QUESTIONS INSTITUTIONELLES
Les règles institutionnelles, valables pour tous les participants au marché intérieur de l'UE, garantissent que les accords relatifs au marché intérieur soient régulièrement mis à jour et fonctionnent. Désormais, les éléments institutionnels seront intégrés, secteur par secteur, dans les différents accords Suisse-UE relatifs au marché intérieur.
La Suisse décide de manière autonome de chaque développement du droit de l’UE. Le référendum continuera de pouvoir être saisi. En cas de non reprise, l’UE peut prendre des mesures de compensation proportionnées dans l’accord concerné ou un autre accord relatif au marché intérieur. Des exceptions à l’obligation de reprise dynamique sont définies.
La question du règlement des différends continuera d’être traitée en premier lieu au sein du comité mixte. En cas de désaccord, le différend sera soumis à un tribunal arbitral paritaire. Si le différend soulève une question concernant l’interprétation du droit de l’UE, c'est la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qui statuera sur l’interprétation de ce droit.
AIDES D'ETAT
L’UE contrôle les aides d’Etat octroyées par ses membres. Elles sont interdites sauf dispositions dérogatoires. Pour la Suisse, la Confédération, les cantons et les communes devront notifier toute nouvelle aide d’Etat à l’autorité de surveillance dès lors que cette aide excède un certain seuil et qu’elle ne fait pas l’objet d’une exception. L’autorité de surveillance émettra un avis non contraignant. Si cet avis n’est pas respecté, l’autorité de surveillance portera l’affaire devant un tribunal suisse.
L’obligation de surveiller les aides d’Etat sera limitée aux accords sur les transports terrestres, l’électricité et le transport aérien. L'accord prévoit des exceptions pour le service public. Par exemple, les transports publics qui opèrent exclusivement sur le territoire suisse n’entrent pas dans le champ d’application des aides d'Etat pour les transports terrestres. Dans l’accord sur l’électricité, les règles en matière d’aides d’Etat prévoient des modalités spécifiques. La préservation des principales aides d’Etat existantes dans ce domaine est assurée. La Suisse aura un délai transitoire de cinq ans pour mettre en place le régime de surveillance.
IMMIGRATION
La directive sur la libre circulation des citoyens de l’EU est reprise dans une version "sur mesure" pour la Suisse. Elle est liée à un dispositif de protection comprenant exceptions - notamment en matière d'expulsion des criminels étrangers - et assurances. Une clause de sauvegarde concrétisée complète ce dispositif, qui peut être invoquée en cas de graves problèmes économiques ou sociaux.
Une durée minimale de cinq ans s’applique désormais à tous les ressortissants de l’UE avant de pouvoir envisager l’octroi d’une autorisation d’établissement. Les frontaliers continuent de recevoir une autorisation de séjour spécifique. Les travailleurs indépendants devront aussi s'annoncer.
Par ailleurs, la Suisse s’engage à traiter les étudiants de l’UE sur un pied d’égalité avec les étudiants suisses concernant les taxes d’études dans les hautes écoles.
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PROTECTION SALARIALE
La Suisse reprend les directives européennes sur le détachement de travailleurs. Les entreprises devront verser à leurs travailleurs détachés un salaire équivalent à celui appliqué en Suisse. Le contrôle continue d'être réalisé par les commissions paritaires (syndicats et employeurs) et les cantons. Le délai de préavis pour les entreprises étrangères est réduit de 8 à 4 jours pour les secteurs à risque. Pour les autres secteurs, il y a une obligation d'annonce avant le début du travail. Une garantie financière devra être versée le cas échéant.
En vertu de la clause de non-régression, la Suisse ne devra pas reprendre des développements de la législation européenne sur les travailleurs détachés affaiblissant le niveau de protection suisse concernant les conditions de salaire et de travail. Cette clause garantit le niveau de protection salariale suisse. Concernant l'indemnisation des frais, la Suisse pourra exploiter "la marge de manoeuvre qu'offre la directive de l'UE pour réduire autant que possible le risque de distorsion de la concurrence".
TRANSPORTS TERRESTRES
La Suisse a réussi à obtenir quelques points supplémentaires au cours des négociations. Elle est notamment parvenue à sécuriser juridiquement les instruments suisses de planification et de garantie des sillons l'autorisation par rapport à l'UE. Un sillon est un droit d’utilisation du réseau ferroviaire pour un train donné sur une ligne à un horaire précis.
La Suisse a aussi obtenu de pouvoir continuer à adjuger directement les offres commandées en transport ferroviaire transfrontalier sur sol suisse, sans devoir procéder à des appels d’offres publics.
La Suisse reprend pour sa part les règles de l’UE en matière d'assistance concernant les transports terrestres transfrontaliers. Le service public est exempté.
La Suisse est prête à une ouverture contrôlée du transport ferroviaire international de voyageurs. Les entreprises étrangères pourront proposer, de manière indépendante, des liaisons ferroviaires transfrontalières vers la Suisse, à condition d’obtenir un sillon. La réciproque est valable pour la Suisse. Les entreprises étrangères doivent respecter les conditions de travail et salaires suisses pour les activités menées dans le pays.
La priorité de l'horaire cadencé des transports publics en Suisse a également pu être maintenue. Les entreprises ferroviaires étrangères ne peuvent proposer des liaisons internationales à destination de la Suisse que si des sillons sont disponibles en dehors de ceux réservés au trafic cadencé national des trains de voyageurs et au transport de marchandises sur la partie du trajet en Suisse. En contrepartie, les Etats de l'UE pourront donner la priorité à leurs entreprises sur leurs réseaux.
