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Simonetta Sommaruga au DFJP, le PS fulmine

Le PS n'est pas satisfait de l'arrivée de Sommaruga au DFJP.
Le PS n'est pas satisfait de l'arrivée de Simonetta Sommaruga au DFJP.
Le Parti socialiste est en colère après l'annonce de la répartition des dicastères fédéraux. Selon lui, en héritant de Justice et Police, Simonetta Sommaruga a été "victime d'une action punitive" qui "laisse mal augurer de la cohésion du gouvernement". L'UDC évoque quant à elle une manoeuvre des partis du centre.

A peine annoncée, la répartition des départements fédéraux suscite colère et polémique. Lundi, alors que les deux nouveaux élus au Conseil fédéral pouvaient envisager de reprendre les ministères des démissionnaires Leuenberger et Merz, ils se sont retrouvés pris dans un remaniement qui a vu quatre départements changer de patron.

Les socialistes sont particulièrement remontés: leur nouvelle élue Simonetta Sommaruga a hérité du Département de justice et police (DFJP) "pour la marginaliser". Emoi sous la Coupole, relayé par l'UDC. Les deux partis se sentant floués par les formations du centre droit.

"Menteur"

Le président du Parti socialiste (PS) notamment est très fâché contre son homologue du Parti libéral-radical (PLR) Fulvio Pelli. Christian Levrat n'a pas hésité à le traiter de "menteur". En cause, les promesses que le Tessinois aurait faites concernant la répartition des départements.

A plusieurs reprises, les derniers jours avant l'élection au Conseil fédéral, Fulvio Pelli a fait savoir au PS qu'il n'avait pas de crainte à avoir concernant le dicastère dont hériterait Simonetta Sommaruga vu qu'elle ne serait pas la dernière à exprimer un choix.

"Diktat des partis bourgeois"

"Arrête ce cirque, si quelqu'un à un problème, c'est Johann Schneider-Ammann", aurait dit le président du PLR, a affirmé à l'ATS Christian Levrat. "On savait que le Tessinois usait de manoeuvres tactiques mais pas qu'il était un menteur invétéré". Fulvio Pelli n'a pas manqué de réagir (lire ci-contre).

Le Fribourgeois évoque un "diktat" des partis bourgeois" pour marginaliser Simonetta Sommaruga, "par peur de sa popularité". Selon lui, le coup a été porté par la présidente de la Confédération Doris Leuthard. Le président du PS s'en remet désormais à la réaction de la population. "Je me réjouis de voir". Son parti, qui a toujours eu les rênes du Département fédéral des finances (DFF) ou du Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC), ne s'est jamais retrouvé dans une telle situation, a-t-il rappelé.

"S'agissant d'un enjeu aussi central, il n'est pas compréhensible qu'une solution consensuelle n'ait pu être trouvée et que la règle de l'ancienneté n'ait pas prévalu", écrit le Parti socialiste dans un communiqué. Et de regretter qu'il ait en définitive fallu un choix à la majorité pour "contraindre" Simonetta Sommaruga à reprendre le DFJP.

"Visiblement, les petits calculs et les stratégies politiciennes à court terme ont pris le pas sur la coopération et la stabilité nécessaires". "En l'occurrence, la présidente de la Confédération Doris Leuthard a joué un rôle aussi prépondérant que discutable en plaçant son intérêt personnel au-dessus de tous les autres arguments et questions", estime encore le PS.

Le profil de Sommaruga "sous-exploité"

Cité dans le communiqué du PS, le président du parti Christian Levrat juge "inadmissible que la majorité du Conseil fédéral et notamment sa présidente Doris Leuthard ne soit pas en mesure de contribuer à ce que chaque conseillère ou conseiller fédéral puisse au mieux exploiter ses compétences". Pour lui, l'Argovienne a joué un rôle "aussi prépondérant que discutable en plaçant son intérêt personnel au-dessus de tous les autres arguments et questions".

"En fonction de son expérience, de ses connaissances et du travail effectué au Parlement, Simonetta Sommaruga présentait un profil adéquat pour cinq des sept départements fédéraux. Et voilà qu'elle doit se résoudre à reprendre un des deux autres", conclut le Parti socialiste. La Bernoise, qui n'est pas juriste de formation, devra y affronter des questions faisant surtout le lit de revendications de l'UDC: asile, étrangers, criminalité. Elle aurait certainement préféré reprendre le DETEC.

L'UDC tire à boulets rouges

Eveline Widmer-Schlumpf
Eveline Widmer-Schlumpf

Pour l'UDC, la répartition des départements constitue "un coup de force dont l'unique but est de sauver le pouvoir des partis du centre". Dans un souci de stabilité du gouvernement, il aurait fallu attendre les élections générales au Conseil fédéral de l'année prochaine pour lancer une rocade aussi importante, précise le parti dans un communiqué.

Déplacer quatre conseillers fédéraux à une année des élections fédérales est "irresponsable". "Pour les partis du centre, inquiets devant leur faiblesse électorale, cette nouvelle répartition des départements est une tentative désespérée d'assurer leurs positions au gouvernement", analyse l'UDC.

Ces partis "montrent ainsi une fois de plus le peu de considération qu'ils ont pour la concordance". Eveline Widmer-Schlumpf est aussi vivement critiquée. "Elle quitte son département après moins d'une législature alors qu'il n'y avait pas de successeur avec une formation juridique", note l'UDC. "Son bilan se résume en des réorganisations sans fin et des changements de personnel".

Du côté des Verts, on critique une répartition "incompréhensible", qui va contre la stabilité au gouvernement. Les Verts sont "particulièrement préoccupés par la reprise du DETEC par Doris Leuthard, "championne de l'énergie nucléaire".

