Melchior Lengsfeld: "L'aide à l'Ukraine ne doit pas se faire au détriment des pays pauvres"
"Cette aide importante (à l'Ukraine, ndlr) ne doit pas être faite au détriment des pays les plus pauvres et c'est ce qui se profile un peu", expose Melchior Lengsfeld au micro de la RTS en évoquant les financements extraordinaires qui auraient pu être mobilisés, mais que le Parlement a refusés début mars.
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"Ce serait terrible que les pays pauvres rechutent dans plus de pauvreté parce qu'on aide l'Ukraine", insiste l'invité de La Matinale. "Il faut trouver un bon équilibre et c'est aussi parce que la situation dans ces pays concerne la Suisse: la stabilité et la sécurité en Suisse ne sont pas possibles sans un monde stable et en paix"
"La Suisse n'est pas une île"
Le directeur de l’organisation suisse de coopération au développement et d’aide humanitaire félicite la solidarité de la population helvétique dans les crises et pour la pauvreté dans le monde qui a "toujours été forte". "Les Suisses sont généreux", souligne-t-il. "On le voit dans les dons (...) et dans les enquêtes." Tous les ans, des enquêtes demandent s'ils seraient prêts à financer plus de coopération et "une bonne majorité soutient plus d'aide internationale", poursuit-il.
Contribuer à la stabilité et à la sécurité dans le monde a des répercussions sur la Suisse
Melchior Lengsfeld estime que cette générosité s'explique par le fait que l'état du monde a des répercussions sur la Suisse. "Dans le monde globalisé, la Suisse n'est pas une île. Tout ce qui se passe dans le monde a aussi des répercussions chez nous. On l'a vu avec la crise du Covid et la guerre en Ukraine. Donc contribuer à la stabilité et à la sécurité dans le monde, c'est aussi une contribution à celles de la Suisse."
Et les bénéfices de cette coopération financière sont réels. "Quand on regarde la dernière génération, on voit que depuis les années 1990, la pauvreté extrême - soit les gens qui vivent avec moins de deux francs par jour - dans le monde a chuté de 30% à moins de 10%. Ceci est le résultat de bonnes politiques des gouvernements", décrit-il.
Propos recueillis par Delphine Gendre
Adaptation web: Julie Marty
Etre une ONG dans la bande de Gaza en pleine guerre avec Israël
Concernant la situation dans la bande de Gaza, Melchior Lengsfeld prévient qu'il est nécessaire que la communauté internationale fasse une action déterminée pour aider ces populations en détresse. Les conditions des ONG sur place sont "très difficiles", rappelle-t-il.
La pénurie de nourriture est "extrême", tout comme la difficulté à accéder à l'eau et aux soins, note le directeur d'Helvetas.
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La situation des humanitaires dans l'enclave palestinienne n'est pas meilleure que celle des populations, ajoute Melchior Lengsfeld. Leur sécurité est en danger, comme on l'a vu lundi avec le décès de sept humanitaires tués par une frappe israélienne.
Bien qu'Helvetas n'ait pas d'équipes à Gaza, l'ONG sait combien il est nécessaire de prendre "beaucoup de précautions". Elle le fait par exemple à Port-au-Prince à Haïti où elle est présente. "C'est très important que dans un conflit les acteurs humanitaires soient protégés", appui le directeur de l'organisation.