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"L'argent facile pour la Confédération n'existe plus", prévient la directrice de l'Administration fédérale des finances

L'invitée de La Matinale - Sabine D'Amelio Favez, directrice de l'Administration fédérale des finances
L'invitée de La Matinale - Sabine D'Amelio Favez, directrice de l'Administration fédérale des finances / La Matinale / 14 min. / le 5 juillet 2024
La Confédération, après des années de prospérité, fait face à des résultats négatifs et prévoit un déficit de 700 millions de francs pour 2025. Les crises de ces dernières années ont renforcé l'image d'un Etat-providence "capable de débloquer des fonds à tout moment", estime la directrice de l'Administration fédérale des finances, Sabine D'Amelio-Favez.

"La Confédération vit au-dessus de ses moyens", estime Sabine D'Amelio-Favez, directrice de l'Administration fédérale des finances (AFF), vendredi dans La Matinale de la RTS. "Cependant, nous avons encore une croissance économique positive. Les recettes fiscales des entreprises augmentent de 2% chaque année. Toutefois, du côté des dépenses, nous faisons face à des défis considérables."

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Elle mentionne la situation géopolitique en Europe avec la guerre en Ukraine, qui entraîne une augmentation du budget de l'armée, ainsi que le vieillissement de la population, qui alourdit les coûts des assurances sociales, y compris l'AVS. "La dernière votation sur la 13e rente AVS (le projet de financement - par une hausse des cotisations salariales et, éventuellement, une hausse de la TVA - est actuellement en consultation, n.d.l.r) ne nous a pas aidés", admet-elle.

Deux défits: défense et démographie

Dès 2027, la Confédération table sur des déficits globaux de 2,5 milliards de francs, principalement en raison de l'"augmentation importante" du budget de l'armée - le Parlement souhaite consacrer 1% du Produit intérieur brut (PIB) à la défense d'ici à 2030, et le Conseil fédéral vise 1% d'ici à 2035. Par ailleurs, l'AVS devrait coûter 600 millions de francs supplémentaires chaque année, indique Sabine D'Amelio-Favez, première femme à la tête de l'AFF.

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"Nous observons un effet post-crise", dit-elle. "Le fait d'avoir pu dépenser tous ces milliards a contribué à renforcer l'image d'un Etat-providence capable de débloquer des fonds à tout moment. Les années de dette sans coût, grâce aux taux d'intérêt négatifs, ne nous ont pas aidés. L'argent facile n'existe plus."

Charge de la dette "raisonnable"

Mais la Suisse reste faiblement endettée, avec une dette représentant 17% du PIB. Comparativement, ce taux est très bas à l'international, ce qui est crucial pour une petite économie orientée vers l'exportation. "Ce faible endettement a permis de débloquer d'importantes sommes lors des crises, et de maintenir une charge de la dette raisonnable, estime la Vaudoise. Par exemple, la charge de la dette de la France est passée de 40 à 70 milliards en peu d'années, dépassant même leur budget de la défense. "En Suisse, la situation reste favorable."

Sabine D'Amelio-Favez rappelle que le frein à l'endettement, critiqué par la gauche, empêche le Parlement de financer les dépenses courantes de l'Etat avec de la dette, sauf en cas de mauvaise croissance ou de crises. "Le rôle principal du Parlement est de fixer les priorités", rappelle-t-elle.

Propos recueillis par Delphine Gendre/vajo

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Les politiques climatiques pourraient peser lourd sur l'essor économique

L'Administration fédérale des finances a réalisé en avril dernier une étude "pionnière" pour quantifier les coûts des mesures du dérèglement climatique d'ici à 2060. "Dans l'idéal, nous souhaiterions quantifier les coûts des effets du changement climatique. Faute de données, notamment sur les flux migratoires internationaux possibles, ce n'est pas encore possible", indique sa directrice Sabine D'Amelio-Favez.

Les politiques climatiques pourraient affecter l'économie et réduire les recettes fiscales à long terme, annonce-t-elle. "Nous nous attendons à des influences sur le travail et sur les dépenses de consommation, bien que les chiffres ne soient pas encore très significatifs, mais à long terme, il y aura des effets directs sur les revenus. Par exemple, l'impôt sur les huiles minérales va disparaître, et il faudra trouver de nouvelles solutions."