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La grâce de Bernard Rappaz se décide aujourd'hui

Grand Conseil valaisan [KEYSTONE - Jean-Christophe Bott]
Dans les travées du Grand Conseil valaisan, rares sont ceux qui soutiennent ouvertement Bernard Rappaz. - [KEYSTONE - Jean-Christophe Bott]
C'est aujourd'hui que le Grand Conseil valaisan décide du sort de Bernard Rappaz, en grève de la faim depuis 84 jours. Il doit décider si oui ou non il accorde la grâce au chanvrier valaisan, actuellement hospitalisé aux Hôpitaux universitaires de Genève.

Le Grand Conseil valaisan doit se réunir à huis clos cette après-midi. Il décidera s'il accepte ou non de gracier le chanvrier valaisan en grève de la faim depuis 84 jours consécutifs.

Vers un rejet?

Tout porte à croire que sa demande de grâce sera rejetée. Aucun parti politique n'a donné de consigne de vote sauf l'UDC. La plus petite formation du législatif valaisan refusera l'entrée en matière. Pour elle, "le simple fait de dire non à la demande de grâce serait déjà un signe de faiblesse".

Bernard Rappaz est hospitalisé à Genève depuis plusieurs semaines. [Salvatore Di Nolfi]
Bernard Rappaz est hospitalisé à Genève depuis plusieurs semaines. [Salvatore Di Nolfi]

Plus nuancées, les autres formations politiques laissent chaque député prendre sa décision en son âme et conscience. Mais dans les travées, rares sont ceux qui soutiennent ouvertement Bernard Rappaz.

Les députés qui s'expriment publiquement sont en principe peu cléments: ils ne veulent pas cautionner "le chantage" du chanvrier, préfèrent respecter "sa liberté de mourir" ou encore estiment que Bernard Rappaz doit "se sauver lui-même" en mettant fin à sa grève de la faim.

Marcelle Monnet-Terrettaz, présidente du groupe socialiste du Valais romand au Grand Conseil, a affirmé devant les caméras de la télévision cantonale Canal 9 qu'elle dira oui à la demande de grâce, "par compassion". Elle veut sauver un homme mais ne soutient pas Bernard Rappaz.

Des personnalités au front pour sauver le chanvrier

Jean-Charles Rielle. [keystone / gaetan bally]
Jean-Charles Rielle. [keystone / gaetan bally]

Condamné à cinq ans et huit mois pour violation grave de la loi sur les stupéfiants et autres délits, Bernard Rappaz a entamé sa grève de la faim le jour de son entrée en prison le 20 mars 2010. Il a obtenu une interruption de peine de quinze jours en mai puis des arrêts domiciliaires en juillet.

Depuis son entrée en prison, il totalise 196 jours de grève de la faim. Actuellement, il est hospitalisé aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Les médecins refusent de le nourrir de force malgré l'arrêt du Tribunal fédéral et l'injonction des autorités politiques et judiciaires valaisannes.

La détention à domicile, un privilège qui coûtera cher au chanvrier valaisan. [KEYSTONE - JEAN-CHRISTOPHE BOTT]
La détention à domicile, un privilège qui coûtera cher au chanvrier valaisan. [KEYSTONE - JEAN-CHRISTOPHE BOTT]

Aba Neeman, l'avocat de Bernard Rappaz, a remué ciel et terre pour obtenir une suspension de peine ou des arrêts domiciliaires. En vain.

Le TF a rejeté le dernier recours en début de semaine et le Conseil fédéral a refusé d'intervenir, invoquant l'absence de bases juridiques pour agir, l'exécution des peines relevant des cantons.

De nombreuses personnalités, surtout de l'extérieur du Valais, se sont aussi engagées en faveur de Bernard Rappaz, comme l'ancienne politicienne Anne-Catherine Menétrey-Savary (Verts/VD), l'ex-directeur de l'Office fédéral de l'environnement Philippe Roch ou le médecin et conseiller national Jean-Charles Rielle (PS/GE). Ce dernier a même envoyé une lettre ouverte aux députés du Grand Conseil valaisan.

Si sa grâce lui est refusée, Bernard Rappaz devrait poursuivre sa grève de la faim aux HUG. En mai dernier, il avait néanmoins dit vouloir se plier à la décision du Grand Conseil, quelle qu'elle soit.

ats/hof

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Le huis clos, une nouveauté en Valais

En Valais, les recours en grâce sont traités deux fois l'an, lors des sessions du Grand Conseil de mai et novembre. Le vote se déroule toujours à bulletins secrets.

En revanche, le huis clos est une nouveauté introduite en 2009, au début de la législature.

"Le Grand Conseil a institué le huis clos pour des raisons de protection de la personnalité du recourant. Mais aussi pour que les députés puissent s'exprimer librement", précisée Claude Bumann, chef du service parlementaire valaisan.

Comme toutes les autres, la demande de grâce de Bernard Rappaze donnera lieu à un rapport de la Commission de justice, puis, chaque groupe politique pourra s'exprimer avant le vote.

Le Grand Conseil accepte ou refuse la grâce. Mais si un député, le Conseil d'Etat ou la commission de justice le demande, il doit aussi se prononcer sur une grâce partielle, qui se traduit par exemple par une réduction de peine.

Le Conseil d'Etat peut s'il le souhaite assister à la séance à huis clos mais il ne vote pas.

Aucune recours n'est possible contre la décision prise par le Grand Conseil.

Le canton du Valais ne dispose d'aucune statistique sur les recours en grâce, mais ils sont rarement acceptés.

"De mémoire, en huit ans, je n'en ai vécu qu'un seul", relève Claude Bumann.

Tout détenu peut déposer une demande de grâce et la renouveler. La seule exigence est qu'elle soit déposée 40 jours avant l'une des deux sessions prévues à cet effet.