Partis, faîtières, assureurs, cantons: les principales réactions après l'annonce de la hausse des primes maladie
Les assurés "ne consomment pas trop", selon Elisabeth Baume-Schneider
Après l'annonce de la hausse des primes maladie, la ministre de la santé publique, Elisabeth Baume-Schneider, ne veut pas d'une cure d'austérité. Mais elle souhaite éviter les doublons dans le domaine de la santé.
Dans ce cadre, elle estime que le dossier électronique du patient (DEP) montrera de manière plus visible que la dernière prise de sang ne doit pas être répétée ou que réadresser le patient à un spécialiste n'est pas indispensable.
"Ce n'est pas que les assurés consomment trop, selon la Jurassienne. Il faut regarder les incitations négatives du côté du milieu médical." Et de rappeler que 19% de la population renonce à consulter pour des raisons financières. La ministre de tutelle incite toutefois les assurés à "consommer moins quand c'est possible et raisonnable pour la santé".
La directrice de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) Anne Lévy rappelle quant à elle que la Confédération prend déjà des mesures pour faire baisser les coûts. Elle mentionne notamment le contrôle des prix des médicaments, qui a permis des économies de 1,5 milliard de francs depuis 2012, mais aussi la promotion des génériques ou l'évaluation de la pertinence de certains traitements. Anne Lévy souligne qu'il faut d'une part maîtriser les coûts mais aussi assurer une bonne prise en charge.
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LES PARTIS - Un "choc" pour le PS, des "modèles alternatifs" demandés par le PLR
La gauche demande des mesures sociales pour faire face à l'importante hausse des primes d'assurance-maladie annoncée jeudi. Le PLR s'oppose à l'inverse à des mesures "socialistes".
Le PS se dit "choqué" de la nouvelle "explosion" des primes d'assurance-maladie, qui pèsera encore plus lourd sur la population. Les primes doivent à l'avenir être plafonnées et financées de manière plus solidaire, exige le parti à la rose.
Pour les Verts, le système est à bout de souffle. Le parti écologiste demande l'instauration immédiate de primes proportionnelles au revenu et à la fortune, conformément à une motion déposée au Parlement. "Ce dernier aura l'opportunité, probablement lors de la session d'hiver, de mettre enfin un terme au système injuste des primes par tête".
"Cela ne peut pas continuer ainsi", lance de son côté le PLR, qui note que la hausse des primes se fera sur le dos des familles et de la classe moyenne. Pour le parti de centre-droit, le financement uniforme des prestations ambulatoires et hospitalières, soumis au vote le 24 novembre, représente une solution concrète pour réduire les coûts de la santé tout en offrant une meilleure médecine aux patients.
Les libéraux-radicaux déplorent à ce titre que les dirigeants de l'UDC "se battent main dans la main avec les syndicats et le PS contre la réforme, en s'alignant de plus en plus sur des recettes socialistes". Le parti entend plutôt renforcer les modèles d'assurance alternatifs et soulager le porte-monnaie de la population au moyen de contrats pluriannuels, de franchises plus élevées, d'un approvisionnement intégré ou du dossier électronique du patient.
Partageant sa "vive inquiétude" par rapport à cette hausse, le Centre propose entre autres de renforcer les professions liées aux soins de premier recours, de promouvoir les réseaux de soins intégrés ainsi que les régions de soins suprarégionales ou encore de créer plus de transparence.
Enfin, interrogée, l'UDC a indiqué ne pas vouloir prendre position.
LES CANTONS - Sortir le 4e âge du système actuel?
L'importante augmentation des primes annoncée jeudi, qui a un effet majeur sur les subsides, va très fortement solliciter les budgets cantonaux, relève la Conférence latine des affaires sanitaires et sociales (CLASS). Le système de concurrence voulu par la LAMal ne fonctionne plus, estime-t-elle.
Lorsque de nombreux assurés changent de caisse pour tenter de limiter leurs dépenses en optant pour des assureurs proposant des primes plus avantageuses, ces derniers doivent à leur tour augmenter leurs primes l'année suivante, notamment pour reconstituer leurs réserves, avec le risque d'un nouvel exode d'assurés, soulignent les ministres des affaires sanitaires et sociales des cantons de Berne, Fribourg, Genève, Jura, Neuchâtel, Tessin, Valais et Vaud.
