Maintenant que la crise économique est un peu passée, "il ne faut pas que cela continue comme avant", a lancé Nicolas Sarkozy dans son discours prononcé devant une quarantaine de chefs d'Etat et de gouvernement. Il a notamment dénoncé les dérives du système monétaire international ou la "volatilité extraordinaire" du cours des matières premières.
Le locataire de l'Elysée a également évoqué la gouvernance internationale. Il s'est notamment demandé s'il était "normal" que des continents entiers, comme l'Afrique et l'Amérique du Sud, ou des puissances comme l'Inde ne soient pas représentés au Conseil de sécurité de l'ONU. "Le G199, j'y crois", a lancé le président français.
Briser la règle du consensus
Mais il doit avoir le courage de prendre des décisions, a-t-il ajouté, se prononçant contre la règle du consensus qui prévaut souvent dans les organisations internationales. Nicolas Sarkozy a également plaidé en faveur de "financements innovants" - comme par exemple une taxe sur les transactions financières - en faveur de l'aide au développement ou de la lutte contre le réchauffement climatique.
Selon l'Elysée, le chef de l'Etat français aura en marge du sommet des entretiens bilatéraux avec les présidents du Liban, Michel Sleiman, de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, et du Burkina Faso, Blaise Campaoré. D'autres entretiens sont prévus avec les Premiers ministres du Canada, Stephen Harper, et du Québec, Jean Charest, ainsi qu'avec le président malien, Amadou Toumani Touré.
Hommage à la Suisse
Le président français a par ailleurs salué la Suisse, "exemple parfait" selon lui de cohabitation entre quatre communautés linguistiques. Il a par ailleurs rendu hommage au secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) Abdou Diouf, qui brigue un nouveau mandat et qui devrait être reconduit à la tête de l'OIF dimanche. La Francophonie "a encore besoin de lui quelques années", a-t-il lancé.
Quelques minutes auparavant, Doris Leuthard avait pris la parole en espérant que ce sommet "inscrive résolument la Francophonie dans une perspective d'avenir".
Elle s'est notamment interrogée comment l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) pouvait peser sur des institutions telles que le G8 ou le G20, sur des dossiers comme la réforme du Conseil de sécurité de l'ONU ou les Objectifs du Millénaire pour le Développement et sur des événements tels que la conférence de Cancun sur le climat, en décembre.
Elle a également souhaité que la Francophonie, "plate-forme privilégiée du dialogue Nord-Sud", se prononce sur les événements actuels comme la reconstruction en Haïti ou le processus de paix au Proche-Orient.
Respect de l'Etat de droit
La présidente de la Confédération a par ailleurs assuré que "coups d'Etat et Francophonie étaient devenus incompatibles". Elle a appelé "à une restauration rapide de l'Etat de droit dans les pays suspendus" de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), la Guinée et Madagascar.
Doris Leuthard a accueilli ses hôtes au nom de la Confédération, mais aussi de "la Suisse des cantons et des communes". "Il ne s'agit pas non plus d'un accueil de la seule Suisse francophone, mais bien de toute la Suisse avec ses quatre langues et ses quatre cultures, comme en témoigne ma présence ici puisque je suis de langue maternelle allemande", a-t-elle ajouté, applaudie par l'assistance.
Le premier ministre canadien Stephen Harper a ensuite remercié la Suisse pour avoir su organiser ce sommet en quelques mois, suite à la suspension de Madagascar. Le secrétaire général de l'OIF Abdou Diouf et plusieurs chefs d'Etat, doivent encore intervenir à la tribune du sommet dans la journée.
Le climat au menu
Trois thématiques garnissent le menu des discussions: les relations internationales et la place de la Francophonie dans la gouvernance mondiale; les défis du développement durable, de la sécurité alimentaire et des changements climatiques; et la langue française et l'éducation dans un monde globalisé.
Samedi après-midi, les chefs d'Etat et de gouvernement présents au sommet devraient parvenir à "une prise de position" sur les moyens de lutter contre le réchauffement climatique, à quelques semaines de la conférence de Cancun (Mexique), selon la même source. La sécurité au Sahel et la lutte contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), qui détient depuis mi-septembre en otage cinq Français, un Malgache et un Togolais, seront également abordées.
ats/bkel/os
La Suisse aux petits oignons
Les 40 chefs d'Etat et de gouvernements et leurs conjoints attendus ce week-end à Montreux pour le 13e sommet de la Francophonie, vont être choyés par la Suisse. Celle-ci leur prépare une montre unique ainsi que des soins dans une prestigieuse clinique.
Rompant avec la tradition des sommets de la Francophonie, les autorités helvétiques n'ont pas hésité à faire appel à des sponsors pour compléter leur budget de 30 millions de francs devant financer la rencontre sous haute surveillance.
Si c'est une première pour la Francophonie, le recours à des partenaires privés pour ce genre d'événement est une pratique courante en Suisse, explique Johannes Matyassy, directeur général du 13e sommet.
Parmi les entreprises qui ont répondu à l'appel, un horloger a confectionné spécialement 80 montres pour le sommet. Ces pièces uniques seront offertes aux chefs d'Etat et de gouvernement ainsi qu'aux responsables des délégations logés au somptueux Montreux Palace.
La Suisse n'a pas oublié les conjoints pour lesquels elle a prévu un programme très chic, à l'image de la station huppée de la Riviera appréciée des célébrités. Croisière en bateau sur le Léman devant les terrasses de Lavaux, classées au patrimoine mondial de l'Unesco, déjeuner dans un hôtel centenaire de Vevey, et visites des vignobles.
Cerise sur le gâteau, les conjoints auront le droit à une visite de la très exclusive clinique La Prairie, avec soins. La clinique se veut discrète sur le programme proposé. Mais elle est célèbre pour son traitement concocté en 1931 qui permettrait de ralentir le vieillissement du système immunitaire, grâce à des injections de cellules qui proviennent du foie de jeunes moutons.
Les quelque 3000 délégués de 70 pays également présents auront plus modestement accès à des excursions très helvétiques: train à crémaillère panoramique sillonnant les alpages au pied des sommets enneigés, découverte de la région verdoyante de la Gruyère et visite de la fabrique de chocolat Cailler.
Plus de place pour l'Afrique
Les chefs d'Etat et de gouvernement francophones ont plaidé samedi pour une plus grande place de l'Afrique dans les instances internationales, notamment au Conseil de sécurité des Nations unies.
"Est-il normal qu'il n'y ait aucun membre permanent du Conseil de sécurité émanant de l'Afrique? Un milliard d'habitants! Dans trente ans, deux milliards d'habitants qui n'ont pas de représentation permanente! C'est un scandale", a ainsi dénoncé Nicolas Sarkozy.
Parmi les 40 chefs d'Etat et de gouvernement présents à Montreux figurent de nombreux Africains.
La réforme de la gouvernance mondiale est l'une des priorités que s'est fixée le président français pour sa présidence des G20 et G8, respectivement à partir des 12 novembre et 1er janvier prochains.
Le secrétaire général de la Francophonie, Abdou Diouf, a appelé les dirigeants à faire de l'OIF plus qu'un "agitateur d'idées éclairé".
Il a également prôné "une démocratisation des relations internationales et un multilatéralisme équilibré, qui ne pourra s'accommoder plus longtemps d'une sous-représentation de l'Afrique dans les organes où se prennent les décisions qui la concernent pourtant directement".
L'Afrique, qui représente 27% des Etats membres de l'ONU, ne dispose que de trois sièges de membres non permanents au Conseil de sécurité.