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"J'ai plus peur de voir le ciel me tomber sur la tête que l'AVS faire faillite", déclare Pierre-Yves Maillard

L'invité de La Matinale - Pierre-Yves Maillard, président de l’Union syndicale suisse
L'invité de La Matinale - Pierre-Yves Maillard, président de l’Union syndicale suisse / La Matinale / 15 min. / le 7 février 2024
Pierre-Yves Maillard, président de l'Union syndicale suisse (USS), était l’invité de La Matinale mercredi. Il a affirmé que si les votations du 3 mars prochain aboutissent à l’introduction d'une 13e rente AVS, "ni la Suisse, ni l'AVS ne se retrouveront en faillite". Pour lui, il est possible de voter oui en toute tranquillité.

Fervent partisan de la 13ᵉ rente de l’AVS, Pierre-Yves Maillard ne perçoit pas la votation du 3 mars comme un conflit gauche-droite. Selon lui, l’enjeu serait davantage une opposition entre ceux qui sont dans une situation confortable et la majorité de la population qui voit sa situation se dégrader. "C'est pour cela que l'on a des soutiens qui viennent de partout. Il y a des élus, des gens de la base, de l'UDC, du PLR", déclare-t-il.

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Selon ses chiffres, la rente mensuelle moyenne de l'AVS s'élève à 2000 francs et celle de la LPP, qui a connu une baisse au cours des quinze dernières années, est actuellement d'environ 1700 francs. En moyenne, avec les deux piliers, un retraité vit avec environ 3500 à 3700 francs par mois.

On n'est pas en récession, il n'y a pas de chômage, l'AVS fait des bénéfices, les caisses de pension ont des capitaux comme jamais

Pierre-Yves Maillard, membre du comité de l’initiative pour une 13e rente AVS

Pour le Vaudois, les rentes de l'AVS ne suffisent donc plus à couvrir le coût de la vie, ni même à atteindre l'objectif constitutionnel qui est de subvenir aux besoins vitaux des retraités. "On n'est pas en récession, il n'y a pas de chômage, l'AVS fait des bénéfices, les caisses de pension ont des capitaux comme jamais. (...) Il n'y a aucune raison pour justifier ça. Mais le pouvoir en Suisse dit: écoutez, c'est comme ça, débrouillez-vous!", s'indigne-t-il.

"Ce pays a été construit sur l'idée qu'on offrirait à celles et ceux qui ont consacré leur vie au travail une période où ils pourraient faire davantage que simplement de régler leurs factures et de regarder le temps qui passe", rappelle le président de l'USS.

J'ai passé l'âge de croire aux promesses des conseillers fédéraux (...) à trois semaines d'une votation qu'ils ont peur de perdre

Pierre-Yves Maillard, membre du comité de l’initiative pour une 13e rente AVS

A cette initiative, le Conseil fédéral, qui fait campagne pour le "non", rétorque qu'il faut des aides ciblées. Il y a deux semaines, Elisabeth Baume-Schneider promettait une révision de ces aides. Pierre-Yves Maillard, lui, n'y croit plus: "J''ai passé l'âge de croire aux promesses des conseillers fédéraux et des partis de droite à trois semaines d'une votation parce qu'ils ont peur de perdre. (...) Personne n'a fait le moindre pas pour un contre-projet, ni le Conseil fédéral, ni les parlementaires de droite. (...) Donc comment croire ceux qui viennent de faire le contraire?"

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En cas de rejet de l'initiative, l'ancien conseiller d'Etat craint l'interprétation que pourraient faire le Conseil fédéral et les partis de droite: "Ils diront, vous voyez, la population est d'accord, tout va bien, on continue, on supprime la rente de veuve. Parce que ce ne sont pas des améliorations qui sont planifiées, c'est le contraire".

En revanche, en cas d'acceptation, il ne craint pas l'imposition d'une hausse de l'âge de la retraite. "Le rapport entre actifs et inactifs qu'on nous a toujours raconté, maintenant, on sait qu'il est faux", explique Pierre-Yves Maillard. En 1947, la moitié des adultes (18-65 ans) ne travaillaient pas pour un salaire, or "c'était les femmes, puisque 80% d'entre elles n'avaient pas de salaire en 47. Donc en réalité, le vrai rapport entre actifs et inactifs est relativement stable". Si le peuple décide maintenant de renforcer l’AVS, pour lui, il est évident qu’il n’y aura jamais de baisse des rentes.

Le Conseil fédéral à tendance à exagérer, parce qu'il veut toujours se prémunir contre tous les risques

Pierre-Yves Maillard, membre du comité de l’initiative pour une 13e rente AVS

"L'AVS a 50 milliards de fortune, 65 ans d'existence, n'a jamais fait faillite et ne fera jamais faillite, contrairement aux grandes banques privées qui l'annoncent régulièrement", souligne Pierre-Yves Maillard. Selon lui, le Conseil fédéral et l'industrie financière, qui vend notamment le 3e pilier, ont tendance à exagérer.

Le socialiste estime qu'il n’y a aucune raison d’avoir peur de voter oui: " Car c'est comme ça que l'on fait dans ce pays. (...) La dernière fois, on a divisé les hommes contre les femmes. Maintenant, on essaie de diviser les jeunes contre les anciens".

"Je suis comme les Gaulois, j'ai peur que le ciel me tombe sur la tête, bien davantage que de la faillite de l'AVS", ironise-t-il.

>> En savoir plus : Le dossier des votations fédérales du 3 mars 2024

Propos recueillis par: Pietro Bugnon

Adaptation web: Miroslav Mares

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