalement, certains cantons comme Zurich s'y opposent toujours", déplore-t-il. "Alors que ça serait une première mesure à laquelle l'ensemble des cantons romands est favorable."
Marielle Savoy/fgn