Le personnel du Service de renseignement de la Confédération mécontent de sa direction
Chaque trois ans, l'Office fédéral du personnel effectue un vaste sondage auprès des fonctionnaires fédéraux pour évaluer leur taux de satisfaction au travail. Son édition 2023 publiée au début du mois de février (voir deuxième encadré) présente un tableau contrasté au Service de renseignements de la Confédération (SRC).
Si les agents du SRC expriment un fort attachement et une grande motivation pour leur travail, seulement 35% d’entre eux se disent satisfaits du management. C'est le plus mauvais score enregistré à ce niveau depuis une dizaine d'années. Un résultat qui est représentatif puisque 67% du personnel du SRC a participé à cette enquête.
Transformation du SRC, source de tensions
A l’origine de ce mécontentement, il y a cette ambitieuse transformation de l’institution lancée voilà plus d’un an par l’actuel directeur Christian Dussey. Le Valaisan veut en effet rendre le renseignement helvétique plus moderne et plus efficace. "Mais ce programme provoque anxiété et insécurité chez les collaborateurs et les collaboratrices", déclare dans la Matinale de la RTS Barbara Gysi, présidente de l'association du personnel de la Confédération. "Il y a un sérieux manque de communication", ajoute la conseillère nationale socialiste.
Ces derniers mois, l'ensemble des cadres supérieurs et intermédiaires du SRC ont dû repostuler. Période durant laquelle le sondage a été réalisé. Aujourd’hui, ce processus est terminé, a indiqué à la RTS une porte-parole du SRC. Le 1er mars prochain, l’institution vivra une petite révolution, avec l’entrée en fonction d’une nouvelle équipe dirigeante, à la tête d’une structure organisationnelle presque totalement modifiée.
Le SRC n’est pas un champ d’expérimentation de méthodes plus ou moins efficaces dans les ressources humaines
Ce changement systémique "génère beaucoup d'incertitude, relève dans la Matinale de la RTS Jean-Luc Addor. "Le SRC n’est pas un champ d’expérimentation de méthodes plus ou moins efficaces dans les ressources humaines", critique le conseiller national UDC valaisan. "On fait prendre au pays des risques qui sont inacceptables. Le directeur du SRC et sa ministre de tutelle, Viola Ahmerd, doivent régler cette situation de toute urgence".
Les autorités de surveillance du SRC inquiètes aussi
Le mauvais résultat du sondage a aussi interpellé la Délégation des commissions de gestion. Ce gremium d’élus fédéraux est notamment chargé de la haute surveillance du SRC. "Nous allons analyser ce sondage et exiger des informations sur cette situation", a déclaré Stefan Müller-Altermatt, le président de la Délégation et conseiller national du Centre.
L’AS-Rens ne saurait ignorer les risques liés à la gestion du personnel sur la sécurité de l’information et du personnel lui-même
De son côté, l’autorité indépendante de surveillance du SRC, l’AS-Rens, nous a confirmé suivre la situation de près. Même si la gestion du personnel ne relève pas directement de sa compétence.
"L’AS-Rens ne saurait ignorer les risques liés à la gestion du personnel sur la sécurité de l’information et du personnel lui-même", précise Prisca Fischer, la présidente de l’AS-Rens. "Notre autorité prend très au sérieux les enjeux de la transformation et espère vivement que la nouvelle structure sera bientôt en place, ce qui constituerait enfin un nouveau départ dans des bonnes conditions pour un grand nombre de personnes".
Marc Menichini
La direction du SRC se veut rassurante
Le directeur du SRC n'a pas voulu s'exprimer au micro. Mais les résultats du sondage ne semblent pas laisser Christian Dussey indifférent. "La direction du SRC note avec satisfaction que le personnel se montre attaché à la mission du service, et que les valeurs en la matière sont comparables à celles enregistrées au niveau de l'administration fédérale, nous a écrit une porte-parole de l'institution. La direction du SRC reconnaît aussi - avec une certaine préoccupation - que les points liés à la conduite ont été évalués de manière négative alors qu'ils sont cruciaux pour le fonctionnement du service", a précisé encore la communicante du SRC.
Cela étant, la nouvelle équipe dirigeante a bon espoir de rétablir la confiance et ramener le calme et la sérénité. Grâce justement à cette transformation de fond. Ce programme prévoit - entre autres - différentes mesures qui permettront au renseignement helvétique de gagner en agilité et en simplicité, ce qui devrait répondre aux inquiétudes des équipes, nous a écrit la porte-parole du SRC. Parmi les mesures envisagées ou déjà en vigueur, il y a notamment la simplification des processus de travail, le regroupement des équipes selon les missions, ou encore des contacts plus directs entre la direction et les collaborateurs.
Le Département fédéral de la défense (DDPS), de son côté, déclare suivre la situation de près, tout en ajoutant par la voix d'une de ses porte-paroles que "les réorganisations suscitent toujours de l'inquiétude auprès des collaborateurs".