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Sortir du nucléaire: une pluie de réactions

Nucléaire: tout est-il sous contrôle en Suisse? [Peter Schneider]
La fin de l'atome en Suisse est programmée pour 2034 par le Conseil fédéral. - [Peter Schneider]
Les partis politiques et les milieux intéressés ont rapidement réagi à la proposition du Conseil fédéral de sortir définitivement de l'atome en 2034. "Trop timoré", "inquiétant", "irresponsable", "novateur" ou "courageux"... le projet ne laisse personne indifférent.

La plupart des formations ont communiqué leur avis après la proposition du Conseil fédéral (lire: Energie nucléaire).

Anti-nucléaires depuis toujours, les Verts critiquent la durée d'exploitation "trop longue" accordée par le Conseil fédéral aux centrales avant de les fermer, en particulier celles de Beznau et Mühleberg. Le Parti écologiste exige une sortie immédiate de l'atome. Comme le souhaite la population, affirme-t-il. Le gouvernement présente les bonnes solutions mais joue la montre, écrivent les Verts dans un communiqué. Les Verts misent donc sur leur initiative qui exige un abandon total du nucléaire d'ici 2029.

Peter Schneider [Peter Schneider]
Christian Levrat, le président du PS. [Peter Schneider]

L

e Parti socialiste

estime que la proposition du Conseil fédéral est une bonne chose mais juge, comme les Verts, que la durée de vie de 50 ans laissée aux centrales est encore trop longue. Pour le reste, le parti attend maintenant du Parlement qu'il confirme la décision du Conseil fédéral et prenne des mesures pour développer les énergies renouvelables et les économies de courant, comme le réclame son initiative "Cleantech".

La décision de sortir progressivement du nucléaire est "courageuse", selon le Parti démocrate-chrétien qui la met avant tout sur le compte de "sa" ministre Doris Leuthard. Après la catastrophe de Fukushima, c'était la seule voie politique envisageable, selon le parti. Il annonce des propositions "concrètes" de mise en oeuvre des nouvelles priorités fixées par le gouvernement: efficacité énergétique, promotion des énergies renouvelables, développement de la force hydraulique et solutions transitoires telles que le développement de la production d'électricité à base de combustible fossile avec des installations de couplage chaleur-force.

MM Pelli et Darbellay
MM Pelli et Darbellay

L'arrêt à la fin de leur durée de vie des centrales nucléaires existantes est une bonne chose, estime lui aussi

le Parti libéral-radical

. Le parti critique en revanche la décision du Conseil fédéral de fermer à tout jamais la porte à de nouvelles technologies. Il demande une votation populaire dans 10 ans. Le peuple doit pouvoir se prononcer sur les premières expériences qui auront été faites en matière d'approvisionnement énergétique et de progrès techniques, écrit le PLR dans un communiqué. En attendant, le parti exclut de fermer avant la fin de leur durée de vie les centrales en cours d'exploitation tant qu'elles sont sûres.

L'Union démocratique du centre juge hâtive la décision du Conseil fédéral. Le gouvernement risque de pénaliser l'économie et les ménages à travers des prix de l'électricité nettement plus élevés et des impasses dans l'approvisionnement, indique le parti dans un communiqué. Les entreprises et les consommateurs dépendent d'une énergie en quantité suffisante, à prix modéré et sûre. L'UDC ne veut pas renoncer à l'option nucléaire sans disposer d'un concept plausible sur l'approvisionnement énergétique futur.

Les cantons veulent être associés à la concrétisation du plan d'action du Conseil fédéral sur le nucléaire. La Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie demande aussi au gouvernement de viser l'horizon 2020 pour le début des mesures. Les cantons se sentent particulièrement concernés, écrit mercredi le comité de la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie (EnDK). D'une part, ils sont copropriétaires des centrales électriques et d'autre part, ils sont responsables de la mise en oeuvre des mesures dans le domaine des bâtiments. La Conférence se dit par ailleurs préoccupée par la question de la sécurité de l'approvisionnement en énergie dans les années à venir.

La décision "irresponsable" du Conseil fédéral met en danger l'approvisionnement énergétique de la Suisse, estime Economiesuisse. L'association faîtière des entreprises craint une hausse des prix au détriment de la population et de l'économie. Rappelant que 40% de l'électricité est d'origine nucléaire, Economiesuisse estime qu'il est actuellement hautement improbable que cette source d'énergie puisse être remplacée. Elle dénonce donc "une décision précipitée qui relève de calculs électoraux".

24 mars 2011: la centrale de Mühleberg, dans le canton de Berne. [Martin Ruetschi]
24 mars 2011: la centrale de Mühleberg, dans le canton de Berne. [Martin Ruetschi]

L'Association des entreprises électriques suisses

(AES) accueille quant à elle la décision du Conseil fédéral "avec grande inquiétude". Ce choix exclut "d'importants critères permettant un approvisionnement en électricité fiable, économique et respectueux du climat". L'impact de ce changement de stratégie sur l'économie n'est pas clairement présenté, écrit l'association mercredi dans une prise de position, en faisant allusion à la hausse des prix. La dépendance de la Suisse vis-à-vis de l'étranger va augmenter, d'autant plus qu'aujourd'hui déjà, le pays est contraint à importer du courant en hiver, rappellent les entreprises électriques.

Les Forces motrices bernoises (FMB), exploitantes de la centrale nucléaire de Mühleberg, ont en revanche pris connaissance "avec inquiétude" de la décision du Conseil fédéral. Une sortie progressive mais définitive du nucléaire rendra plus difficile à l'avenir la garantie d'un approvisionnement en électricité sûr, économique et peu émetteur de CO2, ont communiqué mercredi les FMB.

Axpo, qui exploite la centrale de Beznau et a des participations dans celles de Gösgen et Leibstadt, juge la décision du Conseil fédéral "rapide et prise sous une grande pression politique". Elle conduira à une situation problématique pour l'approvisionnement, pronostique-t-il. De plus, la sortie du nucléaire implique des interventions étatiques importantes ainsi que des coûts élevés pour les consommateurs. Une décision d'une si grande portée doit absolument être soumise au peuple, estime l'entreprise.

Alpiq, exploitant de la centrale de Gösgen (SO), estime aussi que le peuple doit avoir le dernier mot sur l'orientation de la future politique énergétique. D'ici là, Alpiq ne poursuivra pas le projet de construction de nouvelles centrales. Le groupe entend investir un milliard de francs dans les nouvelles énergies renouvelables afin de quintupler la part de production issue de ces énergies.

L'Agence des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique se réjouit quant à elle de la décision "pionnière" du Conseil fédéral. Le chapitre de l'énergie atomique va ainsi définitivement prendre fin, écrit-elle mercredi dans une prise de position. Selon l'agence, ce choix signifie l'entrée effective dans un approvisionnement énergétique durable et favorable pour l'économie.

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agences/cer/vkiss

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