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L'élargissement des autoroutes séduit une courte majorité de la population, selon le premier sondage SSR

Illustration pour le premier sondage SSR en vue des votations fédérales du 24 novembre 2024. [KEYSTONE - ALEXANDRA WEY/GAETAN BALLY/NOEMI CINELLI]
Illustration pour le premier sondage SSR en vue des votations fédérales du 24 novembre 2024. - [KEYSTONE - ALEXANDRA WEY/GAETAN BALLY/NOEMI CINELLI]
Plus de 60% des Suisses soutiennent pour l'heure le grand projet de réforme du financement des prestations de soins soumis au peuple le 24 novembre, montre le premier sondage SSR. Une courte majorité se prononce aussi en faveur de l'extension des autoroutes. Quant aux deux réformes du droit du bail, elles sont diversement appréciées.

Le projet de financement uniforme des prestations de santé ambulatoires et stationnaires (EFAS) paraît bien parti pour être accepté par le peuple, selon le premier sondage SSR publié vendredi. Il recueille 61% d'intentions de vote favorables, tandis que 26% des personnes interrogées s'y opposent. Mais la formation de l'opinion sur cet objet vaste et complexe est peu avancée et de nombreux Suisses et Suissesses se disent encore indécis.

Alors que la campagne ne fait que commencer, pour le moment, un peu plus de la moitié de la population roule aussi pour le projet d'élargissement des autoroutes. Mais l'opposition est importante avec pas moins de 45% de voix défavorables.

Deux révisions du droit du bail sont aussi au menu des votations fédérales du 24 novembre. Le projet de durcissement des conditions de sous-location est soutenu par environ six personnes sur dix, tandis qu'un tiers le refuse. Le deuxième projet, qui vise à assouplir les conditions de résiliation du bail par le propriétaire, ne bénéficie pour le moment pas d'une majorité (49% de oui, 46% de non).

Choc frontal entre la gauche et la droite sur les autoroutes

Soutenue par le Parlement et le Conseil fédéral, l'étape d'aménagement 2023 des routes nationales prévoit l'extension de six tronçons autoroutiers, dont un en Suisse romande. Il s'agit de l’axe Le Vengeron (GE)-Coppet (VD)-Nyon (VD) qui doit être élargi à deux fois trois voies. Destinés à fluidifier le trafic et à réduire les embouteillages, ces projets sont devisés à 4,9 milliards de francs, financés par le fonds pour les routes nationales et le trafic d'agglomération.

Une large alliance composée d'organisations environnementales et de la gauche dénonce un projet démesuré, trop coûteux, inefficace et incompatible avec les objectifs climatiques de la Suisse. Sans surprise, les sympathisants des Verts (88% de non), du Parti socialiste (79% de non) et des Vert'libéraux (61% de non) le rejettent. A l'inverse, le soutien est massif dans l'électorat du PLR (87% de oui), de l'UDC (78% de oui) et du Centre (62%).

La majorité des Suisse alémaniques (52% de oui) et des italophones (57% de oui) se déclarent favorables à l'extension des routes nationales, tandis que le soutien est légèrement plus faible en Suisse romande (48% de oui). Mais les partisans de l'élargissement des autoroutes sont loin d'avoir la voie libre. Hormis au Tessin où l'avance semble confortable, l'opposition reste forte chez les Romands (44% de non) et les Alémaniques (46% de non).

De grosses disparités dans la société

Globalement, les hommes se montrent nettement favorables à l'extension du réseau autoroutier (59% de oui), mais leur enthousiasme est freiné par les femmes, qui disent non à 52%, selon le sondage. La majorité des personnes vivant à la campagne (55% de oui) ou dans les zones intermédiaires (56% de oui) approuvent projet, tandis que les citadins se montrent beaucoup plus partagés (47% de oui, 49% de non).

L'approbation du projet semble également être fortement corrélée aux revenus: plus on gagne et plus on approuve l'élargissement des autoroutes. Le non est ainsi majoritaire chez les personnes issues de ménages gagnant moins de 7000 francs. A partir d'un revenu supérieur à cette limite, le oui passe devant, pour atteindre 61% dans les ménages gagnant plus de 11'000 francs par mois.

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Sur le droit du bail, un affrontement gauche/droite

En ce début de campagne, les deux révisions du droit du bail ne se dirigent pas forcément vers le même résultat. Pourtant, dans l'opinion, une même logique est à l'oeuvre pour les deux objets: l'opposition entre la gauche et la droite. Dans les deux cas, le oui est écrasant au sein des sympathisants des partis de droite, tandis que l'électorat rose-vert se montre plus critique, voire carrément hostile.

