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Suisse: l'argent des tyrans n'est plus en sécurité

L'argent caché en Suisse des dictateurs ne devrait plus pouvoir profiter à leurs héritiers.
L'argent caché en Suisse des dictateurs ne devrait plus pouvoir profiter à leurs héritiers.
Le Parlement peut désormais se prononcer sur le projet visant à éviter que les fonds détournés par des dictateurs ne retombent en mains criminelles après avoir été bloqués en Suisse. Le Conseil fédéral lui a soumis mercredi son message.

Une nouvelle étape est franchie, a souligné la ministre des
affaires étrangères Micheline Calmy-Rey devant la presse, tout en
appelant les Chambres à empoigner le dossier dès la session de
juin. "Des cas comme Mobutu ou Duvalier ne devrait plus se
produire".

Il y a urgence

La nécessité de légiférer a été constatée à la suite d'affaires
dans lesquelles les Etats requérants n'étaient pas en mesure de
mener des procédures pénales nationales, en raison de la
défaillance de leur système judiciaire.



Dans ces cas, la Suisse peut se voir forcée à rendre les avoirs
illicites des potentats à leurs proches. Les fonds de l'ancien
président zaïrois Mobutu ont ainsi été remis à ses héritiers en
2009 au lieu de revenir à la population.



Les premiers à bénéficier de la nouvelle législation devraient
être les Haïtiens. Grâce à une clause de rétroactivité, le cas
Duvalier, dont 7 millions se trouvent sur des comptes en Suisse,
devrait être résolu (lire ci-contre).



Le 12 janvier, la veille du séisme, le Tribunal fédéral a estimé
que cet argent ne pouvait pas être remis à Port-au-Prince à cause
d'une prescription. Réagissant à cette décision, le Conseil fédéral
a de nouveau bloqué les avoirs de l'ancien dictateur.

Soutenir les programmes d'intérêt public

La nouvelle loi sur la restitution des avoirs d'origine illicite
prévoit trois étapes. Dans un premier temps, le Conseil fédéral
pourra bloquer l'argent litigieux lorsque l'entraide judiciaire ne
peut pas aboutir. Le gouvernement disposera ainsi d'une base légale
qui lui permettra d'éviter de recourir à l'article d'exception
prévu dans la constitution.



Deuxième étape, la confiscation des avoirs serait prononcée par le
Tribunal administratif fédéral. Il y aura présomption d'illicéité
quand l'enrichissement est exorbitant ou que la corruption est
notoire.



Enfin, le projet prévoit différents mécanismes pour une
restitution rapide de l'argent et éviter qu'il tombe entre les
mauvaises mains. Le but d'une telle restitution est d'améliorer les
conditions de vie dans l'Etat d'origine, où des programmes
d'intérêts publics seront financés.



ats/jeh

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Des précédents ambarassants

La ministre a tenu à rappeler que cette nouvelle loi ne concernait que les cas où la justice du pays requérant est défaillante.

Elle peut potentiellement servir à d'autres Etats que Haïti, mais aucun cas n'est connu pour l'instant.

La Suisse a connu plusieurs affaires liées à des fonds de dictateurs.

Dans plusieurs cas, elle a pu rendre l'argent aux Etats spoliés sur la base du droit actuel.

Au cours des quinze dernières années, elle a restitué plus de 1,7 milliard de francs notamment dans les affaires Sani Abacha, Ferdinand Marcos ou Vladimiro Montesinos, a rappelé Micheline Calmy-Rey

Vérifier le bon usage des fonds

La restitution des fonds détourner par les potentats pourra passer via des organisations internationales ou des ONG.

Un système de contrôle devrait assurer que l'argent arrive bel et bien à destination.

Le projet a été bien accueilli en consultation, sauf par l'UDC.

Les milieux humanitaires et la gauche ont regretté qu'elle ne soit pas plus stricte.

Mais aucun autre pays du monde ne possède un instrument qui aille déjà aussi loin, a tenu a souligné la conseillère fédérale.