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Les Verts veulent un abandon du nucléaire d'ici 2024

De gauche à droite, Aline Trede, Franziska Teuschert, Miriam Behrens, Ueli Leuenberger et Christian van Singer. [Peter Schneider]
De gauche à droite, Aline Trede, Franziska Teuschert, Miriam Behrens, Ueli Leuenberger et Christian van Singer. - [Peter Schneider]
La Suisse doit abandonner le nucléaire d'ici 2024. Les Verts entendent lancer une initiative populaire pour parvenir à leurs fins. Le parti compte déjouer l'opposition des politiques "girouettes" à la mise hors service des centrales en donnant le dernier mot au peuple.

La concurrence est forte entre les partis pour tirer à soi la couverture avec des propositions, 18 jours après le début de la catastrophe de Fukushima. Socialistes et écologistes jouent en particulier au coude-à-coude avec des propositions similaires.

Débat extraordinaire sous la Coupole en juin

La centrale de Mühleberg, dans le canton de Berne, a été mise en service en 1972. [Martin Ruetschi]
La centrale de Mühleberg, dans le canton de Berne, a été mise en service en 1972. [Martin Ruetschi]

Pour les Verts, le but est clair depuis toujours: la Suisse doit se passer d'énergie nucléaire, ont souligné les représentants du parti mardi lors d'une conférence de presse.

Pour eux, l'offensive se jouera sur deux plans, la voie parlementaire et celle populaire. Les Chambres fédérales auront l'occasion de se prononcer sur la question lors de la session de juin, les Verts ayant demandé un débat extraordinaire.

Mais "nous nous méfions" de la volonté réelle de la majorité bourgeoise de sortir du nucléaire, a souligné le président Ueli Leuenberger. Récemment, nombre de ceux qui prônent aujourd'hui l'abandon de l'atome soutenaient encore la prolongation de l'exploitation de la centrale de Mühleberg.

Il ne faudrait pas en arriver au même stade qu'avec l'initiative sur les rémunérations abusives où le consensus initial s'est transformé au point de perdre la taxation des bonus en cours de route, a ajouté la conseillère nationale Franziska Teuscher (BE).

Une initiative populaire pour maintenir la pression

L'initiative populaire permettra donc de maintenir la pression. Le texte, actuellement en mains de la Chancellerie fédérale pour examen préalable, sera soumis à l'assemblée du parti le 9 avril. Il exige l'interdiction de la construction et de l'exploitation de centrales nucléaires.

Vue d'ambiance du site de Chavalon, a l'arret depuis 1999, prise en photo en décembre 2007, lors de la présentation du nouveau projet centrale au gaz naturel. [Denis Emery]
Vue d'ambiance du site de Chavalon, a l'arret depuis 1999, prise en photo en décembre 2007, lors de la présentation du nouveau projet centrale au gaz naturel. [Denis Emery]

Les centrales plus anciennes, celles de Mühleberg et Beznau I et II, devraient être mises hors service au plus tard un an après l'acceptation par le peuple et les cantons.

Les réacteurs de Gösgen et Leibstadt devraient être fermés au plus tard après 40 ans d'exploitation ou avant, si la sécurité l'exige.

Pour compenser les 40% d'électricité d'origine nucléaire perdus, il s'agira de réduire la consommation et d'accroître sensiblement la part des énergies renouvelables.

Les appareils énergivores et autres chauffages électriques devraient être interdits, selon Franziska Teuscher. A ses yeux, une réduction de la consommation énergétique pourrait même être atteinte d'ici 2024 grâce à des mesures d'économie.

Des panneaux solaires photovoltaïques posés sur le toit d'un des bâtiments de l'Ecole Polytechnique de Lausanne, EPFL. [Keystone - Dominic Favre]
La Suisse a exporté pour 2 milliards de francs de panneaux solaires en 2010. [Keystone - Dominic Favre]

En parallèle, il faut supprimer la limitation des projets d'énergies renouvelables bénéficiant du coup de pouce offert par le système de la rétribution à prix coûtant. "Quelques 8000 projets photovoltaïques, éoliens ou hydrauliques sont prêts à être mis en oeuvre", a relevé la Bernoise.