En ce qui concerne le durcissement des conditions de sous-location, les trois régions linguistiques du pays y sont majoritairement favorables, même si le oui est plus timide en Suisse romande (55% contre 59% en Suisse alémanique et 69% en Suisse italienne). Plus que la langue, l'âge et le revenu sont les critères qui cristallisent les tensions sur cette question.

Moins de la moitié des 18-39 ans approuvent le projet, tandis que dans les autres classes d'âge, le oui rassemble six personnes sur dix. De même, la proposition ne convainc pas la majorité des personnes issues de ménages gagnant moins de 5000 francs par mois. Au-delà de ce seuil, l'approbation est majoritaire et culmine à 66% chez les personnes les plus aisées.

La deuxième partie de la révision du droit du bail est plus contestée que la première. Les Romands sont ainsi plus nombreux à rejeter l'assouplissement des conditions de résiliation pour besoin propre qu'à l'accepter (47% de non, 43% de oui). En Suisse alémanique, le oui dépasse de justesse les 50%, mais l'opposition est tout sauf négligeable (46% de non). Seuls les Tessinois approuvent largement cet objet (60% de oui, 34% de non).

Avec 54% de non, les jeunes sont à la pointe de l'opposition à cet objet. La réforme divise énormément les seniors (49% de oui, 47% de non), tandis que les 40-64 ans sont les plus convaincus (55% de oui, 41% de non). Comme pour l'autre objet en lien avec le droit du bail, le revenu du ménage est déterminant dans le choix des votants: les moins aisés rejettent le texte, alors que les plus fortunés l'approuvent.

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EFAS: la gauche peine à imposer ses arguments

Projet complexe, le financement uniforme des prestations de santé ambulatoires et stationnaires (EFAS) est issu d'une initiative parlementaire déposée en 2009. Ce n'est qu'en décembre 2023, 14 ans plus tard, qu'il a été adopté par le Parlement. Avec cette réforme, toutes les prestations de l'assurance obligatoire des soins - soins ambulatoires comme soins stationnaires (hôpitaux et EMS) - seraient financées par les cantons et les caisses maladie selon la même clé de répartition.

Selon ses partisans - Conseil fédéral, majorité du Parlement et des acteurs du secteur de la santé -, cette réforme est censée réduire les mauvaises incitations et donc limiter la hausse des coûts, tout en améliorant la qualité des soins. Le référendum a été lancé par les syndicats, soutenus par le PS et une partie des Verts. Pour eux, le projet donne trop de pouvoir aux assureurs et va conduire à la fois à une hausse des primes et à une baisse de la qualité des soins.

Pour l'heure, ces arguments peinent à porter leurs fruits à gauche. Selon le sondage SSR, une majorité de l'électorat des Verts soutient le projet (53% de oui, 27% de non) et celui du PS est très partagé (46% de oui, 39% de non). A droite et au centre, en revanche, les électeurs sont convaincus par la réforme. Le oui dépasse les 60% à l'UDC et même les 75% chez les sympathisants vert'libéraux. Signe de la complexité du dossier, les indécis sont toutefois encore très nombreux, en particulier à gauche.

Large approbation pour le projet

En Suisse alémanique et en Suisse italienne, plus de six personnes interrogées sur dix soutiennent le projet EFAS. En Suisse romande, le oui rassemble moins de la moitié de la population. Néanmoins, il devance nettement le camp du non, qui représente 30% des intentions de vote. A noter qu'un quart des Romandes et des Romands sont toujours indécis.

Au niveau socio-économique, l'opposition la plus forte se retrouve dans la catégorie des personnes issues de ménages dont le revenu est inférieur à 3000 francs par mois. Les intentions de vote favorables et défavorables y sont données à égalité, à 42%. Toutes les autres classes de revenu approuvent majoritairement la réforme, et ce très largement dans les catégories les plus favorisées.

Didier Kottelat

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Méthode

Première session de l’enquête Trend SRG-SSR sur les votations du 24 novembre 2024, réalisée par l’Institut de recherche gfs.bern entre le 30 septembre et le 14 octobre 2024 auprès de 11'183 titulaires du droit de vote. La plage d’erreur statistique est de +/- 2,8 points de pourcentage.