Parmi diverses mesures, les ministres latins proposent notamment à la Confédération d'étudier l'opportunité de mettre en place un nouveau financement pour les prestations du "4e âge". "L'accroissement des moyens pour faire face au vieillissement ne peut plus se concevoir via le système actuel des primes et des contributions des cantons", relèvent-ils.
Pour eux, une réforme en profondeur du système de santé est urgente, d'autant plus au vu du vieillissement de la population. La ministre vaudoise de la santé Rebecca Ruiz demande ainsi au Parlement fédéral de prendre "urgemment" des mesures pour contenir l'augmentation des primes maladie.
Lukas Engelberger, président de la Confédérence des directeurs cantonaux de la santé (CDS) et chef du département de la santé du canton de Bâle-Ville se montre lui pragmatique face à la croissance des primes. D'après lui, l'évolution des primes suit tout simplement celle des coûts. "Pour réduire la charge des primes, il faut donc aussi endiguer la croissance des coûts", déclare-t-il jeudi.
ASSOCIATIONS ET FAÎTIERES - "Repenser le système" de financement et "réduire les coûts"
La Société médicale de Suisse romande (SMSR) regrette la nouvelle hausse des primes annoncée jeudi, une nouvelle fois plus importante que la hausse réelle des coûts. Elle appelle à repenser le système de financement, "avec nuance".
"Le principe de solidarité absolue a atteint ses limites", affirme le président de la SMSR Philippe Eggimann. Selon lui, la part la plus coûteuse des soins (les 65 ans et plus et les hôpitaux) pourrait recevoir une part plus importante de financement public.
La faîtière des assureurs maladie Santésuisse estime que l'augmentation pour 2025 est "très douloureuse" pour les assurés. Elle juge très important d'introduire immédiatement des mesures de réduction des coûts. Sa directrice Verena Nold cite, parmi les mesures envisagées, la réduction des prix des médicaments et des analyses de laboratoire et une planification hospitalière suprarégionale.
Même son de cloche du côté de Curafutura. Pour la faîtière, il faut agir de toute urgence pour alléger la charge financière pesant sur les assurés, estime. Selon elle, la réforme du financement uniforme, soumise en votation le 24 novembre, permettra de réduire les coûts et de réaliser des économies à hauteur de 1 à 3 milliards de francs. Dans un communiqué publié jeudi, elle demande aussi une amélioration de la planification hospitalière au niveau suprarégional. Avec 278 hôpitaux, la Suisse compte nettement trop d'établissements.
Pour l'Organisation suisse des patients (OSP), l'augmentation des primes représente avant tout une charge importante pour les ménages. De son point de vue, tous les acteurs doivent être responsabilisés. Les profiteurs du système sont fortement incités à fournir le plus de prestations possible, mais sans transparence quant à leur utilité pour les patients, a indiqué l'OSP. Trop de personnes gagnent de l'argent grâce à ce système et les payeurs de primes en souffrent, dénonce l'organisation.
ther avec ats
Certains chiffres "inexplicables", selon Jacques Gerber
Avec 8,9% de hausse, le canton du Jura voit ses primes maladie augmenter sensiblement plus que la moyenne nationale (+6%).
Invité jeudi de l'émission Forum, Jacques Gerber, ministre de l'Economie et de la Santé jurassien, a jugé qu'une partie de cette augmentation n'était pour l'instant pas expliquée.
"On est plus ou moins d'accord avec certaines explications de la Confédération. La première, c'est l'effet du vieillissement. Dans le Jura, nous avons 15% en plus de personnes de plus de 65 ans. On estime donc qu'entre un tiers et 40% de cette augmentation est dû à ce phénomène purement structurel (...) pour le reste, on a une augmentation des coûts des médicaments qu'on n'arrive pas à expliquer", juge-t-il.
L'élu PLR ajoute avoir du mal à comprendre également l'augmentation du coût calculé dans les EMS du canton. "Notre indicateur PLAISIR (méthode d’évaluation des soins requis en EMS avec tous les assureurs, ndlr), qui est un indicateur reconnu, nous amène à 5% d'augmentation. La Confédération nous parle de 20%. C'est inexplicable", détaille-t-il.