Si toutes les mesures prônées ne suffisent pas, on pourra recourir au gaz décentralisé, d'après Christian van Singer (VD). En dernier recours, les Verts sont même prêts à envisager des centrales à gaz, avec compensation du CO2 en Suisse.

Socialistes et Verts, même combat

A quelques accents près, l"agenda 24" des Verts se rapproche du plan du parti socialiste, qui prévoit une sortie du nucléaire d'ici 2025, soit un an après.

Cette photo prise mardi montre l'état du réacteur numéro 4 de Fukushima. [TEPCO/Kyodo]
Cette photo prise mardi montre l'état du réacteur numéro 4 de Fukushima. [TEPCO/Kyodo]

Les socialistes misent un peu plus sur le photovoltaïque et les Verts sur les économies d'énergie, a résumé Franziska Teuscher.

Le PS espère obtenir une loi réglementant la désaffection des centrales nucléaires et interdisant toute nouvelle construction. Mais les deux formations assurent ne pas vouloir se faire de l'ombre mutuellement et soutenir les plans de l'autre.

Le risque existe aussi que la question du nucléaire ne soit plus aussi brûlante à l'heure des élections fédérales.

"Les sujets qui occupent beaucoup de place dans les médias au printemps pourraient avoir perdu de l'importance cet automne", juge le politologue Claude Longchamp dans une interview à la Berner Zeitung, rappelant les élections de 2007. Pour lui, l'accident de Fukushima va être davantage utile aux Verts, en termes électoraux, et risque de nuire au PS.

ats/hof

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La table ronde du PS n'a guère de succès

Le Parti socialiste suisse n'a pas eu beaucoup de succès avec sa proposition de table ronde sur la politique énergétique de la Suisse. Les trois grands partis bourgeois - UDC, PDC et PLR - ont décliné l'invitation. Ils estiment que le moment est prématuré.

L'UDC préfère attendre la nouvelle évaluation de la politique énergétique par le Conseil fédéral. Il n'y a pas suffisamment d'éléments pour discuter tant que les causes de la catastrophe au Japon ne sont pas mieux connues, a déclaré le secrétaire général du parti Martin Baltisser mardi.

Même son de cloche du côté du PDC: inutile d'organiser un sommet sur l'énergie tant que les options du Conseil fédéral ne sont pas connues, a dit en substance la porte-parole des démocrates-chrétiens Marianne Binder. De plus, un débat extraordinaire sur le sujet est prévu au Parlement lors de la session d'été.

Les libéraux-radicaux ne ferment pas complètement la porte à la discussion, mais le moment est jugé peu approprié. Le PLR souhaite d'abord en débattre à l'interne, a indiqué le secrétaire général Stefan Brupbacher. Une commission spécialisée planche actuellement sur des scénarios alternatifs, qui seront soumis à la base du parti pour consultation.

Seuls les Verts et le Parti bourgeois-démocratique (PBD) sont d'accord de discuter avec le PS d'une éventuelle sortie du nucléaire. Le sort de cette ronde de discussion, prévue cette semaine ou la semaine prochaine, est donc incertain.

Doris Leuthard évoquera le sujet à Paris

La conseillère fédérale Doris Leuthard se rend vendredi à Paris pour rencontrer son homologue française Nathalie Kosciusko-Morizet. Les deux ministres de l'Environnement et des Transports vont notamment discuter de la question du nucléaire après les récents événements au Japon.

Cette visite intervient alors que le président de l'Autorité de sécurité nucléaire française, André-Claude Lacoste, a estimé récemment qu'il n'y avait pas de raison de fermer la centrale nucléaire de Fessenheim, en Alsace, à 35 km de Bâle. Les deux Bâles avaient lancé une demande pour cette mesure.

La centrale de Fessenheim est la plus ancienne centrale nucléaire de France encore en opération et se trouve dans une zone à risque sismique.

Le Parlement suisse doit débattre lors de la session d'été de l'avenir du nucléaire en Suisse. La demande auprès du Conseil fédéral de s'engager pour une mise hors circuit de la centrale de Fessenheim figure parmi les objets déposés.