Lors de l'établissement de l'horaire, le transport international de voyageurs sera prioritaire lors de l’attribution des capacités résiduelles des sillons en Suisse. L’attribution des sillons reste en mains suisses. Les entreprises étrangères pourront être tenues à l'intégration tarifaire. Si des entreprises étrangères transportent des passagers d’un lieu à un autre en Suisse, elles doivent respecter le système tarifaire du pays.
Dans le transport routier transfrontalier, plusieurs exceptions sont protégées, comme l'interdiction des poids lourds de plus de 40 tonnes, de même que l'interdiction de circuler la nuit et le dimanche pour les camions. L'initiative des Alpes est soutenue. Enfin, l'UE accepte la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP), avec des taux de redevance maximaux définis.
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ACCORD DE RECONNAISSANCE MUTUELLE
Les produits d'un pays vendus dans un autre doivent être conformes à la législation du second. Mais l'existence de cadres réglementaires différents complexifie les choses, raison pour laquelle un accord existe pour simplifier l'affaire: l'accord de reconnaissance mutuelle en matière d’évaluation de la conformité (ARM). Il garantit qu’un produit commercialisé en Suisse peut être vendu dans l’UE sans procédure administrative supplémentaire et inversement.
Les éléments institutionnels seront désormais directement inclus dans l'ARM, ce qui garantira à l'avenir une actualisation régulière de l'accord, important pour l'exportation. La Suisse pourra participer à la surveillance du marché de l’UE, sur les mesures garantissant la sécurité et la qualité des produits. Les exceptions sur les préemballages sont maintenues. La Suisse et la Commission européenne discuteront de la mise en oeuvre de l'ARM en tenant compte des besoins des acteurs économiques.
TRANSPORT AERIEN
La Suisse a réussi à obtenir l'échange des droits de cabotage, qui offre aux compagnies aériennes suisses le droit de proposer des vols intérieurs dans n’importe quel pays de l'UE. La réciproque est valable pour les transporteurs européens.
La Confédération a aussi obtenu la participation des acteurs suisses à SESAR 3 (Single European Sky ATM Research) dans le cadre de l'association de la Suisse à Horizon Europe. Ce programme de recherche vise la modernisation du service de la navigation aérienne en Europe ainsi que la promotion et l’adoption par le marché de nouvelles technologies de pointe.
AGRICULTURE
Concernant les produits agricoles, 50% des exportations de la Suisse sont destinées à l’UE et 74% des importations en proviennent. Les exceptions existantes prévues par l’accord agricole actuel (par exemple l’interdiction du transit du bétail) sont maintenues. De nouvelles exceptions ont pu être négociées, notamment dans les domaines de la protection des animaux et des organismes génétiquement modifiés. L’obligation d’indiquer le pays d’origine pour les denrées alimentaires distribuées en Suisse est maintenue.
La Suisse et l’UE restent libres de mener leurs politiques agricoles comme elles l’entendent. La protection douanière actuelle (y compris les droits de douane et les contingents tarifaires) est maintenue. La Suisse disposera de l’accès souhaité à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et intégrera le système d’autorisation des produits phytosanitaires de l’UE.
ELECTRICITE
L'accord sur l’électricité permet aux acteurs suisses - à l'instar de Swissgrid - de participer sur un pied d’égalité et sans entrave au marché intérieur européen de l’électricité, aux plateformes de négoce et autres instances européennes dans ce secteur. En outre, tous les consommateurs finaux suisses auront la possibilité de choisir librement leur fournisseur d’électricité.
Concernant la sécurité d’approvisionnement, les Etats voisins ne pourront pas limiter les capacités frontalières vis-à-vis de la Suisse, même en cas de crise énergétique. L’accord établit la coopération mutuelle dans le domaine des énergies renouvelables, sans engager la Suisse à reprendre le droit environnemental de l’UE.
SANTE
L'accord négocié garantit un plein accès aux mécanismes de sécurité sanitaire de l’UE et au Centre européen de prévention et de contrôle des maladies. Il renforce les instruments pour assurer une meilleure protection de la population suisse via une capacité accrue d’alerte précoce et de réaction dans le domaine de la surveillance épidémiologique.
L'accord se concentre sur la sécurité sanitaire. La possibilité d'une extension à d’autres domaines de la santé est toutefois prévue, pour autant que ce soit dans l’intérêt des deux parties. Dans le cadre du programme pluriannuel de l’UE, la Suisse ne participera qu'au domaine "préparation aux crises".
PROGRAMMES DE l'UE DANS LA FORMATION ET LA RECHERCHE
Un nouvel accord associe la Suisse aux programmes de l’UE en faveur de la formation, de la recherche et de l’innovation. Il couvre la participation à Horizon Europe, Euratom, à l’infrastructure de recherche ITER et au programme Digital Europe, à Erasmus+ et à EU4Health.
Une future participation à d’autres programmes de l’UE est aussi ouverte, par exemple dans les domaines de la culture et des opérations spatiales.
FONDS DE COHESION
L’accord crée un mécanisme juridiquement contraignant pour les contributions régulières de la Suisse. Celles-ci portent sur sept ans: le montant de la première contribution pour 2030-2036 est de 350 millions de francs par année. Les détails de chacune seront réglés par des mémorandums d'entente.
Les futures contributions régulières en faveur de certains États membres de l’UE exigent la création d’une nouvelle base légale en Suisse, qui fera l'objet d'un projet de loi. Pour la période entre fin 2024 et l’entrée en vigueur du paquet, Berne fournira un financement supplémentaire, exigible en même temps que la première contribution.
ats/vkiss/ami