Modifié

Le retour du protectionnisme "est très inquiétant pour un pays comme la Suisse", affirme Hélène Budliger

L'invitée de La Matinale (vidéo) - Helene Budliger Artieda, directrice du Secrétariat d'État à l'économie (SECO)
L'invitée de La Matinale (vidéo) - Helene Budliger Artieda, directrice du Secrétariat d'État à l'économie (SECO) / La Matinale / 14 min. / le 27 mai 2024
Hélène Budliger Artieda, secrétaire d’Etat à l'économie, a fait le bilan des accords bilatéraux conclus avec l’Inde, ainsi que ceux en discussion avec l'Union européenne lundi dans La Matinale de la RTS. Elle exprime aussi ses préoccupations face à une possible résurgence du protectionnisme mondial.

La Suisse gagne un franc sur trois à l'extérieur. Pour sa prospérité, elle a donc intérêt à développer des accords de libre-échange, explique Hélène Budliger Artieda. "C'est notre futur, celui de nos enfants et de nos petits-enfants", souligne la numéro deux du Département fédéral de l'économie, après Guy Parmelin.

Les tensions entre la Chine et les Etats-Unis se sont intensifiées ces dernières semaines; des deux côtés, des actions défensives commerciales ont été prises. Le président américain Joe Biden a notamment interdit l’importation de certains produits chinois, et son homologue chinois Xi Jinping en a fait de même. Ces événements semblent marquer un retour vers le protectionnisme dans les relations internationales, ce qui inquiète la secrétaire d’Etat.

>> Lire : Les Etats-Unis annoncent une hausse importante des taxes douanières vis-à-vis de la Chine

"Nous avons légèrement perdu notre accès au marché américain. De plus, Bruxelles commence à introduire des restrictions sur le thème du climat et de la biodiversité. Ceci est très inquiétant pour la Suisse: le multilatéralisme commercial ne fonctionne plus aussi efficacement qu'auparavant", déplore-t-elle.

En raison de la résurgence du protectionnisme, les accords bilatéraux deviennent de plus en plus importants pour la Suisse

Hélène Budliger Artieda, directrice du Seco

Dans ce contexte, Hélène Budliger Artieda souligne que les entreprises suisses savent se défendre correctement. Elle observe cependant que plusieurs votations populaires ont reflété une certaine insatisfaction des citoyens envers l’économie, suggérant une tendance à être moins libéraux. "Cela m'intrigue, parce que je me demande comment nous allons faire pour garder nos acquis. Mais j'espère que l'économie sera à la hauteur et qu'elle trouvera des réponses", commente-t-elle.

Accords-cadres avec l'Union européenne

Dans le dossier brûlant des accords-cadres avec l'Union européenne, Hélène Budliger assume un rôle de modératrice. Le succès de celui-ci repose en grande partie sur une bonne entente entre les syndicats et le patronat. "La protection des salaires, c'est quelque chose que nous devons absolument réussir (...). Mais le point de départ n'est pas mauvais, car le Conseil fédéral affirme qu’il est nécessaire de les protéger et les partenaires sociaux sont d’accord sur ce point", déclare la secrétaire d’Etat.

Cependant, la situation actuelle reste complexe. Selon la cheffe du Secrétariat à l'économie (Seco), les mesures d’accompagnement sont actuellement au cœur du dossier: "C'est très technique et tous les partenaires sociaux sont à la table."

Il est possible qu’à un moment donné, le ministre de tutelle Guy Parmelin ou la secrétaire d’Etat elle-même, doivent prendre une position plus ferme pour faire avancer les choses et imposer la volonté du Conseil fédéral. "Mais pour le moment, ce n'est pas le cas. Je reste optimiste quant à la possibilité que l'on puisse tous se mettre d'accord", précise Hélène Budliger Artieda.

L'accord de libre-échange avec l'Inde

Selon Hélène Budliger Artieda, l'accord de libre-échange avec l'Inde et les pays de l'AELE représente une belle victoire pour la Suisse, la Norvège, le Liechtenstein et l'Islande: "Nous sommes les premiers pays d’Europe, voire de l’Occident, à avoir réussi à signer un tel accord avec l’Inde. J'en suis fière, bien que cela ait nécessité beaucoup de travail."

Il est essentiel de reconnaître que l’Inde est actuellement le pays le plus peuplé, avec une population majoritairement jeune en constante croissance, ce qui en fait un marché d’avenir, et donc "bénéfique pour notre économie", estime la diplomate.

Lors des négociations d'un accord-cadre, nous exigeons des pays un langage clair sur les Accords de Paris, le climat et la biodiversité

Hélène Budliger Artieda, directrice du Seco

La durabilité est un aspect essentiel des accords de libre-échange et c’est une préoccupation que le gouvernement suisse prend très au sérieux, affirme Hélène Budliger Artieda. Lors des négociations, un chapitre sur la durabilité est toujours inclus, souligne-t-elle.

Et puisque la durabilité ne se résume pas qu'aux questions environnementales, mais concerne également l'équité sociale et économique, les accords de libre-échange doivent être bénéfiques pour tous les secteurs de la société et ne pas compromettre notre capacité à répondre aux besoins des générations futures, affirme-t-elle.

Interview radio: Delphine Gendre

Adaptation web: MIroslav Mares

Publié Modifié