Le but n'est pas de "durcir la loi, mais de condenser les procédures", a assuré Simonetta Sommaruga lundi devant la presse. La conseillère fédérale a présenté les grandes lignes de son idée, contenue dans un rapport commandé par la commission des institutions politiques du Conseil des Etats.
Il s'agit de changer complètement le système actuel en vue d'"accélérer massivement les procédures et renforcer la sécurité du droit", a assuré Simonetta Sommaruga. Cette "procédure rapide et juste renforce la crédibilité globale du système d'asile", a salué l'OSAR (Organisation d'aide aux réfugiés), dans un communiqué.
4 fois plus de places
La Confédération devrait prendre en main une bonne partie des opérations et accueillir les demandeurs dans des centres fédéraux. Les capacités d'hébergement des cinq centres fédéraux, actuellement 1200 places, devraient être quadruplés. "Ce ne seront pas des camps de requérants et il n'est nullement question d'entasser tout le monde dans un seul lieu", a insisté la ministre de justice et police.
Dans 80% des cas, la procédure devrait être bouclée en 120 jours, alors qu'elle peut s'étirer en moyenne jusqu'à 1400 jours aujourd'hui dans des cas complexes. Pour les 20% de cas nécessitant des éclaircissements ultérieurs, le dossier devrait être clos après un an. Ces personnes pourraient être transférées aux cantons.
Les centres fédéraux devraient suivre les intéressés durant toute la période de première instance. Ils mettraient à disposition des conseils juridiques, un soutien pour le rapatriement et des contrôles médicaux, selon la socialiste.
Recours accélérés
Les moyens de recours ne seront nullement touchés par la réforme. En revanche, la conseillère fédérale souhaite que les tribunaux accélèrent le traitement des cas. L'opération devrait être neutre du point de vue financier, selon elle. A terme, il devrait y avoir des économies puisque les procédures seront accélérées.
Le nouveau système, qui laissera certaines compétences aux cantons, contrairement à d'autres options non retenues, doit permettre une certaine flexibilité au gré de l'afflux des requérants. Les cantons continueraient par exemple d'exécuter les renvois.
Moins de cas de rigueur
Difficile de dire pour l'heure si le changement de stratégie aura des effets sur le taux de reconnaissance du droit à l'asile. L'objectif n'est en tout cas pas de restreindre la reconnaissance des réfugiés, a souligné Simonetta Sommaruga.
Il est cependant probable qu'il y aura moins d'admissions pour des cas de rigueur, puisque les procédures seront accélérées, d'après elle. La Suisse devrait être aussi moins être confrontée au phénomène des personnes qui passent dans la clandestinité, faute d'avoir obtenu l'asile. Les intéressés seront mieux suivis dans les centres fédéraux.
Pas avant cinq ans
Si tout va bien, le changement pourra être mis en oeuvre d'ici cinq ou six ans, d'après Mme Sommaruga. Le Conseil fédéral devrait présenter son avant-projet de révision de la loi sur l'asile d'ici la fin de l'an prochain pour la procédure de consultation.
En attendant, la commission des institutions politiques du Conseil des Etats a décidé de suspendre l'examen de la révision de la loi en cours et de scinder le projet en deux.
Le DFJP présentera une nouvelle mouture consacrée aux parties qui n'ont pas de rapport avec le changement fondamental d'ici septembre. Il y sera question de la mise en place d'une phase préparatoire, de la possibilité de soumettre le requérant à un examen médical et de l'amélioration de la protection juridique.
ats/cmen
Fin de la politique des faux-semblants, selon l'OSAR
L'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) salue la mise en place de procédures d'asile "plus rapides et plus justes", à ses yeux. Celles-ci vont dans l'intérêt de toutes les parties concernées, explique l'OSAR dans un communiqué.
Les personnes qui ont dû fuir dans des conditions épouvantables et qui reçoivent rapidement la protection de la Suisse peuvent profiter d'un sentiment de sécurité et se concentrer sur leurs nouvelles perspectives, écrit l'OSAR. Les personnes qui ne seront pas accueillies repartiront plus facilement, car elles n'auront pas eu l'occasion de créer des liens, en peu de temps, avec la Suisse.
Quant à l'Etat, il profite lui aussi de ces mesures, car des réfugiés plus rapidement indépendants et des requérants déboutés qui repartent sans grand délai lui permettront d'épargner des frais d'assistance et d'hébergement.
L'UDC aimerait faire encore plus vite
Pour l'UDC, les choses ne vont pas assez vite. Une fois de plus, une commission du Conseil des Etats repousse la révision urgente de la loi sur l'asile. De nouvelles dispositions doivent être élaborées et discutées en automne seulement, écrit le parti.
Quant à la cheffe du DFJP Simonetta Sommaruga, elle se concentre sur des structures nouvelles et coûteuses au lieu d'accélérer la procédure par des moyens simples et rapides. Elle perpétue la politique d'Eveline Widmer-Schlumpf, qui est d'annoncer de grandes mesures devant les médias au lieu de les concrétiser, critique l'UDC.
Il faut agir maintenant, et pas quand de meilleures structures seront à disposition, poursuit le parti, qui exige que le durcissement de la loi sur l'asile adopté en 2006 soit enfin appliqué. Pour l'UDC, les procédures d'asile doivent être nettement accélérées grâce à une révision immédiate de la loi et les moyens de recours restreints.
Des expulsions dans des Etats tiers d'Afrique doivent être rendues possibles grâce à des accords bilatéraux. Enfin, les contrôles doivent être renforcés aux frontières sud du pays et, le cas échéant, soutenus par l'armée.