"Sur le trajet de l'immigration, la femme n'est rien"

De nombreuses femmes migrantes subissent des violences sexistes et sexuelles du départ à l’arrivée de leur voyage. Témoignages
De nombreuses femmes migrantes subissent des violences sexistes et sexuelles du départ à l’arrivée de leur voyage. Témoignages / 19h30 / 4 min. / hier à 19:30
"Je me suis retrouvée dans un trafic et me suis rendu compte que j'étais sa marchandise": l'exilée camerounaise Rose Monde et deux autres femmes issues de la migration racontent dimanche dans le 19h30 les violences sexuelles et sexistes qu'elles ont subies dans leur pays, sur la route ou en Suisse.

Fuyant son époux violent, Sara* a quitté le Moyen-Orient avant de trouver refuge dans notre pays. Elle vit encore aujourd'hui dans la peur d'être retrouvée.

Sa demande de divorce lui a presque coûté la vie. "Mon ex-mari est venu à la maison avec une arme et il nous a menacés, moi et mes enfants. Heureusement, nous avons pu nous s'enfuir", confie-t-elle. "J'ai changé de maison, de travail, mais cela ne changeait rien. Nous n'étions jamais en sécurité. J'ai donc quitté mon pays."

On te viole pour te rappeler que tu es une femme

Rose Monde, réfugiée camerounaise

Persécutée pour son homosexualité, Rose Monde a, elle aussi, pris la route de l'exil. Son périple du Cameroun vers l'Europe a été marqué par l'exploitation sexuelle. Son passeur l'a forcée à se prostituer pour rembourser sa dette.

"Je savais que si je ne faisais pas ce qu'il me demandait, je pouvais mourir", raconte-t-elle. "Je me suis retrouvée dans un trafic et me suis rendu compte que j'étais sa marchandise. Il m'a eu plus ou moins gratuitement et a commencé à me revendre. Sur le trajet de l'immigration, la femme n'est rien. Et quand tu es quelqu'un comme moi, c'est pire: on te viole pour te rappeler que tu es une femme", dit-elle.

Une vulnérabilité qui ouvre la voie à l'exploitation

Arrivée en Suisse, Rose Monde a trouvé du soutien auprès de l'association Astree, qui accompagne les personnes victimes de traite.

"La migration forcée est un facteur de vulnérabilité propice à l'exploitation", note Angela Oriti, la directrice et cofondatrice de cette organisation d'aide.

Je me suis souvent arrêtée devant le poste de police, mais je savais que si j'y entrais, c'est moi qui allais perdre

Darlyn, migrante équatorienne

"Ces femmes cherchent des solutions pour passer d'un pays à l'autre pour se mettre en sécurité et ont besoin d'un lieu d'hébergement. Certaines personnes proposent de telles solutions, mais avec l'intention de les forcer à des activités telles que la prostitution", développe-t-elle.

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La violence conjugale en Suisse

Darlyn a pour sa part subi des viols et des coups une fois installée dans notre pays. L'Equatorienne n'est pas issue de la migration forcée, mais son permis de séjour ne l'a pas pour autant protégée de son ex-mari. Il la menaçait de la dénoncer pour mariage blanc si elle se rendait à la police.

"Cela me faisait vraiment peur. Je me suis souvent arrêtée devant le poste de police, mais je savais que si j'y entrais, c'est moi qui allais perdre", confie-t-elle.

Darlyn s'engage désormais pour soutenir d'autres survivantes, en participant à la formation "multiplicatrice" de la Fondation Surgir.

"Je pense qu'il est très important de se rendre compte à quel point on peut être résiliente", souligne-t-elle. La trentenaire a réussi à surmonter l'horreur du passé et s'est remariée. "Aujourd'hui, je suis heureuse, je suis épanouie comme jamais. J'ai mes chats et mon mari. C'est vraiment le bonheur à la maison", déclare-t-elle.

*Prénom d'emprunt

Sujet TV: Clémence Vonlanthen

Adaptation web: Antoine Michel

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