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"Pas une surprise", mais "pas une bonne nouvelle"

Le conseiller d'Etat vaudois Pierre-Yves Maillard dénonce une hausse choquante pour les jeunes.
Le conseiller d'Etat vaudois Pierre-Yves Maillard dénonce une hausse choquante pour les jeunes.
"Pas vraiment une nouvelle", "pas une surprise", "le seuil de la douleur": les réactions à la hausse de 6,5% des primes maladie annoncée par Didier Burkhalter sont souvent amères. Le fait que les cantons ne soient pas écoutés et l'attitude "presque méprisante" de l'OFSP, "incapable d'agir", sont aussi dénoncés.

Le ministre vaudois Pierre-Yves Maillard n'a pas tardé à réagir à l'annonce des primes maladie 2011. Le président de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé a déploré que l'Office fédéral de la santé publique n'écoute pas les cantons. Il a aussi pointé la hausse "choquante" des primes pour les jeunes adultes. La hausse de primes pour les 19-25 ans dépasse 10% pour la deuxième année consécutive alors que les coûts de ce groupe d'assurés sont stables, a dénoncé le conseiller d'Etat. La mesure est particulièrement injuste car elle frappe de plein fouet les familles et la classe moyenne, a-t-il estimé.

Pour la quatrième année consécutive, les primes vaudoises augmentent moins que la moyenne suisse. "C'est notre seul motif de satisfaction", a commenté Pierre-Yves Maillard. "L'OFSP n'a tenu aucun compte des demandes vaudoises de limiter les hausses", a-t-il conclu.

Les Romands en colère

Pierre-François Unger a dénoncé un débat "purement idéologique". [Martial Trezzini]
Pierre-François Unger a dénoncé un débat "purement idéologique". [Martial Trezzini]

Même si la hausse y est moins haute qu'outre-Sarine, les cantons romands ont aussi réagi aux augmentations. Le Jura affirme qu'il attend des changements urgents dans le domaine de l'assurance maladie et il appelle la Confédération à entreprendre des actions pour garantir une transparence des données et l'adéquation entre les coûts, les primes et les réserves par canton. "Les primes continuent d'augmenter de manière inégale et arbitraire entre les différents assureurs et entre les cantons", relève le Département jurassien de la santé. "On ne peut que constater l'incapacité de l'Office fédéral de la santé publique à agir", ajoute-t-il.

Très remonté, le ministre genevois de la Santé Pierre-François Unger se dit très en colère et dénonce l'attitude "presque méprisante" de l'OFSP. Depuis 2009, les coûts de la santé dans le canton n'ont pas augmenté et les réserves sont à 42%, soit trois fois le minimum légal, constate le conseiller d'Etat. Malgré tout, Genève a subi une hausse de 4,1% en 2010 et de 3,2% pour 2011. "C'est inconcevable et inadmissible", tempête l'élu PDC.

Le Valais a lui parlé d'augmentations de primes "non justifiées", en regrettant de ne pas avoir été entendu par l'OFSP. "Une habitude qui devient une tradition", a lancé le chef du département de la Santé Maurice Tornay, qui prône la suppression des réserves. Pour venir en aide aux assurés en difficulté, le canton prévoit d'augmenter son subventionnement de 14,2 millions de francs par rapport à l'an dernier.

Burkhalter trop passif

Didier Burkhalter espère désendetter totalement l'AI d'ici 2028. [Keystone]
Didier Burkhalter espère désendetter totalement l'AI d'ici 2028. [Keystone]

"C'est beaucoup et ce n'est pas vraiment une bonne nouvelle. Et la tendance haussière ne va pas s'arrêter", a de son côté réagi la Fédération romande des consommateurs Celle-ci se réjouit toutefois de certaines corrections qui s'opèrent. Les cantons qui subissent les hausses les plus importantes sont surtout des petits cantons qui avaient des primes trop basses, comme Nidwald, Obwald et Zoug, relève la FRC. "Cela montre que quand on arrête les subventionnements croisés, les corrections nécessaires se font naturellement".

