Ces indemnités très élevées seront aussi interdites lorsque le capital-actions et les réserves légales ne sont plus couverts et lorsqu'aucun dividende n'est proposé à l'assemblée générale. Des exceptions seraient cependant possibles "pour autant qu'elles soient dans l'intérêt de la société et contribuent à sa prospérité à long terme".
L'assemblée générale se prononcera chaque année sur le montant total de ces enveloppes. Le règlement de rémunération pourra en outre prévoir des dispositions plus contraignantes, comme un seuil inférieur à 3 millions ou une interdiction absolue des salaires très élevés.
L'économie suisse pas menacée
La décision d'imposer les bonus est tombée par 25 voix contre 17. Rolf Schweiger (PLR/ZG), qui a ferraillé tant et plus pour tenter d'affaiblir le projet, s'y est opposé en vain, malgré le soutien de l'UDC.
Cette minorité a brandi le spectre d'un affaiblissement de l'économie suisse et d'une mise sous tutelle des entreprises. "Là, nous allons trop loin", a martelé Hannes Germann (UDC/SH).
Il n'en est rien, a rétorqué Roberto Zanetti (PS/SO): "Ces bonus ne seront pas interdits, mais simplement fiscalisés". En clair, ils seront considérés non plus comme un salaire, mais comme une part du bénéfice de l'entreprise.
"C'est une solution très libérale, car les entreprises peuvent faire ce qu'elles veulent", a renchéri la ministre de la justice Simonetta Sommaruga. Et Konrad Graber (PDC/LU) de rappeler que cette mesure ne toucherait actuellement que 383 personnes.
Cela ne va pas affaiblir l'économie suisse, avaient affirmé mardi Dick Marty (PLR/TI) et Géraldine Savary (PS/VD) lors du débat d'entrée en matière.
Cette nouvelle réglementation concerne toutes les sociétés anonymes. Rolf Schweiger aurait voulu la limiter à celles qui sont cotées en bourse, en argumentant qu'il serait problématique pour les PME de devoir se doter d'un règlement de rémunération et d'établir un rapport annuel Les PME concernées par de tels salaires sont très peu nombreuses, a ajouté Erika Forster (PLR/SG).
Le problème des rémunérations élevées ne se limite pas aux sociétés cotées en bourse, a au contraire relevé Simonetta Sommaruga. Selon elle, le potentiel d'abus existe aussi dans les autres entreprises et il n'y a pas de raison d'appliquer deux traitements différents. Le plénum l'a suivie par 26 voix contre 16.
Secrets de direction maintenus
Rolf Schweiger a tout de même eu gain de cause sur un point, contre la majorité de la commission et le Conseil fédéral. Le rapport de rémunération ne devra ainsi mentionner que le montant global accordé à la direction ainsi que le nom et la fonction de la personne dont la rémunération est la plus élevée.
La majorité de la commission aurait voulu indiquer la rémunération de chaque membre de la direction. "Celui qui n'a rien à cacher n'a pas à avoir honte", a argumenté en vain Simonetta Sommaruga.
ats/jeh
Une étape après l'autre
Le volet sur les bonus de plus de 3 millions complète le contre-projet à l'initiative de Thomas Minder en allant plus loin que celle-ci, car elle ne prévoit pas de dispositions en ce sens.
Le Conseil des Etats espère ainsi diminuer les chances de succès de l'initiative en votation.
Dans le premier volet, adopté mardi, la Chambre des cantons avait déjà renforcé le pouvoir des actionnaires afin de leur permettre de limiter les rémunérations abusives.
Ils se prononceront ainsi chaque année sur les indemnités du conseil d'administration et sur le règlement de rémunération.
Le projet interdit aussi les indemnités de départ - les "parachutes dorés" - et les primes anticipées, mais en prévoyant des exceptions à soumettre à l'assemblée générale.
Par ailleurs, les collaborateurs pourront être contraints de restituer des indemnités en cas de mauvaises performances.
Le dossier passe au Conseil national.