En février dernier éclatait le scandale des eaux minérales Henniez filtrées au charbon actif, une pratique illégale en Suisse.
Ce traitement, appliqué depuis au moins 2020, visait à éliminer des "résidus indésirables liés au stress environnemental", indiquait une porte-parole de Nestlé Waters.
Des pesticides dans l'eau minérale
Un faisceau d'indices permet de postuler qu'il s'agissait de résidus phytosanitaires. Or, selon l'ordonnance du Département fédéral de l'intérieur (DFI) sur les boissons, l'eau minérale naturelle doit se distinguer par sa pureté originelle et ne peut contenir aucune substance anthropique, c'est-à-dire générée par l'activité humaine.
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Le problème, comme l'explique Sophie Michaud Gigon dans une interpellation déposée le 29 février, est que "ces dernières années, les épisodes de forte pluie et de sécheresse liés au réchauffement climatique se sont multipliés, ainsi que les alertes quant à l'imprégnation des sols et des nappes phréatiques par des résidus de pesticides".
Dans une lettre diffusée en 2022, l'Office fédéral de la santé alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) reconnaissait par ailleurs que, grâce à des méthodes d'analyse chimiques toujours plus sophistiquées, il est possible, dans de rares cas, de mettre en évidence d'infimes traces de substances anthropiques dans l'eau minérale naturelle.
Une situation paradoxale
D'un côté, selon l'ordonnance du DFI sur les boissons, l'eau minérale naturelle ne peut pas contenir de résidus de pesticides. De l'autre, l'OSAV invite les cantons à se baser sur des valeurs maximales définies par la Commission européenne pour différentes substances anthropiques, afin de vérifier la conformité de leur eau minérale.
Face à ces éléments, Sophie Michaud Gigon, qui est aussi secrétaire générale de la Fédération romande des consommateurs (FRC), demande au gouvernement si "les exigences légales concernant l'eau minérale peuvent encore être respectées par les fabricants".
En France, Nestlé Waters est parvenue à convaincre les autorités d'adapter leur réglementation en autorisant l'utilisation de certains micro-filtres. Une évolution qui devrait être discutée par l'Union européenne et qui est désormais posée sur le bureau du Conseil fédéral.
Sujet radio: Mathilde Farine
Adaptation web: Sébastien Blanc
Quelques traitements autorisés sur les eaux minérales
Hormis l'adaptation de la teneur en dioxyde de carbone, les traitements admis se limitent à la décantation et à la filtration, éventuellement après aération, en vue d'éliminer des substances présentes naturellement pouvant surtout détériorer le goût et l'odeur de l'eau minérale.
Cela comprend également l'élimination partielle ou totale de substances telles que le fer ou le manganèse. En outre, l'élimination partielle ou totale du fluorure ou de l'arsenic est admise pour des raisons liées à la santé.
D'autres traitements sont également autorisés pour autant qu'ils soient impérativement nécessaires et qu'ils satisfassent aux critères définis dans l'ordonnance du DFI sur les boissons.