"L'armée a un problème de liquidité d'un montant de 1,4 milliard, c'est-à-dire 800 millions pour l'année en cours, 400 l'année prochaine et 200 en 2026, que l'on va devoir absorber", explique dans le 19h30 Thomas Süssli.
Selon lui, cette situation n'a rien d'inhabituelle: "Ça a toujours été le cas. On a toujours eu des engagements plus élevés que les crédits à disposition." Thomas Süssli réfute toute mauvaise planification économique de la part de l'armée. "C'est le Parlement qui décide le montant du budget que nous avons à disposition. Il définit aussi le cadre pour les dépenses, et c'est l'administration qui gère tout ça. C'est standard pour nous, c'est une routine."
Fin décembre, le Parlement a décidé de repousser de 2030 à 2035 l’augmentation du budget de la défense à 1% du PIB. "Cela signifie un manque d'environ 11,7 milliards", calcule le chef de l'armée. Il n'en veut toutefois pas au législatif fédéral: "Le Parlement décide sur la base des finances fédérales, et en ce moment, elle sont tendues, ce que l'armée comprend."
"Je me sens tout à fait soutenu par le département"
Ce "problème de liquidité" ne va pas poser problème pour l'achat des avions de chasse, assure encore Thomas Süssli. "Les moyens pour les F-35 sont budgétés en contrat avec les Américains. Ce plan de financement a la priorité, et on s'y tiendra."
La conseillère fédérale en charge de la Défense Viloa Amherd s'est montrée jusqu'ici très discrète (voir encadré) sur la polémique, laissant le soin à Thomas Süssli de s'exprimer. Pour autant, ce dernier ne s'estime pas laissé à son sort: "Je me sens tout à fait soutenu par le département dans ce processus. L'année passée, nous avons présenté un rapport. La Planification de l'armée et le département nous ont soutenus."
Renégociation avec les fournisseurs
A la fin 2022, l'armée avait des engagements financiers ouverts d'environ 13 milliards de francs, a expliqué plus tôt dans a journée en conférence de presse Thomas Süssli. Pour l'année en cours, "nous pouvons payer toutes les factures".
Au cours des prochaines années, l'armée devra négocier avec les fabricants et les fournisseurs d'armement la manière dont les paiements pourront être effectués. Jusqu'en 2028, des livraisons tardives ne sont pas exclues.
Manifestations annulées
Jusqu'à cette année-là, l'armée ne pourra pas investir mais devra utiliser les moyens disponibles pour les engagements pris. Il s'agit maintenant de fixer des priorités, des processus sont en cours pour trouver des solutions. Pour l'instant, il n'a pas été décidé d'annuler des commandes pas encore payées.
L'armée a déjà décidé d'annuler certaines manifestations durant ces deux prochaines années, ce qui réduit les coûts de 3,5 millions. Les Forces aériennes auraient notamment dû se présenter à la fin août à Emmen (LU), les forces terrestres l'an prochain à Bière (VD).
La SRF a dévoilé mercredi soir que le budget de l'armée présentait un déficit de financement d'un milliard de francs. L'armée avait déjà annoncé la semaine dernière devoir annuler différents événements par mesure d'économie.
>> En lire davantage : Un trou d'un milliard de francs dans les finances de l'armée
asch avec ats
Une nouvelle polémique à traverser pour Viola Amherd
La ministre de la Défense Viola Amherd a préféré garder le silence jusqu'ici. La conseillère fédérale affronte une nouvelle polémique, après une année déjà chahutée. Viola Amherd est toutefois parvenue jusqu'ici a esquiver les attaques. Ses adversaires se disent déconcertés par sa facilité à traverser les tempêtes.
Le GSsA veut une enquête sur les dépenses de l'armée
Le Groupement pour une Suisse sans armée (GSsA) veut une enquête "complète et transparente" sur les finances de l'armée. Les agissements "peu scrupuleux" de l'armée ne passent plus, estime-t-il jeudi dans un communiqué.
"Les scandales intolérables de l'armée se multiplient à nouveau ces derniers temps. Il est inacceptable que l'armée s'en tire aussi bien", estime Kilian Bello, secrétaire du GSsA, cité dans le communiqué. "Imaginez que la même chose se produise par exemple dans le domaine de la santé, il y aurait un soulèvement politique".
Le fait que l'ampleur des difficultés financières de l'armée ait d'abord été passée sous silence et que ce n’est que grâce au travail de recherche de la SRF que le chiffre concret entourant ce scandale a été dévoilé démontre qu'il existe un véritable problème de transparence au sein de l’armée, critique le GSsA.