Imbroglio sur les chars Leopard: le président du conseil d'administration de RUAG démissionne
Le Contrôle des finances (CDF) dévoile mardi un audit sur l'imbroglio entourant la vente de chars de combat de type Leopard 1. Le Département fédéral de la défense (DDPS) et l'Administration fédérale des finances (AFD), propriétaires de RUAG MRO, réagissent le jour même en publiant un communiqué.
Ces derniers "déplorent les manquements constatés par le CDF dans le système de gestion de la conformité de RUAG MRO et les prennent au sérieux. RUAG MRO doit immédiatement corriger ces manquements et renforcer la conformité".
Les services propriétaires attendent de la société RUAG MRO qu'elle remédie immédiatement aux manquements manifestes qui existent au niveau de son organisation, de ses processus et de ses activités commerciales et qu'elle les tienne informés.
Démission
Afin que RUAG MRO puisse accomplir ses tâches sur des bases saines et avec de nouvelles forces, le président du conseil d'administration, Nicolas Perrin, en poste depuis 2019, a décidé de démissionner. En accord avec le DDPS, précise le communiqué.
Nicolas Perrin, ancien directeur général de CFF Cargo, se tient à disposition en tant que président du conseil d'administration pour assurer la transition jusqu'à ce que son successeur soit en poste. Le rapport du CDF ne constate aucun comportement pénalement répréhensible, précise le DDPS.
En raison des incohérences apparues lors de l'affaire des chars Leopard 1, la cheffe du DDPS, la présidente de la Confédération Viola Amherd, avait demandé en août 2023 au CDF d'examiner la manière dont les directives avaient été respectées dans le cadre de cette affaire.
>> Relire : Viola Amherd veut une enquête sur les chars Leopard achetés en Italie par Ruag
Le même jour, le parquet de Verden, en Allemagne, avait de son côté annoncé ouvrir une enquête sur des faits de corruption en lien avec les chars de RUAG. Une demande d'entraide judiciaire a été déposée auprès du Ministère public de la Confédération.
Examen approfondi
La Confédération estime désormais que l'interaction entre la direction, le conseil d'administration et elle-même nécessite un examen plus approfondi. Elle salue par conséquent le deuxième audit annoncé du CDF, qui concerne la gestion et la conduite de RUAG MRO.
Le gendarme financier va aussi examiner des aspects susceptibles de relever de l'escroquerie, sur mandat du Parlement, en collaboration avec un cabinet d'avocats, et en accord avec le conseil d'administration de l'entreprise.
De plus, le DDPS dirigera l'examen du cadre juridique de RUAG MRO. Martin Dumermuth, ancien directeur de l'Office fédéral de la justice, accompagnera ces clarifications.
De son côté, Ruag MRO rappelle dans un communiqué que l'achat et la gestion des Leopard 1 court en partie sur la période de dissociation de l'entreprise Ruag. Ces années étaient marquées par la mise en place des structures de direction et des fonctions d'entreprise essentielles. Cela concernait également le système de gouvernance ainsi que la gestion des risques et le système de compliance, qui ont été développés et vérifiés. Une enquête interne est en cours.
Imbroglio
En 2016, l'ancienne entreprise RUAG Holding a acheté 96 chars Leopard 1 en Italie, où elle les a ensuite entreposés. Début 2023, l'entreprise allemande Rheinmetall a demandé à RUAG MRO, qui a repris les anciens contrats passés par RUAG Holding, si elle pouvait acheter les chars de combat.
Rheinmetall avait alors ouvertement déclaré que ces chars seraient livrés à l'Ukraine après un service de maintenance effectué en Allemagne. Le 13 février, RUAG MRO a signé un contrat de vente avec Rheinmetall incluant une réserve selon laquelle la livraison n'aurait lieu qu’avec l’autorisation des autorités compétentes, soit le Conseil fédéral.
Ce dernier a refusé en juin dernier d'accéder à la demande de RUAG, invoquant le droit de la neutralité. Puis la directrice de RUAG, Brigitte Beck, avait démissionné en août à la suite de la polémique suscitée par ses déclarations liées aux exportations d'armes suisses vers l'Ukraine et sur la neutralité.
L'affaire s'est encore compliquée avec les prétentions d'une autre entreprise allemande, GLS, qui a fait valoir un contrat de vente de 25 des 96 chars avec RUAG. L'entreprise a obtenu d'un tribunal italien, par une ordonnance superprovisoire, la restitution de ces véhicules stockés en Italie.
ats/mac