On atteint le seuil de la douleur, en particulier pour les jeunes, les familles et les personnes à revenu modeste, estime la Fondation pour la protection des consommateurs. Mais cette tendance "se dessinait malheureusement": assureurs et politiciens ont pris trop peu de mesures correctrices. Didier Burkhalter, en particulier, est resté trop passif, selon l'organisation: "Il aurait pu prendre des mesures sans devoir s'en référer au Parlement". Concrètement, il y avait un potentiel de réduction des coûts dans les traitements hospitaliers ambulatoires ou dans la liberté de contracter pour les caisses.

Pour l'Union syndicale suisse, cette augmentation va alourdir considérablement le budget des ménages concernés et réduira leur pouvoir d'achat, ce qui aura une incidence négative sur la conjoncture. La Confédération et les cantons doivent donc réduire la charge représentée pour les bas et moyens revenus par ces primes en les réduisant.

Monsieur Prix pas surpris

Pour le Surveillant des prix Stefan Meierhans, on n'a pas encore suffisamment agi sur les coûts dans le domaine de la santé. La hausse des primes annoncée vendredi n'est "pas une surprise" pour lui. Monsieur Prix voit surtout un potentiel d'économies dans les prix des médicaments. On devrait, selon lui, introduire un système de prix imposés, comme il l'avait évoqué en juillet.

On fixerait uniquement le montant maximal que les caisses maladie doivent rembourser pour une substance active. Cela permettrait d'économiser des centaines de millions de francs. Stefan Meierhans saluerait en outre une "rénovation de la structure Tarmed". Une comparaison entre hôpitaux privés et publics devrait aussi permettre une diminution des coûts. "Nous voulons mener une analyse comparative l'année prochaine", a dit le Surveillant des prix. C'est notamment important pour la planification hospitalière.

ats/boi

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Santésuisse prudente, la FMH inquiète

Santésuisse, l'association des assureurs, a également réagi à cette augmentation. Dans le domaine de la santé, on ne peut faire l'économie de la vérité des coûts. Les primes doivent couvrir les coûts partout, a résumé son porte-parole Felix Schneuwly.

Pour lui, les réserves des assureurs maladie n'ont pas été prévues pour couvrir des déficits structurels mais pensées pour l'imprévu. Les réserves employées pour abaisser les primes devraient être compensées par les primes actuelles.

"La hausse est de nouveau extrêmement prononcée, ce qui pose le problème du système de santé", a de son côté commenté Jacques de Haller, président de la Fédération des médecins suisses. "La pression est telle qu'on ne peut bientôt plus faire autrement que de changer le système".

Jacques de Haller a aussi fustigé le Parlement, "incapable de prendre des mesures". "On ne peut plus escamoter le problème", a-t-il ajouté.

Le président de la FMH se réjouit tout de même d'une évolution positive: selon lui, la hausse des primes a rattrapé celle des coûts. "On a donc arrêté le petit jeu de Pascal Couchepin, qui faisait accumuler du retard en fixant des primes plus basses que les coûts effectifs". Les primes doivent correspondre aux coûts, insiste-t-il.

Le PS jurassien pour une caisse unique

Le Parti socialiste jurassien a déposé vendredi son initiative pour une caisse maladie unique et sociale pour les cantons qui le souhaitent.

L'objectif des socialistes jurassiens est de relancer le débat sur la caisse maladie unique au niveau fédéral.

Le conseiller aux Etats Claude Hêche espère que cette démarche aura un rôle d'aiguillon au niveau fédéral.

Après la validation des signatures, le Parlement jurassien pourra exercer son droit d'initiative de l'Etat en matière fédérale pour autoriser les cantons à instaurer leur caisse unique. Un libre choix qui exige une modification de la LAMal.

Le Parti socialiste jurassien n'est pas le seul à relancer le débat lié aux coûts de la santé. Le PS Suisse entend lancer une initiative populaire en faveur d'une caisse maladie unique sur le plan national.