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La Suisse, château d'eau de l'Europe, doit aussi apprendre à se rationner

La Suisse "château d'eau de l'Europe" en péril. Les explications de Julien von Roten
La Suisse "château d'eau de l'Europe" en péril. Les explications de Julien von Roten / 19h30 / 1 min. / le 17 juin 2024
L'eau est devenue un enjeu stratégique majeur, y compris en Suisse. Entre des sécheresses estivales qui se répètent, ou au contraire, comme ce printemps, une météo pluvieuse qui remplit les réserves, mais désole les agriculteurs, la gestion de l'eau est devenu un vrai défi politique et logistique. 

Si la Suisse est parfois surnommée le château d’eau de l’Europe, c'est d'abord en raison d'un chiffre déjà très parlant: si la Suisse n'occupe que 0,4% du territoire européen, elle possède en revanche 6% des réserves d'eau douce du continent, et ce pour plusieurs raisons.

Chaque année, il pleut presque deux fois plus en Suisse que la moyenne européenne. Et vu notre situation géographique au cœur des Alpes, une partie de cette eau est stockée temporairement sous forme de glace ou de neige.

Moins de neige et de glace

Enfin, les eaux suisses alimentent directement quatre fleuves européens: le Rhin, le Rhône, le Pô et le Danube, d'où ce surnom de château d'eau de l’Europe.

Le permafrost continue de dégeler en Suisse en de nombreux endroits (image d'illustration). [Keystone - Anthony Anex]
Le permafrost continue de dégeler en Suisse en de nombreux endroits (image d'illustration). [Keystone - Anthony Anex]

Pourtant, depuis quelques années, la réalité est un peu différente. En Suisse, 40% de l'eau consommée provient aujourd'hui de la couverture neigeuse. Or, la réserve de neige diminue depuis de nombreuses années, tout comme la réserve de glace. Le volume des glaciers a été quasiment divisé par trois depuis 1850.

Moins de neige et moins de glace signifie moins de stock en été, surtout quand on en a le plus besoin.

Enjeux urbanistiques et politiques

L'accès à l'eau est ainsi devenu en Suisse un critère prépondérant en matière d'urbanisme ou de politique publique. De plus en plus de communes doivent s'adapter ou limiter leurs zones à bâtir, en raison du manque d'eau. 

>> Voir le sujet du 19h30 sur les restrictions d'eau dans les communes :

En Suisse, certaines communes commencent à s’inquiéter pour leur approvisionnement en eau potable
En Suisse, certaines communes commencent à s’inquiéter pour leur approvisionnement en eau potable / 19h30 / 2 min. / le 17 juin 2024

"L'eau, c'est le tourisme, la production d'énergie, c'est pour l'industrie, les ménages, pour la faune et la flore, vraiment tout ce qui concerne un canton ou un pays", souligne Laurent Horvath, délégué à l’eau du canton du Valais et premier "Monsieur Eau" du pays.

Son travail consiste ainsi à coordonner toutes les actions autour de l'eau dans son canton. "En Valais, ce sont les communes qui sont propriétaires de l'eau", rappelle-t-il, "il faut donc trouver des solutions, au vu des changements actuels".

>> L'exemple dans le 19h30 de la commune de Salquenen (VS), qui teste de nouvelles techniques d'arrosage :

La commune de Salquenen (VS), une des plus sèche de Suisse, teste de nouvelles technologies d'arrosage pour ses vignes
La commune de Salquenen (VS), une des plus sèche de Suisse, teste de nouvelles technologies d'arrosage pour ses vignes / 19h30 / 2 min. / le 17 juin 2024

Car le besoin de s'adapter est bien là, note le responsable. "L'eau, quand on en a assez, est invisible. Mais quand on en a trop, qu'elle déborde, ou qu'on en a nettement moins, on ne voit alors plus qu'elle. Les citoyens sont vraiment interpelés pour se dire 'l'eau, c'est la vie.'"

>> L'interview de Laurent Horvath dans le 19h30 :

Laurent Horvath, "Monsieur Eau" du canton du Valais, est l'invité du 19:30
Laurent Horvath, "Monsieur Eau" du canton du Valais, est l'invité du 19:30 / 19h30 / 3 min. / le 17 juin 2024

Sujets TV: Julien von Roten, Delphine Misteli, Gianluca Agosta, Lea Jelmini

Adaptation web: Katharina Kubicek

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Un printemps 2024 particulièrement humide

Alors que les sécheresses estivales tendent à se répéter, ce printemps, la météo pluvieuse a rempli les nappes phréatiques. Rien que pour le mois de mai, 100 millimètres de pluie en moyenne se sont déversés sur la Suisse romande, des précipitations bien au-dessus de la norme.

>> Voir les explications du 19h30 :

Après un printemps pluvieux, les réserves d'eau pourront-elles nous préserver de la canicule estivale ?
Après un printemps pluvieux, les réserves d'eau pourront-elles nous préserver de la canicule estivale ? / 19h30 / 1 min. / le 17 juin 2024

Les sols gorgés d'eau et des nappes phréatiques bien nourries sont plutôt une bonne nouvelle avant d'affronter sécheresses et canicule.

"L'humidité des sols va diminuer le risque de canicule par l'effet d’évapotranspiration des plantes. S'il commence à faire chaud, les plantes vont beaucoup transpirer, ce qui va avoir un effet de refroidissement, ce qui va temporiser un peu les températures", explique Josué Gehring, météorologue à MétéoSuisse, dans le 19h30.

>> Lire aussi : L'enneigement excédentaire dans les Alpes pourrait entraîner des températures plus modérées cet été

Autre intérêt des sols humides quand il commencera à faire chaud: ils favorisent la formation d'orages. "Les orages peuvent également entretenir ces conditions relativement humides et retarder ou continuer de diminuer le risque de canicule", décrit Joshua Gehring. "Mais cela ne veut pas dire qu’il ne va pas faire chaud ou qu'il n'y aura pas de canicules plus tard dans la saison."

En revanche, dans ces conditions, la probabilité d'avoir un été tel que 2003 s'éloigne (la canicule d'août 2003, qui avait duré une dizaine de jours, avait eu de funestes conséquences, entre surmortalité et extrême sécheresse, ndlr).