Il y a 25 ans, les sirènes retentissaient un peu partout en Suisse. Avec ses vents à plus de 250 km/h, la tempête Lothar a fait tomber les arbres comme des dominos en Suisse au lendemain de Noël.
Au total, 14 personnes ont été tuées et, par la suite, 17 propriétaires fonciers et deux personnes travaillant dans des entreprises forestières publiques ont également perdu la vie lors des travaux de déblayage.
"Lothar nous a fait prendre conscience des dégâts que peuvent causer les événements extrêmes. Sur le Plateau, l'ampleur était sans précédent", souligne Thomas Wohlgemuth, de l'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL).
On a essayé de construire des forêts plus mélangées, avec différentes essences et différents âges
"Trop d'épicéas"
Après le drame, des voix critiques se sont fait entendre: les forêts suisses étaient mal structurées et fragiles avec trop d'épicéas. L'épicéa n'est pas indigène sur le Plateau, rappelle le WSL. Il n’est pas seulement vulnérable aux tempêtes hivernales et aux scolytes, mais souffre également de la chaleur et de la sécheresse.
"Depuis, on a essayé de construire des forêts plus mélangées, avec différentes essences et différents âges. Cela permet de mieux résister aux tempêtes et au changement climatique", explique Valentin Queloz, chef de groupe "protection de la forêt suisse" à WSL.
Espèces plus résistantes
Dès lors, les épicéas sont devenus nettement plus rares sur le Plateau. Sur de nombreuses surfaces, plusieurs essences feuillues ont repoussé naturellement, parmi lesquelles des espèces résistantes au changement climatique, comme le chêne, le merisier, l'érable sycomore et l'érable plane. On y trouve aujourd'hui des arbres de 10 à 20 mètres de haut.
Grâce à Lothar, de nombreuses forêts ont offert de nouveaux habitats à nombreuses espèces animales et végétales. La diversité des insectes a notamment explosé. Cet effet positif sur la biodiversité a certes diminué progressivement lorsque les arbustes et les arbres ont envahi les surfaces précédemment ravagées, mais il a persisté 20 ans après la tempête.
Après la tempête, les ravageurs
Pour autant, la vie de la forêt suisse n'a pas été un long fleuve tranquille. Après la canicule de 2003, les pullulations de scolytes (de petits coléoptères) ont causé des dégâts équivalant à près des deux tiers de ceux provoqués par la tempête.
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Lorsque de violentes bourrasques s’abattent sur un grand massif forestier, il s'ensuit en effet presque toujours une prolifération de ces insectes ravageurs dans les peuplements riches en épicéas pendant quelques années, explique le WSL.
Dans les années à venir, des tempêtes plus fortes que Lothar semblent difficilement concevables en Europe, mais elles ne sont pas exclues en raison du réchauffement climatique, prévient enfin le WSL.
ats/doe
Coup dur pour l'industrie du bois
Dans les années qui ont suivi le passage de Lothar, l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) a chiffré le total des dégâts à 1,35 milliard de francs; 600 millions de francs pour les constructions et 750 millions de francs pour la forêt. Au total, 2% des arbres en Suisse ont été renversés ou pliés.
Les cantons de Berne, Fribourg, Lucerne et Nidwald ont été les plus touchés par l'ouragan. Les pointes de vent ont atteint jusqu'à 272 km/h.
Moitié moins de scieries
Le marché du bois, lui aussi, a été fortement touché. Le prix des grumes a par exemple chuté d'environ un tiers au printemps 2000 en raison de l'offre excédentaire.
Et aujourd'hui? "Depuis 1999 à aujourd'hui, la moitié des scieries ont disparu", note Mickael Gautschi, directeur d'Industrie du bois suisse (IBS). Cela signifie donc une baisse de capacité.
Ce dernier n'est pas très optimiste: "Je ne suis pas sûr qu'en cas de nouvel ouragan, on sera plus rapide que la dernière fois" pour traiter le bois excédentaire, avertit-il.