"Les primes à la charge des assurés s'élèvent au maximum à 10% du revenu disponible." A priori précis, le texte de l'initiative du PS laisse en réalité une grande marge de manœuvre au Parlement.
En cas d'acceptation le 9 juin, les élus fédéraux devront décider comment définir le "revenu disponible" et choisir la prime déterminante pour calculer la réduction. L'impact de l'initiative, ainsi que son coût, dépendront de ces choix.
Pour notre outil, nous avons retenu deux scénarios. Le premier calcule la réduction à partir de la prime standard (franchise de 300 francs, avec couverture accidents et libre choix du médecin). Le second utilise la prime moyenne effectivement payée par les assurés, qui reste nettement moins élevée.
Pour le revenu disponible, nous nous sommes appuyés sur la définition utilisée par la Confédération pour évaluer les coûts de l'initiative (méthodologie complète en fin d'article).
Résultats très différents selon les scénarios
Prenons une famille fribourgeoise, avec deux enfants, qui gagne 150'000 francs par an. Sa situation apparaît très différente selon l'alternative choisie.
Dans le premier cas, elle pourrait obtenir une réduction de 187 francs par mois, près de 2250 francs par an. En revanche, dans le second scénario, la famille ne toucherait rien. Ses primes atteindraient 9,1% de son revenu disponible.
Jusqu'à quel salaire pourrait-on bénéficier de subsides? Le plafond dépendrait fortement des choix du Parlement, comme le montre notre graphique ci-dessous.
Les Romands premiers bénéficiaires
L'impact de l'initiative serait aussi très différent d'une région à l'autre. Par exemple, une famille avec un enfant qui gagne 150'000 francs par an à Genève dépasserait déjà le plafond de 10% du revenu disponible dans le second scénario. Elle obtiendrait ainsi une réduction de quelques centaines de francs par an et ne verrait plus sa facture augmenter à l'avenir.
La même famille à Uri serait très loin de toucher des subsides. Ses primes atteindraient 6,1% de ses gains, comme celles-ci restent beaucoup moins chères à Uri qu'à Genève.
L'initiative bénéficierait en premier lieu à la classe moyenne des cantons aux primes les plus élevées du pays, c'est-à-dire les Tessinois, les Bâlois et la plupart des Romands, quelles que soient les définitions adoptées par le Parlement.
Réductions et coûts de plus en plus importants
Les chiffres présentés ici se basent sur les primes maladie de cette année. Comme celles-ci augmentent plus vite que les salaires, les ménages proches de la limite des 10% l'atteindraient probablement au bout de quelques années. De plus en plus de personnes profiteraient de réductions au fil du temps.
Cela inquiète les opposants au projet. Selon l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), qui utilise dans son estimation la prime standard (premier scénario), la mise en œuvre du texte coûterait entre 3,5 et 5 milliards de francs par an à la Confédération et aux cantons. Son financement, encore incertain, pourrait entraîner une hausse d'impôts ou de la TVA. Une facture qui s'alourdirait chaque année, tant que la hausse des primes se poursuit.
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Valentin Tombez
Méthode
Comme le "revenu disponible" et les "primes à la charge des assurés" ne sont pas définis par l'initiative, nous nous sommes basés sur les définitions utilisées par l'OFSP dans son estimation des coûts de l'initiative.
"Revenu disponible": il s'agit du salaire net (sans les charges sociales), plus 20% de la fortune nette, moins des déductions de 7000 francs par enfant mineur et de 3500 francs pour les familles monoparentales. A noter que les initiants préconisent de se baser sur le revenu imposable, c'est-à-dire avec davantage de déductions, et que la fortune serve de plafond. Leur approche réduit le revenu disponible et augmente ainsi les réductions de primes.
"Primes à la charge des assurés": l'OFSP utilise la prime standard (franchise de 300 francs, avec couverture accidents et libre choix du médecin). Comme celle-ci est peu répandue dans la population, car très onéreuse, et qu'il semble peu probable que le Parlement la choisisse en cas d'acceptation du texte, nous avons ajouté un deuxième scénario qui détermine la réduction selon la prime moyenne des assurés d'un canton. Le canton de Vaud, qui a mis en oeuvre un projet relativement similaire, se base aussi sur la prime moyenne cantonale pour calculer les subsides.
Pour rappel, en cas d'acceptation du texte, ce sera au Parlement de définir les déductions qu'il prend en compte sur le revenu et la prime déterminante pour le calcul de la réduction.