Le PDC renvoie le PS et le PLR dos à dos

Quant au président du PDC Christophe Darbellay, il renvoie dos à dos les présidents du PS Christian Levrat et du PLR Fulvio Pelli dans la polémique autour la répartition des départements fédéraux. "Je ne sais pas quelles promesses ils se sont faites", a déclaré le président du PDC lundi. La question de la répartition des départements a été abordée par le PLR, le PDC et le PBD lors d'entretiens. Mais aucun marché n'a été scellé, selon Christophe Darbellay.

Pour le reste, il rappelle avoir lui-même toujours réclamé que le DETEC retourne en mains bourgeoises et estimé que Doris Leuthard ferait une excellente ministre des infrastructures. Quant au Département fédéral de justice et police, dont hérite la socialiste Simonetta Sommaruga, ce n'est pas dicastère de second choix, selon le Valaisan.

Et d'aller jusqu'à affirmer que c'est une chance pour le PS que d'assumer des responsabilités et d'apporter des solutions sur des thèmes comme la violence des jeunes ou l'asile. "La sécurité, c'est le sujet numéro un". Si Simonetta Sommaruga ne voulait pas du tout de ce département, elle aurait dû le dire, selon le président du PDC.

ats/ap/boi/hof


"UN JOLI COUP DE FORCE",  SELON LE POLITOLOGUE PASCAL SCIARINI

En prenant le contrôle des départements clé, les partis de droite ont réussi un joli coup de force, selon le politologue genevois Pascal Sciarini. Ils coupent l'herbe sous les pieds des socialistes dans la perspective des élections fédérales de 2011. "Le Département fédéral de justice et police, qui cristallise les thèmes chers à l'UDC, est un véritable cadeau empoisonné pour le PS", a déclaré Pascal Sciarini.

Le politologue Pascal Sciarini livre son regard sur le vote
Le politologue Pascal Sciarini livre son regard sur le vote

"Le rôle de locomotive électorale de Simonetta Sommaruga est maintenant moins évident. Le PS va pouvoir jouer la carte de la frustration pour mobiliser ses électeurs, mais il aurait eu la tâche bien plus facile avec sa nouvelle élue au Département fédéral de l'environnement, des transports de l'énergie et de la communication (DETEC)."

Le politologue lausannois Andreas Ladner se montre en revanche plus circonspect. A ses yeux, le fait que Simonetta Sommaruga se retrouve à la tête du DFJP ne constitue pas une défaite pour les socialistes. "En tant que conseillère fédérale et en tant que personne, elle dispose d'assez de ressources pour se profiler."

Pour Pascal Sciarini, "si l'on extrapole", le résultat de la bataille autour des dicastères donne aussi une idée de la forme que pourrait prendre le gouvernement en 2011: une concordance restreinte à quatre partis de droite. "Le fait que la droite soit aujourd'hui si peu réceptive aux souhaits du PS présage peut-être d'une volonté de gouvernement plus cohérent, sans les socialistes."

Andreas Ladner doute en revanche que ce succès pour les partis du centre soit le début d'une entente durable, a-t-il indiqué. Et Claude Longchamp d'abonder. L'alliance du centre fonctionne au gouvernement, mais a la vie dure au Conseil national, selon le politologue bernois. "A la Chambre du peuple, le Conseil fédéral pourrait être de plus en plus souvent être opposé à une entente entre socialistes, Verts et UDC."

Quant à la cohésion du nouveau Conseil fédéral, Pascal Sciarini juge que cela "ne commence pas très bien". "La collégialité de Simonetta Sommaruga et le respect du partenariat social de Johann Schneider-Ammann avaient été mis en avant le jour de leur élection, et à la première occasion, on voit déjà apparaître des tensions."

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Le PLR et le PBD satisfaits

Pour le Parti libéral-radical (PLR), la nouvelle répartition au Conseil fédéral crée des "conditions cadres optimales". Johann Schneider-Ammann était la personne la mieux indiquée pour reprendre l'Economie, un département-clé pour l'avenir du pays, souligne le parti.

leur nouvel élu aura pour responsabilités de créer des conditions favorables à la création d'emplois et aux entreprises, de favoriser l'accès aux nouveaux marchés, notamment ceux d'Asie, ainsi que de consolider les accords bilatéraux.

Le président du Parti bourgeois-démocrate (PBD) Hans Grunder s'est montré très satisfait de la grande rocade au gouvernement.

Il admet que le PLR, le PDC et le PBD ont abordé la répartition des départements lors de leurs entretiens réguliers. Toutefois, les trois partis n'ont pas passé d'accord à ce sujet, a-t-il précisé.

"Comme le Conseil fédéral est seul responsable de la répartition des départements, nous n'avons fait aucune recommandation", a-t-il ajouté.

Les dicastères ont été attribués en fonction des "compétences et de l'expérience" des conseillers fédéraux, a par ailleurs déclaré le président des bourgeois-démocrates.

Pelli répond aux attaques de Levrat

Le président du PLR Fulvio Pelli a démenti lundi tout arrangement en vue de la répartition des départements. Il n'y a eu aucun accord, a-t-il déclaré à l'ATS.

Selon le principe d'ancienneté, Simonetta Sommaruga aurait dû exprimer son choix avant Johann Schneider-Ammann. Or la procédure a été d'une manière ou d'une autre court-circuitée.

"Le PS sait qu'il n'y a pas eu d'accord", a ajouté Fulvio Pelli, rejetant les accusations de Christian Levrat.