"Cela reste une goutte d'eau parce qu'on met l'accent sur des personnes qui sont en fauteuil roulant", commente Sébastien Kessler, le premier élu au Grand Conseil vaudois à se déplacer en chaise roulante. "Il y a bien sûr d'autres personnes en situation de handicap dans les parlements, qu'ils soient communaux ou cantonaux, avec des handicaps qui ne se voient pas et qui ne se revendiquent pas en tant que tels."
Le socialiste poursuit: "Avoir ou dire que l'on a un handicap, c'est stigmatisant parce que tout d'un coup, les autres mettent sur la personne handicapée tout ce qu'ils croient savoir sur la personne handicapée. Et il se trouve que ce sont des valeurs plutôt négatives et plutôt fausses."
Car avant d'entrer dans un parlement, il faut être élu. Et pour cela, il faut mener campagne. Or, c'est un obstacle à surmonter lorsqu'on est en situation de handicap: "Il faut être présent dans la rue, il faut être visible, donc il faut déjà se déplacer, il faut pouvoir communiquer, il faut pouvoir se renseigner, aller chercher de l'information. Et tout cela engendre des contraintes pour un grand nombre de personnes en situation de handicap", explique Sébastien Kessler.
La mobilité, un enjeu clé
Chaque fois qu'il veut prendre un transport public, Malick Reinhard doit appeler la ligne des CFF pour une assistance: "Cela veut dire vingt minutes au téléphone pour voyager deux fois dans une journée. C'est extrêmement contraignant", souligne le journaliste en situation de tétraplégie.
Et au moment de réserver un trajet de Lausanne à Berne, il pointe les manquements de la loi pour l'égalité des personnes handicapées, la LHand. "La volonté du peuple n'est toujours pas respectée 20 ans après son entrée en vigueur [...] on bafoue les droits humains de 22% de la population", s'indigne Malick Reinhard.
Concrètement, la faitière des associations pour le handicap, Inclusion Handicap, dénonçait en décembre dernier des infrastructures de transports qui ne respectaient pas la LHand. Obstacles, absences de lignes de guidage pour les malvoyants, manque d'assistance: 350 communes restaient inaccessibles au début de l'année pour les personnes handicapées, montrait une carte de la RTS.
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Pour une politique globale du handicap
"La mobilité est le seul domaine où l'on a fixé un délai. Donc au bout de 20 ans, on fait le bilan parce que le délai est échu. Mais on se rend compte que la loi n'est pas appliquée dans d'autres domaines comme l'inclusion à l'école, l'inclusion dans le domaine de l'emploi, la question du logement, où il n'y a pas de délai qui a été fixé", déplore Caroline Hess-Klein, cheffe du département Egalité d'Inclusion Handicap.
Et l'arrivée très progressive de politiciens et politiciennes en situation de handicap ne permet pas encore un changement de paradigme. "Ce n'est pas parce qu'on est en chaise roulante qu'on va pouvoir faire avancer les choses. Il faut obtenir des majorités politiques, or on est en minorité en étant une personne en situation de handicap à l'heure actuelle", conclut-elle.
Cédric Guigon, Tristan Miquel