Les deux prévenus répondent d'escroquerie par métier, gestion déloyale et blanchiment aggravé. La magistrate a également demandé leur placement en détention pour motif de sécurité en raison du risque de fuite.
Subsidiairement à la détention, la procureure a demandé à la Cour des affaires pénales de prendre des mesures de substitution garantissant la présence en Suisse des intéressés. Double nationaux, ils disposent de passeports suisse et saoudien pour le patron de Petrosaudi, suisse et britannique pour son adjoint.
Elle a de plus requis que les valeurs séquestrées par la Suisse soient confisquées et restituées au fonds souverain 1MDB. En outre, une créance compensatrice dépassant les 2 milliards de dollars (plus de 1,8 milliard de francs) a été réclamée.
"Arnaque du siècle"
Dans son réquisitoire mercredi, la magistrate a décrit les auteurs présumés de cette "arnaque du siècle" comme des personnes "bien sous tous les rapports" en apparence. En réalité, ils seraient "calculateurs, manipulateurs et d'une cupidité obscène".
La somme dérobée à 1MDB atteint 1,83 milliard de dollars, soit 1% du produit national brut de la Malaisie, a souligné la procureure. Cet Etat s'est endetté pour doter son fonds souverain, alors que les accusés ont dilapidé leur butin en locations de jet privé ou de yacht, en achats d'immeubles à Londres et à Genève et en pierres précieuses. Ils ont agi sur une dizaine d'années, de 2009 à 2019.
Aucune activité réelle
La procureure Muriel Jarp a relayé sa collègue pour décortiquer le siphonnage du fonds souverain. Ce plan "sophistiqué et parfaitement orchestré par de nombreux intervenants" visait à convaincre le conseil d'administration de 1MDB qu'il procédait à des investissements cautionnés par le royaume saoudien.
Un plan qui ne reposait sur rien puisque, au moment de conclure avec les Malaisiens, Petrosaudi n'avait pas d'activité réelle. Cela ne l'a pas empêché de se prévaloir de droits sur des champs pétroliers au Turkmenistan. C'est en faisant miroiter ces droits auprès du conseil d'administration du fonds que les deux accusés sont parvenus à conclure une joint-venture.
Montages financiers
Pour justifier les peines requises, Alice de Chambrier a évoqué les montages financiers complexes, le recours à des hommes de paille, les fausses explications. Lorsque l'enquête a démarré en Suisse, les accusés ont multiplié les transferts à l'étranger afin de mettre à l'abri un maximum de valeurs.
Me Lezgin Polater, qui défend les intérêts de 1MDB, a évoqué des "méthodes dignes du crime organisé": surnoms, codes, sociétés-écrans, multiplication des mouvements de fonds. L'avocat a relevé aussi les trous de mémoire des accusés, leur tendance à faire porter le chapeau aux Malaisiens, à suggérer qu'ils obéissaient à des ordres venus "d'en haut" ou à se réfugier derrière des secrets d'Etat. Le procès se poursuit jeudi avec les plaidoiries de la défense.
ats/ami