La Suisse ne parviendra pas à intégrer 40% des réfugiés ukrainiens sur le marché du travail d'ici fin 2024
Depuis l'activation du statut de protection pour les Ukrainiens par le Conseil fédéral le 12 mars 2022, la Suisse a accueilli près de 100'000 personnes venues d'Ukraine, en plus des flux migratoires habituels. L'année dernière, plus de 30'000 demandes ont été déposées. Un afflux massif que le SEM n'avait pas anticipé, explique sa directrice Christine Schraner Burgener.
"Il y a deux ans et demi, quand j'ai débuté au SEM, seulement sept semaines après le début de la guerre en Ukraine, j'ai dû immédiatement chercher des hébergements et mettre en place un système de procédure. Nous avons instauré le statut de protection S", explique-t-elle.
Cette crise a été gérée grâce à l'aide de la population ainsi qu'à la coopération étroite des cantons et des communes
Face à cette crise, la Suisse a fait preuve d'une résilience remarquable, selon la directrice du SEM. Elle exprime sa satisfaction et sa fierté envers la population suisse pour son soutien. "Dès le début, 60% des Ukrainiens ont trouvé refuge dans des hébergements privés", souligne-t-elle. Cette solidarité, combinée à une coopération étroite avec les cantons, les communes et les villes, a permis de gérer efficacement la crise.
Un équilibre entre arrivées et départs d'Ukrainiens
Selon Christine Schraner Burgener, un peu moins de 100'000 permis S ont été délivrés, dont 20'000 ont déjà été rendus. Un nombre considérable d'Ukrainiens et d'Ukrainiennes sont donc déjà rentrés. Un phénomène qui ne la surprend pas, car "en temps de guerre, dans le monde entier, on constate que les personnes déplacées restent souvent proches de la frontière, espérant pouvoir rentrer chez elles", comme elle l'a observé avec les Rohingyas au Myanmar.
Cependant, chaque mois, environ 1500 Ukrainiens arrivent en Suisse, tandis qu'un nombre à peu près équivalent quitte le pays. Cette dynamique génère beaucoup de travail, car il faut enregistrer ces mouvements, informer les cantons et organiser notre soutien financier aux cantons, souligne-t-elle.
Seulement 32%
Dans le but de réaliser des économies dans l'asile, d'ici fin 2024, le Conseil fédéral a pour objectif d'intégrer près de 40% des réfugiés ukrainiens sur le marché du travail. Mais cet objectif semble difficile à atteindre: à la fin du mois de mai, ils n'étaient que 24%. La directrice du SEM estime que le niveau atteindra "probablement 32%" d'ici la fin 2024.
Nous ferons tout notre possible pour atteindre l'objectif de 40% d’intégration professionnelle d'Ukrainiens d'ici la fin de l'année
Il existe de grandes disparités entre les cantons en matière d'intégration professionnelle de cette population. C'est particulièrement le cas en Suisse romande, par exemple à Genève, où le taux d'emploi des Ukrainiens n'est que de 11%. Christine Schraner Burgener explique ces chiffres en soulignant que "si le taux d'emploi est plus bas pour la population suisse, cela s'applique également aux Ukrainiens, rendant la tâche un peu plus difficile".
Face à ce défi, "le Conseil fédéral a récemment nommé un délégué à l'intégration qui aidera, par exemple, à faire correspondre les profils avec les entreprises privées. Nous ferons tout notre possible pour atteindre l'objectif de 40% d’intégration", ajoute-t-elle.
Propos recueillis par: Pietro Bugnon
Adaptation web: Miroslav Mares