"Elle ne le voyait pas comme un moment dramatique": la douleur des proches lors du recours à Exit
En 2023, Exit a accompagné vers la mort 1756 personnes, soit 129 de plus qu'en 2022. Cela représente 504 suicides assistés en Suisse romande (+2) et 1252 pour la Suisse alémanique et le Tessin (+127). A titre de comparaison, Exit Suisse romande avait procédé à 155 suicides assistés en 2013, soit plus de trois fois moins.
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Dans le même temps, le nombre d'adhésions à Exit croît chaque année fortement, soit plus de 20'000 l'année dernière pour l'ensemble du pays pour un total avoisinant les 200'000 membres à l'heure actuelle.
Exit explique l'augmentation de ces chiffres notamment par le vieillissement de la population. Et sur les 1252 personnes accompagnées dans la mort par Exit Suisse alémanique en 2023, 31% souffraient d'un cancer en phase terminale et 27% de troubles ou maladies multiples.
Pas forcément des malades en phase terminale
Nombre de malades qui choisissent d'avoir recours à Exit n'étaient ainsi pas forcément en phase terminale. "Ce sont essentiellement l'incapacité à supporter une qualité de vie dégradée ou la peur de devoir faire face à une dégradation insoutenable qui pousse les membres d'Exit à demander l’accompagnement au suicide", précise l'organisation dans l'un de ses rapports.
Il faut dire que depuis dix ans, les critères d’admission ont évolué. Le temps où seuls les malades incurables avaient droit à une assistance au suicide est révolu. Aujourd’hui, les associations comme Exit prennent aussi en compte les souffrances que la personne juge intolérables et les polypathologies invalidantes dues à l’âge. Et à l’avenir, ces critères sont encore appelés à évoluer.
Un choix parfois déchirant pour les proches
Ainsi, si pour les personnes qui s'orientent vers l'assistance au suicide, la décision est généralement prise de manière personnelle et au terme d'une longue réflexion, ce choix peut être douloureux pour leurs proches. Certains apprennent d'ailleurs au dernier moment la mort programmée d'une maman, d'un papa ou d'un conjoint.
Interrogés jeudi dans Temps Présent, David et Xavier Humair, dont la maman s’est suicidée avec l'aide d'Exit à l’âge de 71 ans, ont vécu chacun à leur manière cet ultime compte à rebours. Le premier confie: "Deux jours avant, on mangeait ensemble et tout s'est très bien passé. Et comme c'était la saison des carrousels à La Chaux-de-Fonds, elle a demandé encore à aller faire un tour en carrousel. C'était totalement hallucinant par rapport au fait qu'elle allait mourir quelques jours après. C'est quelque chose qu'on ne peut pas imaginer".
C’est un peu paradoxal mais je ne l'ai presque jamais vue autant en forme que depuis qu'elle a annoncé qu'elle allait décéder
Xavier Humair relate aussi son expérience: "Elle ne le voyait pas du tout comme un moment dramatique, plutôt comme un départ, un peu comme un départ en vacances. L'image est un peu particulière. C'est aussi un peu paradoxal mais je ne l'ai presque jamais vue autant en forme que depuis qu'elle a annoncé qu'elle allait décéder".
Sujet TV: Marie Abbet
Adaptation web: Frédéric Boillat
L'ancien vice-président d'Exit Suisse romande acquitté
L'aide au suicide évolue également en fonction des décisions prises par la justice. Cette semaine, le Tribunal fédéral a ainsi confirmé l'acquittement du docteur Pierre Beck pour infraction à la loi sur les stupéfiants.
En 2017, l'ancien vice-président d'Exit Suisse romande avait aidé une femme de 86 ans en bonne santé à se suicider. La majorité des juges du Tribunal fédéral a estimé que le comportement du médecin n'était pas répréhensible au regard de la loi sur les stupéfiants. La présidente a souligné que ce texte poursuivait des objectifs de santé et d'ordre public. Il n'a jamais eu pour vocation de traiter l'assistance au suicide.
Certes, Pierre Beck ne s'est pas conformé aux règles éthiques de sa profession et aux directives de l'Académie suisse des sciences médicales, a reconnu la cour. Ces dispositions ne permettent au corps médical de pratiquer le suicide assisté qu'en cas de mort imminente ou de souffrances intolérables et la situation d'une personne en bonne santé n'est pas prévue.
Pour la cour, ces règles éthiques et ces directives n'ont pas force de loi. Elles ne constituent pas une base légale suffisante pour prononcer une sanction pénale. En renonçant à réprimer l'assistance au suicide, en dehors du mobile égoïste, le Conseil fédéral et les Chambres ont sciemment laissé aux individus une grande liberté dans le choix de leur mort, a estimé la majorité.
>> Lire aussi : L'ancien vice-président d'Exit Suisse romande Pierre Beck est définitivement acquitté
Où trouver de l'aide?
Sur internet:
Pour la promotion de la santé mentale dans les cantons latins: santépsy.ch
Pour les enfants et les personnes adolescentes: ciao.ch
Pour les 18-25 ans: ontécoute.ch
Pour la prévention du suicide des jeunes: stopsuicide.ch
Le Groupe Romand de Prévention du Suicide: preventionsuicide-romandie.ch
L'Unité Malatavie des HUG pour les adolescent·e·s en crise: malatavie.ch ou par téléphone (24h/24): 022 372 42 42
Par téléphone:
147: Pro Juventute – Ecoute et conseils pour les jeunes (147.ch)
143: La Main Tendue – Ecoute et conseils pour les adultes (143.ch)
144: Ambulances – Urgences