"Je n'ai jamais rien eu à faire directement avec Implenia durant mes 15 ans au Conseil fédéral", avait déclaré lundi Moritz Leuenberger, qui doit rejoindre le conseil d’administration du groupe de construction suisse. Or Implenia a directement profité des décisions de Moritz Leuenberger ou de son département dans le dossier du percement du Gothard, dénonce vendredi le Tages-Anzeiger.
Dans son enquête, le quotidien alémanique cite le cas de l'attribution d'un mandat de 1,7 milliard de francs pour l'installation de la technique ferroviaire dans le tunnel de base. Le mandat avait d'abord échappé au consortium auquel appartenait Implenia. Le perdant a déposé un recours.
Moritz Leuenberger a alors décidé de dédommager le consortium à hauteur d'un million de francs. En contrepartie, le recours a été retiré. Moritz Leuenberger reconnaît les faits. Mais c'était, dit-il, pour éviter un très coûteux retard dans les travaux du tunnel, dont le coût final est estimé à 9,8 milliards de francs.
Implenia était trop cher
Pour le conseiller aux Etats argovien UDC This Jenny, qui considère que le cas flirte avec la corruption, Moritz Leuenberger n'avait pas à dédommager le consortium. Car Implenia était tout simplement trop cher.
D'ailleurs, This Jenny entend déposer une motion au Parlement demandant simplement d'interdire aux anciens conseillers fédéraux de siéger dans les conseils d'administration d'entreprises privées, selon le Bund et le Tages-Anzeiger mardi.
L'élection de l'ancien ministre Moritz Leuenberger pour un mandat d'administrateur chez le leader de la construction en Suisse a été agendée à la prochaine assemblée générale des actionnaires. Le socialiste, qui a en outre décroché un autre mandat, devrait être rémunéré 100'000 francs par an pour cette activité.
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Quelques règles à respecter pour les anciens ministres
La reprise par un ancien membre du gouvernement d'une activité lucrative peut avoir des conséquences sur sa pension.
En quittant le Conseil fédéral à la fin octobre, Moritz Leuenberger est en droit de toucher une rente annuelle d'un peu plus de 200'000 francs, ce qui correspond à la moitié de la rémunération brute d'un ministre en exercice.
Mais l'arrêté fédéral sur les traitements des magistrats prévoit qu'ils ne doivent pas gagner davantage après leur départ que leurs collègues en fonction.
Ainsi, les anciens ministres qui décident d'exercer une activité rémunérée ou qui siègent dans des conseils d'administration doivent rétrocéder à la Confédération ce qu'ils gagnent de plus qu'un conseiller fédéral en place.
C'est le cas par exemple du radical Kaspar Villiger, président du conseil d'administration d'UBS et administrateur notamment de Nestlé et du réassureur Swiss Re.
Ses divers mandats rapportent largement plus à l'ancien patron de la fabrique de cigares éponyme que la rente d'ancien conseiller fédéral à laquelle il a dû renoncer.