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L'Eglise réformée suisse "choquée" par les révélations d'abus dans l'Eglise protestante allemande

Des milliers de cas d'abus sexuels dévoilés au sein de l'Eglise protestante allemande: interview de Pierre-Philippe Blaser
Des milliers de cas d'abus sexuels dévoilés au sein de l'Eglise protestante allemande: interview de Pierre-Philippe Blaser / La Matinale / 5 min. / le 26 janvier 2024
Divulgué hier, un rapport dévoile un pan sombre de l'Eglise protestante allemande. Il démontre que près de 10'000 mineurs pourraient y avoir été victimes de violences sexuelles. Invité de La Matinale vendredi, Pierre-Philippe Blaser, vice-président du Conseil de l'Eglise évangélique réformée de Suisse s'est dit choqué. Il précise qu'une étude similaire sera réalisée en Suisse.

Après les nombreux scandales dans l'Eglise catholique, c'est au tour du monde protestant d'être touché par des affaires d'abus sexuels. Composée de plus de 800 pages, cette recherche avait été commandée auprès de plusieurs universités par l'Eglise protestante allemande elle-même.

Invité vendredi pour réagir aux premières conclusions de cette enquête, qui pourrait n'être que la pointe de l'iceberg, Pierre-Philippe Blaser n'a pas caché son désarroi. "Mes collègues de l'Eglise réformée de Suisse et des différents cantons et moi-même sommes choqués et bouleversés par ces chiffres et ces informations (...) et aussi par le fait que les victimes n'ont pas été entendues de manière suffisante, régulière et précise. On pense bien sûr à toutes ces personnes qui ont peut-être des séquelles à vie", déclare-t-il.

Des analyses "un peu superficielles"

Questionné pour savoir si la société avait peut-être eu tort de penser que l'Eglise catholique était davantage touchée, notamment à cause du célibat des prêtres ou encore d'une structure plus centralisée et rigide, Pierre-Philippe Blaser juge qu'on s'est sans doute fourvoyé.

"Les analyses qu'on fait (entre les deux Eglises, ndlr) sont souvent un peu superficielles. Ce qu'on voit surtout dans cette étude, c'est qu'il y a un problème de vigilance et aussi d'uniformité des mesures. C'est donc sans doute là qu'il y a des problèmes. Il y a effectivement des différences entre les structures et il faut les identifier, mais ça n'explique pas tout", estime-t-il.

Une étude prévue en Suisse

En Suisse, ce rapport sur l'Eglise protestante allemande était très attendu car l'Eglise réformée de Suisse compte aussi lancer une recherche. "Nous allons commander une étude précise qui remonte sur les années passées et qui soit fiable, académique et menée par des personnes indépendantes. Elle intégrera également les personnes qui ont été victimes", détaille Pierre-Philippe Blaser.

Et de rappeler que des mesures ont déjà été mises en place depuis cinq ans. "On travaille d'arrache-pied à mettre dans les églises réformées de Suisse des plans de protection et de signalement. Mais là, nous avons vraiment besoin d'une étude, et c'est aussi pour cela que nous avons regardé avec attention la conférence de presse d'hier sur les résultats de l'étude allemande."

Pierre-Philippe Blaser admet toutefois que l'étude aurait pu être lancée plus tôt mais explique ce retard par la complexité de la structure fédérale. "Les Eglises réformées sont organisées par canton. C'est très décentralisé, pour se mettre d'accord, ça prend du temps. Ajoutons à cela que les archives sont dans les paroisses. Il y a donc environ 8000 paroisses qu'il faudrait analyser", détaille-t-il.

D'après lui, les résultats d'une étude approfondie concernant l'Eglise protestante suisse pourrait être publiés d'ici 2026 ou 2027.

Propos recueillis par Valérie Hauert

Adapation web: Tristan Hertig

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