Des milliers de Suissesses et de Suisses s’aventurent chaque année dans des projets de coopération renforçant une vieille tradition helvétique. D’après la Confédération, cette culture d’entraide ferait même "partie de notre identité, au même titre que la neutralité et l'indépendance".
Plus de 40% de la population âgée de plus de 15 ans a ainsi déjà fait du travail bénévole en Suisse ou à l’étranger, selon l'Office fédéral de la statistique (données de 2020), contre 32% dix ans plus tôt. Un joli bilan pour le monde de la coopération encore porté par de beaux projets, mais qui doit aussi faire face à de nouveaux défis.
S'ouvrir à une autre culture
Renforcer l’entraide locale, s’immerger dans une culture inconnue ou apprendre une langue étrangère en quelques mois sont autant de beaux défis que se lancent des milliers de volontaires suisses chaque année.
C’est le cas de Manon et Jérémie: originaires de Bulle, ils se sont engagés dans une mission de volontariat en Haïti de juin 2023 à juillet 2024, en passant par l’association Eirene Suisse. "On avait envie de faire une expérience à l’étranger et de s’ouvrir à d'autres cultures", raconte Jérémie.
Partir comme volontaire, c’était naturel pour nous, on voulait se confronter à d’autres manières de fonctionner
Depuis plus de 60 ans, Eirene Suisse est spécialisée dans la coopération par l’échange de personnes, c’est-à-dire l’envoi de volontaires qualifiés pour soutenir le développement de ces structures locales.
Cette organisation les a mis en contact avec l’un de leurs partenaires - Adema, une ONG locale haïtienne - qui manquait de bras dans son programme d'amélioration de l’accès à l’éducation. "Partir comme volontaire, c’était naturel pour nous, explique Manon, on voulait se confronter à d’autres manières de fonctionner."
La coopération et l’entraide, une tradition suisse
On compte plus de 3 millions de Suissesses et Suisses âgés de plus de 15 ans qui ont déjà fait une mission de bénévolat ou de volontariat, c’est-à-dire une activité non rémunérée ou qui fait l’objet d'un défraiement.
Dans le monde de la coopération, il y a aussi des humanitaires: ces professionnels mandatés et rémunérés par une organisation pour exercer leur métier dans le cadre d’une mission. Chaque année, la Suisse envoie environ 5000 professionnels dans le monde.
Cette tradition de l’entraide est liée en partie à la création de la Croix-Rouge en 1863, sous l’impulsion de l’humaniste genevois Henry Dunant. Aujourd’hui, la Croix-Rouge est un mastodonte de l’humanitaire qui encadre près de 50'000 bénévoles dans le monde.
Le volontariat et le volontourisme
Pour trouver une mission de volontaires qui leur correspondait, Manon et Jérémie ont cherché un projet sur demande locale auprès d’Eirene Suisse. Une façon aussi d’éviter ce qu’on appelle le volontourisme, qui consiste à s’engager dans une mission de volontariat pendant un séjour touristique.
Mais certaines missions de volontariat payantes inquiètent les ONG. Une enquête de Temps Présent a démontré les dérives d’une agence britannique qui propose ce genre de missions jugées peu utiles, voire dangereuses.
Avant de partir, un bénévole ou un volontaire peut vérifier plusieurs éléments, comme l’appartenance de son organisation à la DDC. Unité, l'association suisse pour l'échange de personnes dans la coopération au développement, veille également à la qualité des programmes engagés par ses partenaires.
Réduction des budgets et difficultés de trouver des bénévoles
Les métiers et missions de coopération continuent de séduire la population suisse, même si le secteur fait face à de nouveaux défis, à commencer par le budget. C’est notamment le cas pour le secteur humanitaire: dans les prochaines semaines, le Parlement devra statuer sur la baisse de l'aide qu'apporte la Suisse aux pays les plus pauvres, dans le cadre d'un programme d'économies budgétaires. Deux milliards de francs pourraient ainsi être coupés dans la coopération internationale.
Quant au bénévolat et au volontariat, certaines associations rapportent des difficultés pour trouver des bénévoles disponibles, notamment dans le secteur de l'aide alimentaire. En parallèle, certains domaines ont au contraire le vent en poupe, comme l’engagement pour l’environnement et la biodiversité. Les festivals et autres évènements artistiques peuvent eux aussi compter sur une jeunesse engagée.
Florise Vaubien