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Vers un non à la réforme de la LPP et à l'initiative sur la biodiversité, selon le deuxième sondage SSR

La réforme de la prévoyance professionnelle, soumise aux urnes le 22 septembre, divise les faîtières et les patrons
La réforme de la prévoyance professionnelle, soumise aux urnes le 22 septembre, divise les faîtières et les patrons / 19h30 / 2 min. / le 11 septembre 2024
Une courte majorité des Suissesses et des Suisses s'opposent à la réforme de la prévoyance professionnelle et à l'initiative sur la biodiversité soumises au vote le 22 septembre, selon le deuxième sondage SSR publié mercredi. En un mois, le non à ces deux objets s'est considérablement affermi.

Le 22 septembre, le peuple est appelé à se prononcer sur la réforme de la LPP. Ce projet complexe, qui prévoit entre autres un abaissement du taux de conversion de 6,8% à 6% - le pourcentage qui détermine le montant minimal de la rente par rapport au capital accumulé - et une baisse du seuil d'accès au deuxième pilier, est désormais rejeté par 51% de la population (+12 points), montre le deuxième sondage SSR réalisé par l'institut gfs.bern.

Le non à l'initiative "Pour l'avenir de notre nature et de notre paysage" est lui aussi devenu majoritaire (51%, +8 points). Ce texte, qui demande aux pouvoirs publics d'affecter plus de surfaces et d'allouer plus de moyens financiers à la sauvegarde et au renforcement de la biodiversité, recueillait encore plus de la moitié d'intentions de vote favorables lors de la première enquête diffusée à la mi-août.

>> Lire aussi : Que penser de la révision du 2e pilier? Les grands enjeux d'une réforme complexe et L'initiative sur la biodiversité est-elle essentielle pour protéger la nature ou trop extrême?

INITIATIVE SUR LA BIODIVERSITÉ: UN COMBAT GAUCHE-DROITE

Comme c'est traditionnellement le cas pour les initiatives, les partisans du texte sur la biodiversité ont perdu du terrain au fil de la campagne tandis que les opposants ont renforcé leur position. Au niveau de l'affiliation partisane, cette tendance se traduit par une accentuation du clivage gauche-droite qui prévalait déjà il y a un mois. Le non s'est particulièrement renforcé parmi les sympathisants de l'UDC (84% de non, +12 points), du PLR (78%, +7) et du Centre (61%, +5).

A gauche, on constate le phénomène inverse avec un affermissement, ou au moins une stagnation, des intentions de vote favorables. Nonante-cinq pour cent de l'électorat des Verts soutient l'initiative, comme lors du premier sondage. Le oui grimpe légèrement à 86% pour le PS (+1 point) et à 70% chez les Vert'libéraux (+3 points). Le rapport de force est resté quasi inchangé chez les électeurs ne se reconnaissant dans aucun parti (51% de oui contre 41% de non).

Le oui des villes et le non des champs

La Suisse romande est la seule région linguistique à accorder, de justesse, une majorité à l'initiative sur la biodiversité (53% de oui). Comme partout ailleurs, la tendance est toutefois au renforcement des opposants au texte (43% de non, +8 points). En Suisse italienne, les deux camps sont au coude-à-coude (47% de oui contre 48% de non), mais la tendance est clairement négative. En Suisse alémanique, le non est devenu majoritaire (54% de non, +7 points).

Le sondage SSR met aussi en évidence une profonde opposition entre villes et campagnes. Ces dernières sont farouchement opposées à l'initiative (63% de non, +9 points). A l'inverse, malgré un soutien en recul, le texte continue de réunir une courte majorité des habitants des petites et moyennes agglomérations (50% de oui, -3 points) et des grandes villes (52% de oui, -4 points).

La tendance au non devrait continuer

Autre enseignement du sondage, les hommes sont beaucoup plus enclins à rejeter l'initiative que les femmes. Ils sont désormais 57% à dire non (+4 points) contre 41% à dire oui (-3 points). Les intentions de vote des femmes sont quasi inverses à celles des électeurs masculins avec 54% de oui contre 43% de non. Mais chez elles aussi, le rejet est en net progrès (+8 points).

Pour les auteurs de l'étude, le camp du oui n'a pas réussi à convaincre durant la campagne de la nécessité de son initiative, malgré la forte sensibilisation de la population aux problèmes environnementaux. La tendance générale au non devrait donc se poursuivre d'ici au 22 septembre, notent gfs.bern, qui voit dans le refus de l'initiative "le scénario le plus vraisemblable". La majorité des électeurs s'attendent d'ailleurs eux aussi à un rejet du texte, précise l'institut.

