Anna Fontcuberta i Morral, qui a été nommée par le Conseil fédéral, prendra la présidence de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne en remplacement de Martin Vetterli à partir du 1er janvier 2025.
Face aux défis qui l'attendent, la nouvelle dirigeante ne sait pas encore sur lequel elle se penchera en premier. "Je vous en reparlerai à l'automne", lance-t-elle. En tout cas, elle prévoit de garder une "petite activité de recherche" dans son laboratoire en parallèle de son nouveau poste. "Pour moi, c'est important d'avoir les pieds sur terre", justifie-t-elle.
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"L'EPFL doit assurer l'excellence dans les domaines dans lesquels elle l'est aujourd'hui et dans ceux qui seront porteurs dans les années à venir pour pouvoir soutenir l'économie de la Suisse", assure-t-elle au micro de la RTS.
La ressortissante hispano-suisse indique qu'il faut "dimensionner la taille de l'EPFL" pour atteindre cet objectif, tout en s'assurant de "la qualité de l'éducation".
Nous n'avons pas l'infrastructure pour assurer la croissance (du nombre d'étudiants, ndlr), donc nous la freinons temporairement
Moins d'étudiants étrangers, autant de suisses
"Cette croissance (du nombre d'étudiants, ndlr) étant beaucoup plus rapide qu'on l'attendait, nous n'avons pas l'infrastructure aujourd'hui pour l'assurer. C'est pour cela qu'on la freine temporairement", justifie Anna Fontcuberta i Morral. "Une fois qu'on aura toutes les infrastructures, l'idée est qu'on puisse lever ce frein."
Parmi les mesures envisagées, la nouvelle présidente de l'EPFL évoque les recrutements des étudiants "sur dossier". Cela freinera donc l'arrivée des étrangers. "Malheureusement, on doit faire comme cela", regrette-t-elle.
Dans le détail, les étudiants évalués sur dossier ne passeront pas d'examen, précise Anna Fontcuberta i Morral. Ils seront évalués sur les notes obtenues lors des examens "équivalents de la maturité".
En revanche, Anna Fontcuberta i Morral ne touche pas au recrutement des étudiants et étudiantes suisses directement après leur maturité. "Ça, ça reste", promet-elle.
A noter que l'EPFL forme actuellement 14'000 étudiants, toutes filières confondues. "Tout le monde se connaît, on peut traverser le campus en moins de dix minutes", illustre celle qui qualifie l'établissement d'école "à taille humaine".
Maintenir la qualité, malgré les coupes dans le budget
Dans un contexte de réduction des budgets des Ecoles polytechniques fédérales (EPF), Anna Fontcuberta i Morral n'a pas de rancoeur envers le Conseil fédéral. Elle fera tout pour que la qualité de l'établissement lausannois ne soit pas impactée, même si le gouvernement a annoncé en janvier une coupe de 100 millions de francs par an à partir de 2025.
"Je pense que le Conseil fédéral est très solidaire avec nous (...) Les finances sont ce qu'elles sont (...) donc on est obligés de faire comme ça." On va être créatifs pour continuer à ce que l'EPFL soit excellente, ajoute-t-elle.
"Je ne peux pas vous dire aujourd'hui ce qu'on va faire. En tout cas, c'est le bien-être de l'EPFL qui va rester en vue", promet-elle.
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Pour rappel, son prédécesseur Martin Vetterli s'était montré plus offensif face à ces annonces de coupes budgétaires: "On commence vraiment à tirer sur la corde", avait-il lancé dans l'émission Forum le 29 janvier. "Chacun son style", se défend Anna Fontcuberta i Morral.
Réintégrer le programme européen
L'exclusion de la Suisse du programme de recherche européen Horizon est un autre défi pour la nouvelle présidente de l'EPFL. "Il faut absolument qu'on puisse intégrer le programme européen. C'est très important pour les chercheurs", explique-t-elle. "La science, c'est un réseau (...) Quand on est exclu des projets, on ne fait plus partie du club, ce qui a des conséquences importantes."
Anna Fontcuberta i Morral indique encore que "rester à l'écart des développements nuit à nos chercheurs et à nos start-ups". Donc c'est une "excellente nouvelle qu'on recommence les négociations" avec l'Union européenne, se félicite-t-elle.
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Propos recueillis par Pietro Bugnon
Adaptation web: Julie Marty
La première femme à la tête de l'EPFL
Anna Fontcuberta i Morral est la première femme à la tête d'une EPF, signe que les établissements sont en route vers la parité hommes-femmes. L'EPFL est actuellement composée à deux tiers d'hommes et un tiers de femmes, alors que huit professeurs sur dix sont des hommes.
"C'est une bonne nouvelle", se réjouit la nouvelle présidente qui pense avoir été sélectionnée pour ses qualités et son "bon programme".
"Les choses se sont beaucoup améliorées, surtout à l'EPFL", observe-t-elle. "Il y a 20 ans, on pouvait compter sur les doigts de la main le nombre de professeures femmes à l'EPFL. Ça a évolué."