RÉFORME DE LA LPP: TENDANCE AU NON INHABITUELLE

En général, les initiatives perdent du terrain au fil de la campagne. C'est beaucoup plus rare pour un projet émanant du Parlement et soutenu par les autorités. C'est pourtant ce qui semble arriver à la réforme de la prévoyance professionnelle (LPP). Le deuxième sondage SSR montre que la défiance gagne une grande partie des personnes qui se déclaraient auparavant indécises et même celles qui étaient favorables au projet.

>> Les explications de Martina Mousson dans le 12h30 :

Le comite unitaire vaudois contre la revision de la prévoyance professionnelle (NON a LPP21) manifeste lors d'une action à Lausanne. [Keystone - Laurent Gillieron]Keystone - Laurent Gillieron
L'initiative biodiversité et la réforme de la LPP auraient été refusées il y a une semaine, selon un sondage SSR / Le 12h30 / 1 min. / le 11 septembre 2024

Ce mouvement touche toutes les forces politiques. Même les sympathisants libéraux-radicaux, pourtant champions du oui, voient leur soutien s'effriter quelque peu face aux coups de butoir de la gauche et des syndicats (66% de oui, -2 points). Les électeurs du Parti vert'libéral (56% de oui, -14 points) et du Centre (50% de oui, -13 points) restent eux aussi majoritairement fidèles au projet, mais l'avance du oui a fondu comme neige au soleil.

Les partis de gauche et les syndicats n'ont pas seulement réussi à faire douter les électeurs de droite; ils ont surtout réussi à convaincre leur base, si l'on en croit les résultats du sondage. Plus de trois quarts des socialistes sont aujourd'hui opposés au projet, soit une hausse de 25 points en un mois. Chez les Verts, l'évolution est la même avec un rejet qui atteint 64% (+26 points). Le non a également pris le dessus au sein de l'électorat indépendant (61%, +22 points)

Le camp du oui bat en retraite dans toutes les régions

Il y a un mois, la majorité des Suisses alémaniques et des italophones se prononçaient en faveur de la réforme du deuxième pilier. Cette avance a disparu et, dans ces deux régions, les deux camps sont désormais quasi à égalité. L'offensive des opposants se fait également sentir en Suisse romande, où six votants sur dix se déclarent opposés au texte, en hausse de 17 points par rapport au premier sondage. Le oui recule de dix points à 30%.

Bien que moins nombreuses chez les jeunes, les défections touchent toutes les classes d'âge. Les seniors acceptaient par exemple le projet en début de campagne, mais le refusent aujourd'hui (52% de non, +13 points). Les plus critiques sont les personnes de 40 à 64 ans qui disent non à 56% (+14 points). Aucune majorité ne se dégage pour l'heure chez les 18-39 ans (46% de oui, 42% de non), malgré une importante poussée des opposants (+10 points).

L'"arnaque à la LPP", argument phare du non

Une très grande majorité de la population est convaincue par l'argument principal du camp du oui selon lequel le projet améliore la situation des bas revenus, et notamment celle des femmes, relèvent les auteurs du sondage. Pourtant, cette adhésion ne se traduit pas dans les intentions de vote. C'est plutôt l'argument de l'"arnaque à la LPP" - "payer plus pour toucher moins" - mis en avant par le camp du non qui semble avoir fait mouche au sein de l'électorat, ajoute gfs.bern.

Le non masculin (50%) à la réforme de la LPP a ainsi grimpé de 12 points au cours de la campagne, tandis que l'opposition féminine a crû de 15 points (53%), montre le sondage. Il en va de même en ce qui concerne les niveaux de formation. C'est particulièrement visible chez les personnes qui disposent d'un niveau de formation élevé, qui étaient majoritairement favorables au texte il y a un mois et qui y sont à présent opposés (50% de non, +13 points).

Une tendance "pratiquement impossible à inverser"

La tendance au non - "exceptionnelle" pour un projet issu du Parlement -, assortie à la complexité de la réforme - qui instaure un "climat d'anxiété" quant aux conséquences financières personnelles -, est "pratiquement impossible à inverser", souligne gfs.bern dans ses commentaires. C'est pourquoi les auteurs de l'enquête estiment que le rejet du texte dans dix jours est le scénario "le plus vraisemblable".

Didier Kottelat

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Méthode

Deuxième session de l’enquête Trend SRG-SSR sur les votations du 22 septembre 2024, réalisée par l’Institut de recherche gfs.bern entre le 26 août et le 4 septembre 2024 auprès de 13'979 titulaires du droit de vote. La plage d’erreur statistique est de +/- 2,8 points de pourcentage.